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MAUVAISE REALISATION DES OUVRAGES PUBLICS  


Les entames des saisons pluvieuses constituent de grands moments de frayeur pour les populations au Burkina. En effet, l’on y assiste, ici et là, à des effondrements ou à de fortes dégradations d’ouvrages publics. Certains d’entre eux sont meurtriers. Le cas le plus récent est l’effondrement de bâtiment à l’école B de Dandé  dans la province du Houet suite à des intempéries. L’effondrement de ce bâtiment a occasionné 24 blessés dont 4 graves évacués à Bobo-Dioulasso. Un de ces évacués a malheureusement succombé à ses blessures. Le gouvernement a instruit le ministre en charge de l’éducation nationale, à prendre des mesures d’ordre administratif et éventuellement d’ordre judiciaire. L’on peut prendre le risque d’affirmer que cette réaction du Conseil des ministres a été dictée beaucoup plus par l’émotion que par la volonté du gouvernement de demander des comptes à l’entreprise qui a réalisé le bâtiment. Une fois l’émotion retombée, les entrepreneurs véreux ainsi que tous les acteurs qui ont quelque chose à se reprocher dans la mauvaise exécution des infrastructures publiques, reprendront du service. Car, ce qui les motive, c’est uniquement le gain facile.

 

Tous les ministères ont chacun son lot de travaux mal exécutés

 

 

Qu’un pauvre écolier de Dandé paie de sa vie leurs turpitudes, est le cadet de leurs soucis. Et Dandé n’est qu’un cas parmi tant d’autres. En effet, la règle générale est la mauvaise réalisation des infrastructures publiques. L’exception, c’est leur bonne exécution. Il sera très laborieux de faire, ici, le répertoire de toutes les défaillances qui ont été documentées relativement à l’exécution des ouvrages publics ; tant leur nombre est impressionnant. Et presque tous les ministères ont chacun son lot de travaux mal exécutés. Le ministère des Sports avec ses stades dont les pelouses à peine posées, cèdent à leur première utilisation ou encore dont les toits ne résistent pas au moindre vent. Le ministère de l’Education avec ses écoles nouvellement construites et qui s’effondrent comme des châteaux de cartes à la moindre intempérie. Le ministère des Infrastructures avec ses routes qui se dégradent avant même qu’elles ne soient réceptionnées et l’on en oublie. Bref, la marque déposée du Burkina sous Blaise Compaoré et sous Roch Marc Christian Kaboré, c’est la mauvaise exécution des ouvrages publics. Et c’est le lieu de rendre hommage aux médias grâce auxquels ces défaillances sont portées à la connaissance du public. L’on peut également être reconnaissant au contrôleur « naturel », c’est-à-dire le vent, la pluie et autres phénomènes naturels. Au moins, eux, ne sont pas corruptibles comme le sont bien des techniciens. En tout cas, les Burkinabè sont en droit de se poser la question suivante : que font les agents en charge du suivi et du contrôle des travaux de réalisation des ouvrages publics ? L’on peut prendre le risque de répondre par ceci : beaucoup d’entre eux roulent pour le compte des entrepreneurs qui ont mal exécuté les travaux. Et quand ces derniers leur mouillent la barbe, ils ne prennent même plus le temps de faire leur travail.

 

A tous les paliers du système, chaque acteur mange et s’engraisse

 

Dans certains cas, ces contrôleurs, dignes du Gondwana, se retrouvent avec « leurs bienfaiteurs » dans le maquis le plus proche pour arroser leur forfait autour de la bière, des brochettes en attendant de s’adonner avec joie au troisième b… En réalité, le phénomène des infrastructures publiques mal exécutées au Burkina, est un problème de système, si fait que ce n’est pas demain la veille que l’on pourra y mettre fin. Au sommet de ce système pourri, il y a les hommes politiques, notamment ceux qui sont aux affaires. Ces derniers mettent leur statut à contribution pour nouer avec les hommes d’affaires, des relations mafieuses. Aujourd’hui, la tendance est au système de prête-noms. Et le tour est joué. L’on peut aussi faire le constat que bien des hommes d’affaires sont à la tête de certains départements ministériels. Ce n’est pas mauvais en soi. Mais à condition qu’ils daignent se débarrasser, le temps qu’ils sont aux affaires, de leur casquette d’homme d’affaires. L’on peut se risquer à dire que certains ministres du gouvernement de Roch Kaboré n’ont pas pris cette précaution. De toute façon, ils n’ont rien à craindre, car l’enfant de Tuiré dans le Gangourgou, a la réputation d’être un homme trop bon avec ses amis et lent à la colère. Le milieu de ce système pourri est constitué de fonctionnaires qui officient dans les services de passation des marchés publics. A ce palier du système, on ne prend même plus le temps de se camoufler. Les magouilles se font à ciel ouvert. C’est à celui qui va prendre l’engagement de leur mouiller le plus la barbe, que l’on confiera le marché. Le reste n’est plus leur affaire. Résultat : il peut arriver que sur un marché public de 40 millions de F CFA, par exemple, ils engrangent 5 à 10 millions de F CFA en retour. C’est à prendre ou à laisser. De ce fait, l’entrepreneur qui a eu le marché, n’a pas d’autres solutions que de bâcler le travail. Et il le fera d’autant plus avec désinvolture qu’il sait que le contrôleur, à son tour, exigera sa part d’espèces sonnantes et trébuchantes pour déclarer le travail acceptable.  A la base de ce système pourri, se trouvent même des secrétaires, des agents de liaison et autres vigiles. Gare aux entrepreneurs qui ne seront pas généreux à leur égard. Car, ils ont une capacité de nuisance insoupçonnée. A tous les paliers du système, chaque acteur mange et s’engraisse. C’est pourquoi le système a la peau dure. Pour le déconstruire sérieusement, c’est le sommet qui doit montrer la voie. C’est malheureusement la chose la moins partagée en ce moment au Burkina Faso. Ce constat, tous les hommes de bonne foi peuvent le faire.

 

« Le Pays »


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