HomeA la uneLUTTE CONTRE L’INSECURITE ALIMENTAIRE AU BURKINA : Au-delà de la réponse conjoncturelle !

LUTTE CONTRE L’INSECURITE ALIMENTAIRE AU BURKINA : Au-delà de la réponse conjoncturelle !


C’est connu. Les pays du Sahel en général et le Burkina en particulier, sont en proie à l’insécurité alimentaire. Bien des organisations internationales, dont l’ONU (Organisation des Nations unies) ont déjà alerté sur le sujet. Le gouvernement burkinabè, conscient du problème, se prépare pour y faire face. En effet, le Conseil des ministres du 18 mai dernier a adopté un rapport relatif au plan de réponse et de soutien aux populations vulnérables à l’insécurité alimentaire et à la malnutrition de 2022 (PRSPV-2022). Le coût global de ce plan est estimé à plus de 200 milliards de nos francs. Le financement sera assuré par l’Etat burkinabè, les partenaires techniques et financiers et les collectivités. Une preuve supplémentaire que le sujet est capital et pressant pour les autorités, c’est que le ministère en charge de l’agriculture y a réfléchi à l’occasion de la première session ordinaire du Conseil d’administration du secteur ministériel (CASEM) de l’année. C’était le 19 mai dernier à Ouagadougou. Le patron du département, Innocent Kiba, a fait savoir, à l’issue de la cérémonie d’ouverture dudit CASEM, que 156 milliards de F CFA ont déjà été mobilisés par le gouvernement et ses partenaires pour faire face à l’insécurité alimentaire. Par ailleurs, le ministre a laissé entendre ceci : «  Il y a encore un gap d’environ 80 milliards de F CFA à combler, mais il y a une stratégie de mobilisation des ressources qui a été mise en place… ». L’on peut saluer le gouvernement et les partenaires techniques et financiers, pour l’effort consenti pour sauver des millions de Burkinabè en proie aujourd’hui à une situation de stress alimentaire prononcé. Le bilan de la campagne agricole 2021-2022, fait à l’occasion du CASEM, permet de se rendre compte de l’envergure et du caractère ultra-préoccupant de l’insécurité alimentaire à laquelle est confronté le pays : un déficit brut de 539 364 tonnes de céréales représentant 12% des besoins de la population.

 

 

Il faut mettre en place des projets ambitieux et structurants

 

 

Il faut ajouter à cela, une réduction des superficies cultivables de près de 400 000 hectares et une situation sécuritaire délétère, qui a contraint nos braves paysans à déserter champs et hameaux de culture, pour se retrouver dans les villes où la faim les côtoie chaque jour que Dieu fait. Dès lors, la grande question qui se pose au Burkina est, foi du ministre Kiba, de savoir comment se rapprocher des producteurs pour faire face « aux défis de la campagne agricole qui s’annonce et produire assez de nourriture » pour remédier à la situation alimentaire difficile. La solution qui consiste à distribuer des kits alimentaires aux populations en proie à l’insécurité alimentaire, est loin d’être la bonne. Car, elle est conjoncturelle. Malheureusement, cette approche semble privilégiée dans notre pays. L’effet induit de cela, est  qu’elle développe chez les populations bénéficiaires, le réflexe de l’assistanat. Certes, pour éviter que les populations affectées meurent de faim, comme c’est le cas aujourd’hui dans certaines  localités du pays, la distribution de vivres s’avère indispensable. Mais, il faut, dans le même temps, mettre en place des projets ambitieux et structurants, susceptibles de résoudre dans la durée, la question de l’insécurité alimentaire. Et à la réalisation de ce genre de projets, il faut absolument mettre à contribution les populations en détresse alimentaire. La formule « travail contre nourriture », peut leur être appliquée. En plus de cette compensation, on peut juste leur allouer un pécule, de sorte à leur permettre de faire face à quelques besoins élémentaires. Procédant de cette façon, non seulement on résout leur problème alimentaire, mais aussi on les soustrait à la mendicité. En outre, cette manière de faire peut réduire de manière significative, le coût des investissements structurants destinés à régler la problématique de l’insécurité alimentaire de façon pérenne. La construction de retenues d’eau, exploitables en toute saison, fait partie de ces investissements structurants. Que l’on ne vienne surtout pas objecter contre cette suggestion en disant : le Burkina n’a pas les moyens pour réaliser ces investissements structurants. Le Burkina en a bel et bien les moyens. Seulement, c’est la volonté politique et la vision qui lui font défaut, pour que ce genre d’ambitions puissent se traduire en réalité. En tout cas, il ne faut pas compter exclusivement sur la générosité des partenaires techniques et financiers pour résoudre, de façon efficace, les problèmes récurrents de faim des Burkinabè. Car, les aides que certains d’entre eux apportent aux populations ne sont pas de nature à conduire le pays à se passer de l’aide, pour reprendre la formule de Thomas Sankara, selon laquelle «  l’aide doit aider à assassiner l’aide ». Pour revenir aux 156 milliards de F CFA déjà mobilisés pour faire face à l’insécurité alimentaire, on peut prendre le risque de dire que cette cagnotte suffit pour réaliser de grands projets afin de traquer la faim au Burkina. Mais, à condition qu’elle ne serve pas en partie à distribuer des per-diems alléchants aux bureaucrates tapis dans les salons climatisés du ministère en charge de l’Agriculture. Pourvu également qu’elle ne soit pas détournée pour édifier des bunkers, pour des fonctionnaires indélicats. En tout cas, pour résoudre de manière définitive l’insécurité alimentaire, il ne faut pas s’arrêter à la riposte conjoncturelle. Il faut aller au-delà, pour envisager des réponses hardies et structurelles. C’est à ce prix que l’on pourra passer de la sécurité alimentaire à la souveraineté alimentaire.

 

Sidzabda


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