ELARGISSEMENT DE L’IUTS AUX INDEMNITES DES FONCTIONNAIRES:La justice sociale d’accord mais …
En ce début d’année au pays des Hommes intègres, le thermomètre social menace de se casser en raison de la volonté annoncée du gouvernement d’appliquer les dispositions de la loi de finances 2020, relatives à l’élargissement de l’IUTS à certaines indemnités servies aux agents de l’Etat, en l’occurrence les indemnités de logement, de fonction et de transport. L’Exécutif explique sa décision principalement par un souci de justice sociale. En effet, l’IUTS était déjà appliqué aux indemnités des travailleurs du secteur privé alors que les fonctionnaires en étaient exemptés. Le gouvernement de Christophe Joseph Marie Dabiré a décidé de mettre fin à cette exception fiscale en ramenant tout le monde sur le même pied. Mais derrière cet argument de justice sociale, l’on peut lire en filigrane l’ambition gouvernementale d’accroître ses recettes au service du développement et surtout de limiter la masse salariale des fonctionnaires jugée à tort ou à raison très lourde au point de plomber les dépenses d’investissements.
Mais ces arguments avoués ou pas, ne semblent pas convaincre le monde des travailleurs qui les balayent du revers de la main. En effet, pour la plupart des organisations syndicales, l’élargissement de l’IUTS qui, historiquement, était déjà un impôt exceptionnel, n’est qu’un moyen de réduction des salaires des agents de l’Etat dont le pouvoir d’achat est déjà plombé par de nombreuses taxes. Du reste, estiment-elles, il existe de nombreuses niches fiscales où le gouvernement peut puiser pour augmenter ses ressources. Mieux, elles pensent que ce n’est pas la mobilisation des recettes qui pose problème, mais plus leur gestion.
Il est encore temps de renouer le fil du dialogue entre gouvernement et syndicats pour trouver des solutions consensuelles
Mais que l’on se parle franchement. Si le gouvernement est dans son rôle en cherchant à accroître ses capacités de mobilisation des ressources, il ne doit pas perdre de vue que l’augmentation de la pression fiscale sur les contribuables, finira nécessairement par les asphyxier et tuer ainsi la poule aux œufs d’or. Pire, au moment où le Chef de l’Etat lui-même appelle les Burkinabè à une trêve sociale, les travailleurs comprennent difficilement que lui-même et son gouvernement déterrent cette nouvelle hache de guerre avec le monde des travailleurs et surtout dans ce contexte de lutte contre l’insécurité, où la Nation doit présenter un front uni contre l’adversaire. Point n’est besoin d’être un fin stratège militaire pour savoir qu’en multipliant les fronts au même moment, les risques d’une déflagration sont des plus grands. Et enfin, politiquement, c’est faire dans la myopie que de prendre des mesures aussi impopulaires à l’orée d’une année électorale.
En attendant de savoir de quoi sera faite la météo sociale dont les prévisions s’annoncent déjà orageuses, il est encore temps de renouer le fil du dialogue entre gouvernement et syndicats pour trouver des solutions consensuelles. Et il est de la responsabilité du gouvernement de minimiser les tensions sociales en pensant surtout aux couches les plus vulnérables. « Quand les éléphants se battent, dit le proverbe, c’est l’herbe qui en pâtit ». Les populations ont tellement souffert des affres des mouvements sociaux qui sont venus s’ajouter aux indicibles souffrances nées des attaques terroristes, qu’il faut leur éviter un nouveau martyre.
Sidzabda