GUERRE DES CHEFS AU CDP : « Je ne suis pas candidat à la présidence du parti», dixit Léonce Koné, président de la commission ad hoc
Suite à la sortie de certains militants ou sympathisants du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), ex-parti au pouvoir, le mardi 13 février dernier qui ont demandé la démission du président par intérim, Achille Tapsoba, et celui de la commission ad hoc, Léonce Koné, pour faire place à Eddie Komboïgo, nous sommes allés à la rencontre de l’un des deux mis en cause (Léonce Koné) pour mieux comprendre la situation qui prévaut au sein de la formation politique de l’ancien président Blaise Compaoré.
Le Pays : Comment se porte le CDP ?
Léonce Koné (L.K): Le CDP se porte aussi bien que possible, vu les difficultés qu’il a traversées. Les structures de base qui constituent l’âme du parti sont en voie de consolidation. Les militants sont motivés pour contribuer activement au redressement de leur parti. Donc, les choses évoluent dans le bon sens.
Pourtant, des jeunes du parti ont, au cours d’une rencontre au siège du CDP, le mardi 13 février, demandé à vous et Achille Tapsoba de respecter les textes en laissant la place à Eddie Komboïgo. Comment réagissez-vous ?
Si vous avez observé ce qui s’est passé au siège du CDP ce jour-là, il y avait également d’autres jeunes du parti, en plus grand nombre, qui exprimaient une position différente, avec la même véhémence. Dans un parti politique, il est normal qu’il y ait des divergences d’opinion et des rivalités concernant le choix de ses dirigeants. Les textes du CDP donnent à ses instances la compétence de prendre les mesures appropriées pour assurer son bon fonctionnement dans l’intervalle des congrès, en fonction des circonstances que traverse le parti. Je suis soulagé que les manifestations qui se sont produites n’aient pas dégénéré en une confrontation violente entre des groupes qui se réclament du parti. Il faut absolument éviter cela. C’est la recommandation constante et ferme que la direction du parti et en particulier Achille Tapsoba qui est le président par intérim, ont adressée aux militants concernés.
Pour le reste, il faut faire confiance aux instances du parti, à savoir le Bureau exécutif, le Bureau politique, pour régler ces contradictions dans le calme, en privilégiant la cohésion et l’intérêt supérieur de notre formation. Le CDP a une longue tradition de respect de ses textes et des décisions de ses instances, même dans les situations qui peuvent paraître conflictuelles. Il a aussi une tradition de discipline à l’égard des décisions de ses instances, une fois que celles-ci ont été prises, après que tous les points de vue se soient librement exprimés. Il a enfin une tradition de tolérance et de respect mutuel.
Cela ne présage-t-il pas d’un congrès houleux prévu pour se tenir le mois prochain ?
Je ne sais pas ce que sera le climat du prochain congrès. Je souhaite évidemment qu’il se déroule dans un climat de camaraderie militante, d’unité et de cohésion. Je souhaite également que les militants puissent s’exprimer librement, afin que le Congrès, comme c’est sa vocation, définisse les orientations et l’organisation du parti pour les prochaines années qui comportent un calendrier politique important, avec la perspective des élections de 2020. Le parti devra affronter des défis politiques autrement plus cruciaux que le choix de ses dirigeants. Dans un contexte comme celui que nous connaissons, je crois d’ailleurs que la sagesse commande de renforcer la collégialité de la direction du parti. En tout état de cause, nous devons tous travailler à donner à notre parti une direction unie, cohérente, dévouée à ses intérêts.
Serez-vous candidat à la présidence du parti ?
Non, je ne suis pas candidat à la présidence du parti.
Comment entrevoyez-vous l’avenir du CDP ?
Je suis résolument optimiste quant à l’avenir du CDP. Notre parti est solidement implanté sur le territoire national. Il comprend un grand nombre de cadres de grande valeur et des militants engagés. Ses structures territoriales ont été renouvelées. Même l’adversité que le parti a traversée et continue de subir parfois, s’avère finalement bénéfique. Cela a renforcé la conscience militante de ceux de nos membres qui n’ont pas déserté le parti aux heures difficiles. Donc, malgré les turbulences qui sont inévitables dans la vie d’une grande formation, j’ai tout lieu de penser que nous irons de l’avant dans la consolidation du CDP comme l’une des principales forces politique du Burkina. Nous en avons largement le potentiel. Il faut travailler à traduire cette vocation dans la réalité. Cela exige des efforts et du dépassement de la part de tous.
Propos recueillis par Françoise DEMBELE
Antonio
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Le drame de la politique au Burkina comme dans beaucoup de pays africains, c’est que les gens se laissent influencer par des apparences trompeuses sans comprendre le fond des problèmes politiques. La crise de leadership qui agite le CDP (ex parti au pouvoir) est la résultante de la guerre latente de succession qui était menée au sein de ce parti par ceux qui se considéraient comme des dauphins légitimes de l’ex président Blaise Compaoré. Le pouvoir Compaoré a réellement commencé à vaciller avec les mutineries de 2011.Depuis lors, le général Gilbert Diendéré visait le fauteuil présidentiel. Mais Blaise Compaoré n’a pas osé l’affronter ouvertement. On s’est contenté d’arrangements hypocrites pour remplacer le proche de Gilbert, en l’occurrence le général Dominique Diendjéré, alors chef d’Etat-major général des armées et l’affecter comme ambassadeur. On a préféré sanctionner et licencier des policiers et autres mutins, en ménageant leurs chefs. Quand la crise s’aggravait progressivement les années suivantes et que Blaise Compaoré a senti que le pouvoir était en train de lui échapper, il a déclaré par voie de presse, qu’il y a des gens qui veulent prendre le pouvoir par la force, sans citer nommément des individus précis. Depuis lors, la confiance s’est détériorée entre Blaise Compaoré et Gilbert Diendéré, son chef de l’état-major particulier de la présidence du Faso. Il est évident aujourd’hui que Blaise Compaoré ne souhaite pas voir le clan du général Diendéré aux commandes du CDP. Eddie Komboîgo est un pur produit du clan Diendéré. Il y avait aussi une forte rivalité entre les deux généraux Gilbert Diendéré et Djibril Bassolé, car chacun d’eux espérait être le dauphin choisi du président. Blaise Compaoré, qui tentait de se rapprocher de Bassolé, était pris entre deux feux. Suite à l’insurrection de 2014 , ces 2 généraux, entre autres, ont été considérés par le Président Compaoré comme des gens qui l’ont trahi. Par conséquent, il n’est pas de doute que si Blaise Compaoré s’intéresse toujours à son parti CDP,il préfère le voir conduire par des hommes de confiance, loin des hommes de tenue qui auraient comploté contre lui. Vous voyez l’attitude du général Diendéré, qui vise une stratégie de noyer tout le monde dans son putsch de 2015, en insinuant que l’argent est venu de la Côte d’Ivoire pour soutenir le coup de force. Deviner qu’il veut noyer Blaise Compaoré et Alassane Ouattara, pour espérer échapper au procès, à défaut de juger tout le monde avec lui. Quelle félonie ! Curieusement, il n’accuse pas son épouse impulsive Fatou, qui ne cachait pas son rêve d’être Première Dame du Faso.
15 février 2018Sacksida
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D’abord, dans cette guerre des chefs au CDP, il faut de façon indépendante et lucide dire la vérité à certains militants ignorants des principes organisationnels élémentaires. Car dans tout parti politique organisé et respectable ce sont les textes fondamentaux en vigueur, les instances habilités et leurs décisions légales qui fondent sa cohésion, son unité et sa force d’influence. Par conséquent, les organes et les dirigeants intérimaires actuels du CDP ont la légalité mais la légitimité requise en principe pour conduire ce parti politique jusqu’à son Congrès Ordinaire prochain. Et c’est cette instance suprême qui devra prendre de nouvelles décisions et désigner ses nouveaux dirigeants. Dans ces conditions, il n’est pas du tout conforme aux règles que ceux-là qui ont « fuient et désertés» leur parti politique sans crier gare, veuillent de manière manifestement « opportuniste » utiliser leurs moyens financiers pour s’imposer par des bizarreries à la tête du parti. De surcroit, on sait que certains hommes d’affaires sont venus au CDP pour fructifier leurs affaires et ils en ont effectivement engrangé des milliards de marchés publics. De là, à vouloir ériger la puissance financière et économique comme conditions premières pour diriger le parti CDP serait une déviation « ploutocratique » grave et indigeste. Non ! Un vrai parti politique, c’est d’abord des idées, une organisation sérieuse et ensuite viennent les moyens financiers. De plus, pourquoi ceux qui ne veulent pas respecter les normes du parti, ne créeraient-ils pas eux même leur propre parti et s’ils sont certains de leur influence politique ? En tout état de cause, si nous voulons que notre démocratie au Burkina Faso progresse de manière saine et dépouillée des « coups bas » et de « l’opportunisme » il est très important que nos partis politiques, renforcent leurs principes organisationnels démocratiques et désignent des responsables sérieux, plus combatifs et convaincants par leur comportement de militants politique sans équivoque.
16 février 2018