HomeA la uneDECISION MORTIFERE DE LA COUR CONSTITUTIONNELLE CONGOLAISE : La RDC promise aux cris et aux larmes

DECISION MORTIFERE DE LA COUR CONSTITUTIONNELLE CONGOLAISE : La RDC promise aux cris et aux larmes


Le président de la RDC, Joseph Kabila, peut désormais se frotter les mains. Et pour cause, son ambition non dissimulée de demeurer au pouvoir au-delà des délais constitutionnels, vient d’être assouvie par la Cour constitutionnelle congolaise. En effet, répondant à une requête des élus de la majorité lui demandant de statuer sur le sort du président au cas où l’élection ne se tiendrait pas avant la fin de son mandat, cette institution, dans un arrêt rendu public le mercredi 11 mai, a choisi de privilégier l’article 70, alinéa 2 de la Constitution, qui stipule qu’ « à la fin de son mandat, le président de la République reste en fonction jusqu’à l’installation effective du nouveau président élu ». Les choses ne souffrent d’aucune ambiguïté. Kabila gardera le gouvernail du pays tant qu’un successeur n’aura pas été désigné par les urnes. Les Congolais doivent donc prendre leur mal en patience. Et l’attente pourrait être très longue.

Kabila a choisi de faire dans le dilatoire pour s’accrocher au pouvoir

En effet, l’attente de ce successeur risque de s’apparenter à celle de Godot de Samuel Beckett. Il ne va jamais arriver. Car, tout indique que Kabila n’est pas disposé à organiser un scrutin présidentiel au Congo pour permettre à ses concitoyens de choisir l’homme ou la femme qui va le remplacer. Et, comme un naufragé qui s’accroche à tout par instinct de survie, il invoque des problèmes logistiques et budgétaires pour justifier l’incapacité de l’Etat à tenir la présidentielle dans les délais légaux. Tous les démocrates du monde se rendront vite compte du caractère spécieux de ces arguments pour deux raisons essentielles. D’abord, la date de la présidentielle de 2016 était connue de tous au Congo depuis fort longtemps. De ce fait, la CENI (Commission électorale nationale indépendante) a eu tout le temps qu’il lui fallait pour l’organisation matérielle du scrutin. Si elle a traîné les pieds au point qu’aujourd’hui elle en arrive à s’abriter derrière le temps pour repousser l’échéance, l’on peut dire que c’est à dessein. Ce faisant, elle a joué sa partition dans le complot ourdi par Kabila et son clan contre la démocratie. Ensuite, quand on connaît les immenses richesses du Congo, l’on peut aisément imaginer que l’argument de l’insuffisance budgétaire avancée ne tient pas la route. Et même si, par extraordinaire, cet argument se vérifiait, la communauté internationale aurait certainement mis la main à la poche pour enlever cette épine du pied de la RDC. De par le passé, elle l’avait fait et l’on sait que pour la normalisation de ce pays, la communauté internationale a levé le contingent le plus coûteux de son histoire. De ce qui précède, il est manifeste que Kabila a choisi de faire dans le dilatoire pour s’accrocher au pouvoir. La vérité est qu’il n’est pas venu au pouvoir en 2001 avec l’idée de quitter les affaires un jour. Et à cet effet, il avait pris le soin d’écrire une Constitution truffée d’articles équivoques auxquels il peut recourir aujourd’hui en cas de besoin pour fausser le jeu démocratique. L’article 70, alinéa 2, est l’un d’eux. Et pour parfaire le crime en gestation depuis la date à laquelle, par dévolution monarchique, il a hérité du pouvoir, il a mis en place des institutions fantoches dont la vocation est de l’accompagner à coups d’arguments juridiques dans sa volonté de régner à vie sur le Congo. C’est ce que vient de réussir avec brio, la Cour constitutionnelle congolaise avec à sa tête Benoit Luamba Bindu. Celui-ci, en serviteur dévoué du prince régnant, s’en est tenu à la lettre de l’article 70 de la Constitution pour examiner la saisine des élus de la majorité lui demandant de statuer sur le sort de son maître au cas où l’élection présidentielle ne se tiendrait pas cette année. Ce faisant, il feint d’oublier ce principe général de droit selon lequel nul ne doit se prévaloir de ses propres turpitudes.

Il n’y a qu’au Gondwana que l’on peut observer ce genre de scénario ubuesque

Dans le cas d’espèce, tout le monde sait que le problème du Congo a un nom : Joseph Kabila. C’est lui qui manœuvre   méthodiquement pour installer confortablement le Congo dans la crise institutionnelle à l’effet de prolonger son mandat. Et comme il sait que tant qu’il n’y aura pas de président élu, il gardera son poste, la solution est toute trouvée pour maintenir le statu quo. Utiliser tous les moyens pour que le scrutin de 2016 s’éloigne chaque jour davantage. Décidément, il n’y a qu’au Gondwana que l’on peut observer ce genre de scénario ubuesque. Il se pose alors la question de savoir si le peuple congolais va accepter d’avaler une telle couleuvre. Déjà, l’opposition, même si en son sein l’on peut noter quelques divergences, a qualifié la décision de la Cour constitutionnelle d’acte de « haute trahison ». De ce point de vue, l’on pourrait s’attendre à ce que la RDC soit promise aux cris et aux larmes. En effet, en l’absence de toute possibilité de réaliser l’alternance par les urnes, les Congolais pourraient être tentés de la réaliser par d’autres moyens. C’est ce que Kabila père avait fait en contraignant «le Roi du Zaïre» de l’époque, Mobutu Sessé Seko, à fuir en plein jour son palais de marbre de Kinshasa. Mais comme les dictateurs sont têtus et amnésiques, Kabila fils pourrait être tenté, au cas où les Congolais choisiraient de défier sa dictature, d’opter pour la répression tous azimuts, marchant sadiquement sur les cadavres de bien des Congolais. Assurément, la décision de la Cour constitutionnelle congolaise est mortifère. En tout état de cause, devant l’histoire, elle porterait avec Kabila, l’entière responsabilité de cette méga-tragédie qui se profile à l’horizon. Et l’histoire, parfois, réserve aux dictateurs même les plus accomplis, des surprises.

 

« Le Pays »


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