HomeA la uneATTAQUE DE LA POUDRIERE DE YIMDI : 17 ans de prison ferme pour Ali Sanou

ATTAQUE DE LA POUDRIERE DE YIMDI : 17 ans de prison ferme pour Ali Sanou


Des peines allant de 6 mois avec sursis à 10 ans de prison ferme pour les autres prévenus

20 ans de prison ferme pour Albert Gounabou en fuite

Le verdict du dossier de l’attaque de la poudrière de Yimdi est tombé hier, 6 avril 2017. Le Tribunal militaire de Ouagadougou a prononcé des peines de 6 mois avec sursis à 17 ans de prison ferme contre le sergent-chef Ali Sanou et ses complices. Le soldat de 1re classe Albert Gounabou, en fuite, a été condamné à 20 ans de prison ferme.

Le sergent-chef Sanou Ali, reconnu être le cerveau de l’attaque de la poudrière de Yimdi, a été condamné à 17 ans de prison ferme. Le sergent Poda Ollo Stanislas, reconnu avoir participé à l’attaque, a également écopé de 17 ans de prison ferme. Les autres complices, notamment Ollé Bienvenu Kam, Handi Yonli, Boureima Zouré, Hamado Zongo, Aboubakren Ould Hamed, Salif Couldiaty, Abdoul Nafion Nébié, Desmond Toé, Hamidou Drabo, Djimaldine Napon, Abou Ouattara, Issouf Traoré et Seydou Soulama ont, chacun, été condamnés à 10 ans de prison ferme. Le sergent-chef Lahoko Mohamed Zerbo, le sergent-chef Roger Damagna Joachim Koussoubé alias « Touareg » et l’adjudant Kossè Ouékouri ont écopé chacun de 3 mois de prison ferme. Le caporal Issaka Ouédraogo est, quant à lui, condamné à 6 mois de prison assortis de sursis. Sabkou Yago, seul civil impliqué dans ce dossier, et le soldat de 1re classe Salfo Kosporé ont été acquittés des faits de recel de malfaiteurs et complicité de vol aggravé, pour infractions non constituées. Ainsi en a décidé, hier 6 avril, le Tribunal militaire de Ouagadougou. Cela, après plus d’une semaine de procès. Les condamnés ont donc 15 jours pour se pourvoir en cassation, selon le président du Tribunal militaire de Ouagadougou, Seydou Ouédraogo.
Il faut noter que durant le procès, un seul accusé n’a pas répondu présent à la barre. Il s’agit du soldat de 1re classe Albert Gounabou, toujours en fuite, qui a été jugé par contumace et condamné à 20 ans de prison ferme pour complot militaire. Mais bien avant ce procès, le tribunal s’est prononcé sur la confiscation du scellé constitué de matériels militaires au bénéfice des Forces armées nationales, la confiscation au profit du Trésor public du véhicule de marque BMW couleur grise immatriculé 11 JK 2454 ayant servi au transport des armes volées et à la fuite des assaillants.

L’AJT débouté

Pour l’Agence judiciaire du trésor (AJT), du fait de l’attaque de la poudrière de Yimdi, l’Etat a dépensé 16 181 137 F CFA pour doter en armes les Forces armées nationales et n’eût été cette attaque, cette somme aurait dû être utilisée à d’autres fins. Au regard de cet état de fait, elle a réclamé la somme de 1 501 879 F CFA pour les préjudices subies par l’Etat à cause de la privation de ces matériels. La plupart des 16 prévenus qui ont été appelés à la barre pour ces charges, ont dit s’en remettre à la décision du tribunal. Mais pour leurs avocats, l’Etat devrait justifier ce préjudice. Car pour eux, l’absence d’une arme ne peut pas porter préjudice à l’Etat. « Le préjudice de l’Etat n’est pas justifié. Le fait que les armes ne soient pas là ne porte pas préjudice à l’Etat », a insisté Me Emmanuel Yonli, avocat de la défense. Pour lui et ses collègues, l’Etat aurait dû demander un franc symbolique car celui-ci peine à « donner en quoi consiste les préjudices ». Le Tribunal, après avoir délibéré conformément à la loi, a déclaré la requête de l’AJT non fondée et l’a déboutée. Pour rappel, c’est depuis le 28 mars 2017 que le sergent-chef Ali Sanou et les 21 autres accusés dans l’attaque de la poudrière de Yimdi comparaissent devant le Tribunal militaire, pour répondre des charges retenues à leur rencontre. Il s’agit, entre autres, des faits de complot militaire, désertion à l’étranger en temps de paix, vol aggravé, détention illégale d’armes à feu ou de munitions, coups et blessures volontaires.

Mamouda TANKOANO

 

Une copine des accusés s’évanouit après le prononcé du verdict

Depuis l’ouverture du procès le 28 mars dernier, elle n’est pas restée inaperçue. Il s’agit de la copine d’un des accusés, la vingtaine bien sonnée. Hier, toute la journée également, elle est restée aux côtés de son copain et pendant l’attente du verdict, elle a même eu à échanger avec ce dernier. Mais dès que le président du Tribunal militaire de Ouagadougou, Seydou Ouédraogo, a prononcé la peine des accusés, elle est tombée en syncope dans la salle, à la surprise générale. Il aura fallu une quinzaine de minutes avant qu’elle ne puisse reprendre connaissance.

– Des condamnés très sereins

On s’attendait à les voir se morfondre après le verdict du Tribunal. Mais, il n’en était rien. Il s’agit bien du sergent-chef Ali Sanou et des 18 autres condamnés. Juste après le verdict, le Tribunal a observé une pause, le temps de revenir se prononcer sur la confiscation du scellé constitué de matériels militaires au bénéfice des Forces armées nationales, la confiscation au profit du Trésor public du véhicule de marque BMW couleur grise immatriculé 11 JK 2454 ayant servi au transport des armes volées et à la fuite des assaillants. Pendant ce temps, presque tous les accusés étaient sereins. Cependant, la tristesse se lisait sur les visages de leurs copines et femmes. Avant d’embarquer dans le véhicule pour sa cellule, à l’issue du procès, le sergent-chef Ali Sanou a tenu ces propos à sa femme : « Ta force est ma force ».

Rassemblés par M.T.

 

PROPOS D’AVOCATS A L’ISSUE DU VERDICT

Me Fako Bruno Ouattara, conseil de Ali Sanou

« En même temps que nous ne sommes pas trop d’accord avec la décision, en même temps nous comprenons le tribunal »

« Le verdit nous a surpris parce qu’on a jugé qu’un élément de la volonté de Sanou. Il a dit « je n’ai pas attaqué le dépôt d’armes ». Le complot suppose que vous voulez prendre le commandement ou le pouvoir. Sanou a dit qu’il ne voulait pas prendre le contrôle du dépôt, il avait juste besoin d’une arme pour sauver la vie des gens. On s’arrête juste aux actes préparatoires et on ne va pas jusqu’au bout. Nous estimons que la décision est lourde. En même temps nous comprenons l’opinion publique, parce que le RSP, ce n’est pas du jeu. Il a fait des gaffes. Donc, en même temps que nous ne sommes pas trop d’accord avec la décision, en même temps nous comprenons le tribunal qui veut satisfaire l’opinion publique. Nous avons fait un pourvoi en cassation. Il y a l’article 26 de la loi organique portant organisation du Conseil constitutionnel qui est très clair. Cet article dit que quand vous soulevez l’exception d’inconstitutionnalité devant une juridiction, ils ont l’obligation de surseoir à statuer. Il n’y a pas de discussion si tant est que c’est le droit qui nous gère tous. Il y a un journal qui dit « tentative d’évasion ou tentative d’assassinat, et si Sanou avait raison ? ». J’espère qu’il a tort et qu’on ne va pas se retrouver dans une embrouille qui va trimballer tout le pays dans des angoisses. »

Me Odilon Abdou Gouba, avocat de Ollo Poda

« La justice n’a pas été dite comme elle devrait l’être »

« Je suis déçu du verdict. Mon client, le sergent Poda Ollo Stanislas Silvère, a écopé de 17 ans. Il est jeune, c’est un soldat très compétent. Il a donné toute sa vie à l’armée burkinabè. Il est vrai qu’il a commis une erreur, mais qui ne commet pas d’erreur dans sa vie ? Je suis déçu parce que des infractions n’étaient pas constituées. Nous avons apporté la démonstration juridique, notamment le complot militaire. Le sergent-chef Ali a assumé et il a dit comment il a manipulé ses éléments pour les amener sur le terrain de Yimdi. La justice n’a pas été dite comme elle devrait l’être. La suite à donner à ce procès dépendra de l’avis de nos clients, parce que la commission d’office prend fin dès le prononcé de la décision. Donc, nous allons nous entretenir avec nos différents clients pour savoir s’ils entendent se pourvoir en cassation contre cette décision que nous avons du mal à accepter, parce que cela ne reflète pas l’instruction qui a été faite à la barre. Cela ne reflète pas les pièces qui ont été produites à l’audience. Cela ne reflète pas le débat contradictoire qui a eu lieu et qui a montré suffisamment la faiblesse de l’accusation et l’insuffisance des moyens avancés par le commissaire du gouvernement pour requérir de lourdes peines à l’encontre de nos clients. Les réclamations de l’AJT sont irrecevables mais mal fondées en droit parce que celui qui prétend faire une prétention doit apporter la preuve, selon l’article 25 du Code de procédure civil. »

Me Yelkouni Olivier, avocat de Abdoul Nafion Nébié

« C’est une décision de Justice, nous la prenons ainsi »

« Nous sommes déçus parce que la décision du tribunal ne nous arrange pas. Nous avons plaidé l’acquittement pour ce qui concerne les infractions criminelles, la relaxe pure et simple pour ce qui concerne les délits. Malheureusement, nous n’avons pas été suivis dans nos prétentions. De ce fait, nous sommes déçus. Nous allons nous concerter avec nos clients pour voir les voies de recours à exercer. Nous avons défendu la thèse selon laquelle l’infraction de complot militaire n’était pas constituée. Malheureusement, c’est l’appréciation du tribunal qui prime. C’est une décision de Justice, nous la prenons ainsi tout en avisant avec nos clients ce qu’il faut faire par la suite. Les réclamations civiles de l’Etat burkinabè sont fantaisistes parce que l’AJT n’a présenté aucune preuve. »

Propos recueillis par Françoise DEMBELE

 


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