HomeA la uneCRISES AU SOUDAN ET AU SOMALILAND : Que peut encore l’IGAD ?

CRISES AU SOUDAN ET AU SOMALILAND : Que peut encore l’IGAD ?


Neuf mois après son déclenchement en mi-avril 2023, la guerre entre le chef de la junte au pouvoir au Soudan, le Général Abdel Fattah Al-Burhan et son rival des Forces de soutien rapide (FSR), le Général Mohamed Hamdane Daglo dit « Hemetti », qui se disputent le pouvoir à Khartoum, continue de faire rage. Et les nombreuses initiatives de paix entreprises par des médiateurs dont les Etats-Unis et l’Arabie Saoudite, n’ont jusque-là abouti qu’à des cessez-le-feu éphémères. C’est dans ce contexte que l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), une organisation régionale de l’Afrique de l’Est regroupant le Djibouti, l’Ethiopie, l’Erythrée, le Kenya, la Somalie, le Soudan, le Soudan du Sud et l’Ouganda, a convoqué un sommet extraordinaire le 18 janvier dernier à Kampala, à l’effet de trouver des solutions visant à mettre fin au conflit. Une rencontre de haut niveau qui devait aussi connaître de la récente crise entre l’Ethiopie et la Somalie à propos du Somaliland, et qui a été snobée par le Général Al Burhan qui a décidé de ne pas s’y rendre.

 

La rencontre de Kampala paraît plus un sommet pour se donner bonne conscience

 

Au contraire de son rival, le Général Hemetti, qui avait confirmé sa participation au sommet de la capitale ougandaise. Mais avec des protagonistes qui refusent de se retrouver autour d’une même table de négociations, que peut encore l’IGAD ? La question est d’autant plus fondée qu’en ce qui concerne les Généraux ennemis soudanais, ce n’est pas le premier rendez-vous manqué entre les deux belligérants. Et ce n’est pas la première fois non plus que des initiatives visant à les amener à fumer le calumet de la paix, échouent à connaître un aboutissement heureux. Comment peut-il en être autrement quand les cessez-le-feu momentanés auxquels s’engagent les protagonistes, sont systématiquement violés par les belligérants sur le terrain ? Comment peut-il encore en être autrement quand les trêves humanitaires parfois arrachées au forceps, peinent à laisser du répit aux pauvres populations prises au piège des combats, quand elles ne sont pas contraintes de prendre le chemin de l’exil ? Et dans le cas d’espèce du sommet de Kampala, on ne s’étonnera pas qu’en l’absence d’un des acteurs majeurs du conflit en la personne du Général Al Burhan, les discussions ne puissent pas connaître une avancée notable. Et c’est peu dire que le président du Conseil souverain de transition du Soudan qui se veut l’homme fort du pays, ne se sentira pas concerné par les conclusions de ce sommet. Ce qui pourrait déjà en soi, être un sérieux handicap. Mais on ne pourra pas reprocher à l’organisation régionale de n’avoir rien entrepris. Et la rencontre de Kampala paraît d’autant plus un sommet pour se donner bonne conscience que l’IGAD est mal partie pour réussir dans son initiative de rapprochement des deux chefs de guerre.

 

C’est le pauvre peuple soudanais qui continue de souffrir le martyre

 On est d’autant plus fondé à le croire qu’au-delà de sa renonciation à participer à ce sommet de Kampala, Khartoum a suspendu ses relations avec l’organisation communautaire en ne manquant pas de présenter le problème comme un conflit interne qui nécessite une solution endogène avant d’élargir les discussions à l’organisation régionale. Une position qui semble plus tenir du dilatoire que de la volonté réelle de trouver un compromis politique à la crise, à en juger par le peu d’empressement et d’enthousiasme que montrent les deux parties à aller à des négociations directes. Toujours est-il que quand ce n’est pas l’un qui est indisponible, c’est l’autre qui pose des conditions. Comme si les deux officiers militaires évitaient soigneusement de se rencontrer, de peur d’on ne sait quoi.  A moins que cette attitude ne soit symptomatique de la haine viscérale que se vouent les deux frères ennemis. Toute chose qui cacherait mal leur penchant pour la solution militaire ; chacun espérant secrètement pouvoir gagner l’autre à l’usure. Mais à ce jeu, c’est le pauvre peuple soudanais qui continue de souffrir le martyre, avec une crise humanitaire qui ne cesse de s’amplifier au regard de la violence et de l’intensité des combats ainsi que des difficultés à protéger les civils ou encore à les ravitailler en produits de première nécessité. C’est pourquoi il est impératif qu’au-delà de l’IGAD, la communauté internationale s’implique davantage dans la résolution du conflit soudanais. En tout état de cause, il y a un temps pour faire la guerre et il y a un temps pour faire la paix. Et il urge d’autant plus de trouver un compromis politique à la crise que la guerre est au bord de l’enlisement, avec des forces combattantes qui peinent à faire la différence sur le terrain. Et puis, le peuple soudanais mérite un meilleur sort que cette guerre qui n’est pas la sienne, et que lui imposent injustement des aventuriers assoiffés de pouvoir. Lesquels n’ont pas hésité à ouvrir les portes de l’enfer à leurs compatriotes pour assouvir des ambitions purement égoïstes.

« Le Pays »

 


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