MACKY SALL EN RUSSIE : Une visite de raison
Trois mois après le déclenchement de la guerre en Ukraine, le président sénégalais par ailleurs président en exercice de l’Union africaine (UA), Macky Sall, s’est envolé le 02 juin dernier pour la Russie en compagnie du président de la Commission de ladite organisation continentale. Un premier voyage en Russie, prévue pour le 18 mai dernier, pour répondre à une invitation de Moscou dans ce sens, n’avait pu avoir lieu ; ce qui avait nécessité une reprogrammation.
Le président en exercice de l’UA a pris toute la mesure des conséquences de cette guerre qui pèsent lourdement sur l’Afrique
Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’Afrique semble décidée à jouer aussi sa partition dans cette guerre en Ukraine qui ne laisse personne indifférent et qui domine l’actualité mondiale depuis le 24 févier dernier, date de l’invasion de ce pays par la Russie qui ne voit pas d’un bon œil, les velléités d’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN. Et cette visite annoncée du président en exercice de l’UA à Moscou et à Kiev, est la preuve de la volonté d’implication du continent noir dans la recherche de solutions à ce conflit qui ne manque pas de répercussions sur l’ordre économique mondial. Mieux, l’on peut dire que c’est une visite de raison. Car, au-delà des deux belligérants, c’est un conflit dont les conséquences affectent énormément la planète tout entière. A commencer par l’Afrique qui est à mille lieues du théâtre des opérations, mais qui subit de plein fouet les conséquences de cette guerre dont on se demande à présent quand est-ce qu’elle prendra fin. Et Macky Sall ne pouvait pas être mieux dans son rôle quand il dit qu’ « en tant que président en exercice de l’Union africaine, j’ai exprimé au chancelier, nos sérieuses préoccupations quant à l’impact de la guerre sur nos pays, pays africains, notamment la flambée généralisée des prix et les pénuries ». C’est dire si au-delà de toute considération, le président en exercice de l’UA a pris toute la mesure des conséquences de cette guerre qui pèsent lourdement sur un continent qui n’a jamais été véritablement préparé à y faire face. Mais au-delà du simple fait de porter la voix du continent africain, que peut faire Macky Sall ? Quelles chances de succès pourrait-il avoir là où les interventions de bien des médiateurs, à l’image du Secrétaire général de l’ONU, n’ont pas permis de faire bouger significativement les lignes dans le sens de la désescalade?
Le président en exercice de l’UA ne semble pas dans une logique d’alignement derrière l’une ou l’autre des parties en conflit
Et si le patron du Kremlin n’a pas reculé devant l’avalanche de sanctions des pays occidentaux, de quelle potion magique dispose le grand leader du pays de la Teranga comme arme secrète pour espérer faire entendre raison au « Tsar » russe ? Autant de questions qui amènent à se demander si cette visite annoncée du président en exercice de l’UA à Moscou et à Kiev, n’est pas plus pour se donner bonne conscience ou encore faire dans la symbolique. Car, tout porte à croire que tant que le président russe, Vladimir Poutine, n’aura pas atteint ses objectifs en Ukraine, la probabilité est faible qu’il revoie sa position à moins d’y être contraint. De son côté, ragaillardie par le soutien indéfectible et conséquent des pays occidentaux qui se sont systématiquement alignés derrière elle, toute chose qui lui a permis de faire mieux que résister, l’on se demande si Kiev ne commence pas à nourrir à présent, des espoirs de victoire. En tout état de cause, sur la question de cette invasion russe en Ukraine, l’Afrique reste plutôt divisée. Sans doute en raison des liens de coopération plus ou moins forts que les uns et les autres entretiennent avec Moscou. Toujours est-il que le président en exercice de l’UA ne semble pas dans une logique d’alignement derrière l’une ou l’autre des parties en conflit mais plutôt pour le dialogue qui devrait permettre de faire taire les armes. Une option qui peut paraître utopique, face à l’obstination de Moscou visiblement décidée à régler ses comptes avec les Occidentaux, dans ce qui ressemble à une guerre par procuration. Mais dès lors que les portes de la négociation ne sont pas totalement fermées, on peut toujours garder l’espoir que le dialogue finira par prendre le dessus sur le langage des armes. Surtout si les combats qui commencent à être longs devaient tourner à l’enlisement, là où d’aucuns avaient imaginé au départ, y compris le maître du Kremlin, une guerre-éclair.
« Le Pays »