DIALOGUE INTERMALIEN Les acteurs se multiplient et la situation se complexifie
Avec qui Bamako va-t-il dialoguer pour une sortie de crise au Nord-Mali ? Où et sous l’égide de quel médiateur se mèneront les négociations avec les groupes armés ? Ce sont là des questions que doit se poser le président malien, Ibrahim Boubacar Kéita (IBK), tant les acteurs se multiplient.
On ne sait plus qui sera l’interlocuteur de Bamako
En effet, il n’y a pas longtemps, trois groupes armés, à savoir le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), le Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA) et le Mouvement arabe de l’Azawad (MAA) signaient une plateforme commune, appelant les autres mouvements à les rejoindre en vue d’un dialogue prochain avec les autorités de Bamako. On se doutait que cet appel ne serait pas entendu, puisque, quelques jours seulement après cette déclaration, un autre regroupement vient de donner de la voix, compliquant davantage la situation. Il s’agit de la Coalition pour le peuple de l’Azawad (CPA), un regroupement des mouvements d’autodéfense sédentaires de la région de Gao et une frange du MAA, qui viennent, à leur tour, de signer une plateforme préliminaire dans la perspective d’un dialogue avec Bamako sur la crise au Nord-Mali. De quoi brouiller toute lisibilité et toute visibilité puisqu’on ne sait plus désormais qui sera l’interlocuteur de Bamako. A chaque fois que l’on croit avoir aplani les difficultés, surgit une nouvelle paire de manches qui rend impossible tout début de dialogue. Ce qui fait dire à certains analystes que les négociations entre Bamako et les groupes armés sont bien parties pour s’inscrire dans la durée. Car, tout accord qui sera signé et qui ne prendra pas en compte les desiderata de tous les différents groupes armés qui poussent comme des champignons, sera voué à l’échec ; chacun disposant d’une capacité de nuisance insoupçonnable et insoupçonnée.
Tous s’accordent sur la nécessité de négocier
Or, tout se passe comme si Bamako, dans le souci d’affaiblir les irrédentistes du Nord-Mali, fait feu de tout bois pour semer la confusion au sein des différents groupes armés, oubliant qu’il se complique du même coup la tâche. De fait, il est plus indiqué pour Bamako d’avoir un seul interlocuteur en face que d’en avoir plusieurs avec des intérêts sans doute divergents. Du reste, on se demande même sur quoi va porter ce fameux dialogue tant attendu, si chaque regroupement vient à la table avec sa plateforme à lui. A vrai dire, le chemin de la réconciliation au Mali risque d’être long, tant il est escarpé et semé d’embûches. Car, à la foultitude d’interlocuteurs s’ajoute une ribambelle de médiateurs qui, loin d’être un atout, peut constituer un véritable goulot d’étranglement pour une sortie de crise au Nord-Mali. En effet, après avoir mis le Burkina sur le banc de touche du fait de ses accointances avec les rebelles du MNLA, IBK s’est tourné vers l’Algérie et le Maroc qui, pourtant, entretiennent une rivalité historique à nulle autre pareille née du problème du Sahara occidental. Voyant les choses piétiner, l’ONU elle-même est entrée dans la danse si fait qu’aujourd’hui, il est difficile de dire qui chapeautera les négociations entre frères maliens. Pourtant, tous s’accordent sur la nécessité de négocier en vue d’une sortie de crise durable. En tout cas, il faudra tout faire pour que ce problème qui n’a que trop duré, puisse enfin trouver une solution qui satisfasse les différents acteurs au risque de créer des frustrations qui pourraient à court, moyen ou long terme, réveiller les vieux démons.
Boundi OUOBA