HomeA la uneAPPEL DE L’UE AU DIALOGUE AU KENYA : Le médecin après la mort  

APPEL DE L’UE AU DIALOGUE AU KENYA : Le médecin après la mort  


 

Alors que les Kényans ont le regard tourné vers la Cour suprême qui avait créé la surprise en invalidant le 1er scrutin présidentiel,  l’Union Européenne (UE) sort de son silence. En effet,  dans une déclaration rendue publique le 30 octobre dernier, elle renvoie dos à dos les deux protagonistes de la crise politique kényane, en l’occurrence Uhuru Kenyatta et Raïla Odinga qu’elle tient pour responsables de l’atmosphère sulfureuse dans le pays, avant de les inviter à s’asseoir autour de la table de négociations. De prime abord, il faut se féliciter de cette déclaration qui est fondée sur le souci de ne pas jeter de l’huile sur le brasier kényan. C’est en ce sens que l’appel de l’institution européenne semble être fait sur le ton de la neutralité. L’on remarquera d’ailleurs que l’UE s’est gardée, comme tous les autres acteurs de la communauté internationale, de toute précipitation. Si cette retenue peut s’expliquer par le fait que les premiers à adresser des félicitations au vainqueur lors du premier vote ont été échaudés par l’invalidation du scrutin, elle traduit toute la circonspection avec laquelle les résultats de l’élection du 26 octobre dernier sont appréhendés au niveau international. Tous sont dans l’expectative du verdict de la Cour suprême et l’on comprend que les Européens, dans le souci de ne pas influencer les décisions du juge et de ne pas fournir la mèche pour mettre le feu aux poudres, ont voulu faire dans le diplomatiquement correct. Maintenant, l’on peut regretter que cette sortie de l’UE vienne quelque peu sur le tard, comme le médecin après la mort. En effet, si cet appel au dialogue  avait été lancé avant la tenue de l’élection, il aurait eu le mérite de mettre  la pression sur les acteurs de la scène politique kényane pour qu’ils s’asseyent autour de la table de négociations afin de définir de façon consensuelle les conditions d’un scrutin apaisé.

On peut couvrir de lauriers Raïla Odinga

Maintenant que le forfait est consommé, l’on peut se demander à quoi pourrait bien servir un dialogue si ce n’est demander à Raïla Odinga d’aider le voleur à transporter et sécuriser les fruits de sa rapine. En d’autres termes, il est implicitement invité à prendre acte de la victoire de son challenger et à mettre sous éteignoir ses revendications, face à un président très mal réélu. Pire, cet appel au dialogue, à ce moment précis, vient apporter de l’eau au moulin de Uhuru Kenyatta.  C’est pourquoi l’on peut penser que la déclaration de l’UE pue l’hypocrisie et l’on peut se poser la question de savoir à quel jeu jouent les Européens. Prétendument à cheval sur les droits de l’Homme et les libertés démocratiques, ils sont les premiers à voler au secours des dictateurs au nom de leurs intérêts, enjambant les corps de nombreux macchabées.  Cela dit, Uhuru Kenyatta devrait être gêné aux entournures et faire profil bas en ayant le triomphe modeste. S’il tient en main la victoire, elle n’a rien d’un trophée de guerre et comme le dit l’adage, « à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire ». Et cela, il devrait bien le comprendre ; lui qui, jusque-là, n’a reçu aucune félicitation, pas même de la Grande Bretagne, l’ancienne puissance coloniale du Kenya.  A contrario, l’on peut couvrir de lauriers Raïla Odinga qui a fait preuve de responsabilité, en se réservant d’appeler ses partisans à installer le chaos dans le pays.

 

SAHO  


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