KOULBA SOMA À PROPOS DE LA DÉBÂCLE DU MPP À BANFORA : « Nous avons beaucoup travaillé pour finir par servir un autre parti »
Malgré sa supériorité en nombre d’élus au sein du Conseil municipal de Banfora, le MPP n’est pas parvenu à faire élire son candidat au poste de maire. Le parti ne se contente que du poste de 1er adjoint au maire, de la présidence de la commission de l’aménagement du territoire et du foncier et d’un poste de conseiller régional qu’il ne veut pas reconnaître puisque remporté par N’Gollo Drissa Ouattara à qui on reproche de l’indiscipline. Quelques heures après cette débâcle, le SG de la section provinciale du parti, Koulba Soma, revient sur les raisons qui ont conduit à une telle situation. Tout en annonçant que le parti ne soutiendra pas N’Gollo Drissa Ouattara dans sa conquête annoncée de la présidence du Conseil régional, il estime qu’il est possible d’éviter le blocage de l’exécutif communal de Banfora.
« Le Pays » : Vous venez de procéder à la mise en place des organes de l’exécutif communal, quels sont les postes que votre parti a pu obtenir ?
Koulba Soma : Nous avons obtenu le poste de premier adjoint au maire et la présidence de la commission de l’aménagement du territoire et du foncier.
Vous ne citez pas le Conseil régional où votre parti a pourtant obtenu un siège ?
Non, au Conseil régional nous n’avons rien eu. Il faut dire que c’est nous-mêmes qui n’avons pas été honnêtes entre nous au MPP.
Pourtant N’Gollo Drissa Ouattara a été désigné lors des votes pour y siéger.
Justement, N’Gollo Drissa Ouattara avait prévenu que si un de nos éléments dont je préfère taire le nom se présentait à ce poste, il allait lui aussi se présenter, parce que l’élément en question a joué contre lui. C’est l’élément lui-même qui nous a expliqué cela. Alors que le matin du 20 juin, jour du vote du maire, l’élément en question et moi, nous nous sommes mis d’accord que ce serait moi le candidat du parti pour le Conseil régional. Malheureusement comme on s’était entendu sur une sorte de fusion avec le NTD, les votes étaient devenus mécaniques et le groupe MPP-NTD gagnait automatiquement tous les postes. Voyant cela, l’élément a changé d’avis et a commencé à dire autre chose. Il a dit qu’il veut lui aussi être candidat du MPP. Personnellement, je savais qu’avec la menace de N’Gollo, nous allions tous foirer et c’est ce qui s’est passé. Dès que l’élément a annoncé sa candidature, N’Gollo Drissa Ouattara s’est également présenté mais à la dernière minute et il a remporté le siège. Voilà comment nous avons perdu ce poste de conseiller régional.
Vous parlez de N’Gollo Drissa Ouattara comme si vous ne le comptez plus parmi vos militants.
Mais jusqu’à preuve du contraire, s’il n’est pas exclu du parti, il est toujours militants avec les autres membres de son groupe.
Mais tout à l’heure vous n’avez pas cité son poste au Conseil régional lorsque vous répondiez à la question de savoir combien de postes votre parti politique a obtenu lors de la désignation du maire !
Vous savez que le parti avait pris des dispositions contre N’Gollo. Mais comme je le dis, jusqu’à preuve du contraire, il est militant MPP, on peut dire de ce point de vue que son poste, c’est le parti qui l’a obtenu. Si vous voulez, on a eu un poste au Conseil régional.
Alors, quelle appréciation faites-vous des résultats de votre parti lors de l’élection du maire?
Vraiment, nous avons fait beaucoup d’efforts, on a beaucoup travaillé pour servir un autre parti quand bien même ce parti est notre allié. C’est vrai cela nous fait mal mais, on peut dire que c’est le moindre mal. Sinon si l’autre groupe prenait le poste de maire, les conséquences seraient imprévisibles sur le plan social et on courrait des risques sur le plan juridique.
Etes-vous d’accord avec ceux qui disent que le MPP à Banfora a été victime du manque de cohésion et de discipline en son sein ?
C’est vrai que nous avons manqué de cohésion. Ce manque de cohésion a causé l’indiscipline. Vous avez tous constaté à l’époque la venue fracassante et subite de N’Gollo Drissa Ouattara au MPP, juste au moment où on devait constituer les candidatures pour l’élection municipale. Nous autres avons tout entrepris pour vraiment lui demander de s’abstenir, mais nous n’avons pas été écoutés. Je dois même dire que son obstination nous inquiétait. Aujourd’hui nous avons payé cela cash, et nous nous sommes retrouvés divisés et affaiblis. On n’a jamais pu réussir à raisonner l’élément mais nous n’avons jamais non plus pensé à composer avec lui. Et voilà les conséquences. Comme je l’ai dit, stratégiquement il avait réussi son coup par des méthodes dont il est le seul maître, à savoir la corruption, l’achat de conscience. Il a pu ainsi contrôler une bonne partie de nos élus, nous mettant automatiquement en position de faiblesse face à notre allié. Fort heureusement nous avons vite pris conscience de cela et nous avons laissé notre allié prendre les devants. Sinon ce serait la catastrophe et comme je l’ai dit plus haut, sur le plan social, les choses seraient dures pour le MPP.
Certaines langues soutiennent que l’un des leaders du parti, à savoir Bissiri Sirima y est pour beaucoup dans la débâcle du parti. Il aurait promis la mairie à plusieurs d’entre vous. Qu’en dites-vous ?
Vous savez, lorsque les gens sont en difficulté, ils trouvent toujours un bouc émissaire. C’est vrai que lorsque nous avons abordé la question des candidatures à un moment donné, Bissiri Joseph Sirima a incité la candidature de certains cadres. Mais que ces gens disent qu’il leur a promis à chacun d’eux la mairie, je dis que c’est faux. Est-ce que c’est Bissiri qui vote le maire ? Non ! Ce sont les conseillers qui votent et il n’en est pas un. Ce qui fait que j’émets des doutes sur ce que disent ces gens. Autrement, ce sont ceux qui tiennent pareil langage qui ne comprennent pas le processus de la mise en œuvre des organes de la mairie. A la place de Bissiri, je serais déçu en apprenant de telles incompréhensions.
Dites-nous, SG, trouvez-vous normal que le NTD aie brigué la mairie alors que les accords qui le lient au MPP au plan national l’en empêchaient ?
Ici je dois dire qu’on n’avait pas le choix. Si on avait tenu coûte que coûte à respecter cet accord, ce serait le chao. Il faut savoir que le NTD a pendant longtemps attendu notre candidat à la mairie, tant il nous a été difficile de dégager le consensus autour de quelqu’un. Banalement la désignation de notre candidat nous a pris énormément du temps, exactement deux semaines. Mais nous avons omis durant ce temps d’engager parallèlement les pourparlers avec notre allié. Personnellement je l’avais fait en tant que SG du parti. Mais les camarades se sont basés sur la convention pour dire que quel que soit le temps que nous prendrions, l’allié allait attendre. Pire, nous avons été tellement gourmands, que nous leur avions refusé le poste de premier adjoint qu’ils ont demandé. Il en était de même à Niangoloko où nos camarades se sont reparti les postes sans tenir compte du NTD. Pourtant, compte tenu de la division en notre sein à Banfora, nous étions en position de faiblesse et ils ne l’ont pas caché. Ils sont venus à mon domicile à deux jours du vote pour me présenter le candidat qu’ils ont choisi. A cette occasion, ils m’ont dit qu’ils nous ont beaucoup attendus et qu’il ne pouvait pas tout perdre au nom de la convention qui nous lie. Pour eux, ne pas présenter de candidat revenait à laisser l’autre groupe du MPP prendre la mairie et cela serait dommage.
A présent, Aboubakar Héma est le maire. Etes-vous confiant quant à la longévité de son mandat ? N’y a-t-il pas des risques de blocage ?
Dans tous les cas lorsque vous mettez un exécutif communal en place de la sorte, vous ne pouvez pas être sûr à 100% que ce sera fluide. Je crois qu’il faut rapidement chercher la cohésion et annihiler toute velléité de blocage. Le tout nouveau et jeune maire me donne de l’assurance et la présence à ses côtés de notre doyen Fulgence Koné en tant que premier adjoint me réconforte. Il ne nous reste plus qu’à tout mettre en œuvre pour maîtriser le groupe de N’Gollo Drissa Ouattara et c’est ce à quoi nous allons nous employer dès maintenant. Pour moi, la mésentente est désormais finie au MPP et il faut cette cohésion pour éviter le blocage du Conseil municipal.
N’Gollo Drissa Ouattara est élu conseiller régional et il nous revient qu’il briguera la présidence de cet organe. Allez-vous le soutenir pour cela ?
Vous avez eu le temps de le connaître au cours de ce processus électoral. Que le parti le soutienne dans cette aventure, ce n’est pas évident. Je dirai même que non parce qu’il n’a pas respecté les instructions du parti et je crains que le bras de fer entre lui et nous ne continue jusqu’à ce niveau du Conseil régional. Dans tous les cas, le MPP est majoritaire en termes de conseillers régionaux et je ne crois pas que les nôtres vont se laisser corrompre.
Propos recueillis par Mamoudou TRAORE
