HomeA la uneLUTTE CONTRE BOKO HARAM : L’UA veut-elle enfin s’assumer ?

LUTTE CONTRE BOKO HARAM : L’UA veut-elle enfin s’assumer ?


Mieux vaut tard que jamais. C’est le moins que l’on puisse dire, au regard du ton utilisé par la présidente de la Commission de l’Union africaine, Nkosazana Dlamini-Zuma, lors du conseil des ministres de l’institution panafricaine tenu le 26 janvier 2015 à Addis Abéba, en prélude au sommet des chefs d’Etat et de gouvernement prévu pour les 30 et 31 janvier prochains. En effet, Dlamini-Zuma a souhaité la mise en place d’une force d’intervention multinationale et la création d’un fonds spécial pour lutter contre Boko Haram. Comment ne pas se réjouir d’une telle sortie, quand on sait que c’est la première fois que l’institution continentale donne de la voix sur les exactions des islamistes de Boko Haram ? Longtemps accusée d’inertie, l’UA semble décidée à déclarer la guerre à Boko Haram. Ce qui est d’autant plus heureux, car le Nigeria lui-même se réveille de plus en plus. La preuve, deux jours seulement après la libération des 192 otages dans l’Etat du Yobé, au nord-est du Nigeria, Boko Haram a encore frappé dans l’Etat de Borno, en attaquant simultanément la ville de Maiduguri et le village de Monguno. Mais, pour cette fois, l’armée nigériane s’est refusée  toute inertie. Elle a sorti l’artillerie lourde, en combinant attaque terrestre et aérienne pour chasser les islamistes de Maiduguri. Boko Haram, n’ayant pas le choix, a dû se replier sur la base militaire de Monguno. Repousser les islamistes hors de la capitale de l’Etat du Borno est certainement un pas de gagné. Mais, la question que l’on est tenté de se poser est celle de savoir pourquoi les autorités nigérianes en général, et l’armée en particulier, ont-elles attendu tout ce temps avant de mener pareilles offensives contre la secte islamiste ? Les motifs de ce réveil sont à rechercher certainement dans la récente évolution de la situation sociopolitique au Nigeria, notamment la campagne pour la présidentielle à venir, l’intervention des forces tchadiennes sur le front camerounais, qui, quoi qu’on dise,  gêne aux entournures le président nigérian, et l’intérêt de plus en plus manifeste des Etats-Unis pour le problème nigérian.

L’intervention du Tchad aux côtés du Cameroun contraint le Nigeria à sortir de sa  torpeur

En effet, la présidentielle nigériane se tiendra le 14 février prochain et Goodluck Jonathan, candidat à sa propre succession, joue son va-tout pour rester au pouvoir. Pour cela, il ne saurait ignorer l’électorat du Nord du pays où, pour l’instant, la plus grande aspiration des populations est de vivre en paix. Et cela, le président nigérian semble l’avoir compris, à l’issue de la dernière visite qu’il a effectuée dans la zone.  Alors, on peut se poser la question de savoir si Goodluck Jonathan, à travers cette offensive,  cherche enfin à s’assumer ou si c’est un geste purement électoraliste. La deuxième hypothèse semble plus plausible, quand on sait que pendant longtemps, l’armée nigériane n’a fait que s’illustrer par sa couardise, son inaction, laissant les populations du septentrion nigérian souffrir le martyre. A la faveur de la présidentielle, Goodluck semble avoir opté pour la stratégie  : « Votez-moi et je vous débarrasserai de Boko Haram ». Tout porte donc à croire que l’offensive menée par l’armée nigériane à Maiduguri pour soustraire les populations des griffes de la secte islamiste, n’est ni plus ni moins qu’une opération de séduction, dans la perspective de la présidentielle à venir.

L’intervention du Tchad aux côtés du Cameroun pour barrer la route à Boko Haram, contraint le Nigeria à sortir de sa  torpeur. Acculé sur le front camerounais avec le renfort apporté par les forces tchadiennes, Boko Haram va très probablement multiplier ses exactions en territoire nigérian. Mais, gare !

 Par ailleurs, les attaques de Boko Haram, le dimanche dernier, sont intervenues pendant que le Secrétaire d’Etat américain, John Kerry, effectuait une visite dans la capitale nigériane, à Abuja. Sans doute le président nigérian a-t-il pris toute la mesure du péril qui guette son pays à travers la secte islamiste.  Tant et si bien qu’il semble avoir décidé d’employer les grands moyens pour repousser Boko Haram.

Gageons que l’engagement de l’armée nigériane se poursuivra dans cette lutte contre Boko Haram. Si cet engagement est maintenu sur tous les deux fronts (Cameroun-Nigeria), l’on pourra dire, enfin, que les jours de la secte islamiste sont comptés.

Adama SIGUE


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