HomeA la uneMINI-TOURNEE AFRICAINE DE LE DRIAN : Quand François Hollande met le turbo avant de passer la main

MINI-TOURNEE AFRICAINE DE LE DRIAN : Quand François Hollande met le turbo avant de passer la main


 

Le ministre français de la Défense, Jean Yves le Drian, a effectué en fin de semaine écoulée une mini-tournée africaine qui l’a conduit au Mali, au Niger et au Tchad, essentiellement pour s’assurer que l’accord d’Alger connaît enfin un début de mise en œuvre dans le septentrion malien et pour apporter le soutien de la France au pays de Mahamadou Issoufou au lendemain de l’attaque terroriste particulièrement meurtrière contre une patrouille militaire à Tilwa, et dont le bilan sans cesse évolutif fait état de 16 soldats tués et plusieurs autres blessés. Le ministre français n’a pas raté l’occasion, à Gao où il s’est rendu comme à Niamey, de rappeler l’engagement de la France aux côtés de ses partenaires du Sahel en proie à une déferlante terroriste depuis la déliquescence de la Libye et l’arrivée massive au Mali de narcotrafiquants flanqués d’extrémistes religieux. Dans la foulée, il a annoncé le déploiement de forces spéciales françaises à la frontière nigéro-malienne, dans les environs de Tillabéri, pour traquer les terroristes qui tenteraient de passer d’un pays à un autre pour commettre leurs forfaits et disparaître après coup dans la nature. Les avions de chasse Mirage 2000 et les drones Reaper déjà pré-positionnés au Niger pourraient être mis à contribution, mais l’immensité du désert du Ténéré et la parfaite maîtrise des coins et recoins de toute la bande sahélienne par les malfrats pourraient en limiter l’efficacité. La normalisation de la situation au Mali avec l’organisation des patrouilles conjointes (CMA-Plateforme-Armée malienne) sous le regard plein d’optimisme de Jean-Yves le Drian, le week-end dernier à Gao, de même que la mise en place imminente des autorités régionales intérimaires dans les cinq régions septentrionales du Mali qui acterait le retour de l’Etat dans ce qui est aujourd’hui un no man’s land sont autant de signaux qui sont de nature à faciliter une riposte efficace des  Etats du Mali, du Niger et du Burkina Faso contre toute forme de criminalité transfrontalière.

Il est à craindre le calme qui précède la tempête

Toutefois, n’oublions pas que la situation au Nord du Mali est tellement instable et tellement volatile en raison de la versatilité des acteurs de la crise qu’il ne faut pas d’ores et déjà  entonner l’hymne de la paix définitive sans en émettre des réserves, surtout que les populations locales et les petits groupes armés estiment avoir été les dindons de la farce dans la « balkanisation » en cours de la partie la plus crisogène du Mali. Il ne serait donc pas étonnant, que tels des lépreux, ceux qui n’ont pas eu la chance ou l’occasion de traire la vache se mettent, par dépit, à renverser la calebasse de lait à travers des actes de sabotage, histoire de gâcher la fête et de polluer l’ambiance autour de la mangeoire aussi longtemps qu’ils n’auront pas leur part de gâteau ou plutôt de lait. Et le scepticisme quant au retour définitif à la confiance mutuelle entre les différents protagonistes va en se renforçant depuis le démarrage folklorique des patrouilles conjointes, car elles avaient davantage l’air d’une mise en scène que d’une volonté commune et sincère de défendre ensemble et côte-à-côte, les valeurs républicaines et les intérêts de tous les Maliens sans exclusive. Quant à la mise en place des autorités régionales qui devrait débuter en principe le 28 février prochain, elle n’a pas respecté, c’est le moins qu’on puisse dire, l’esprit et la lettre de l’accord d’Alger dont elle est l’émanation, d’autant qu’il n’y a visiblement pas eu de consensus autour du profil des membres des conseils régionaux. Car, au lieu que ces autorités soient issues de la société civile, des services déconcentrés de l’Etat ou des conseils sortants, on a préféré distribué les strapontins à ceux qui se sont le plus illustrés dans le capharnaüm en cours au Mali, à l’exception évidemment des parias que sont les islamistes de tous bords. Ainsi, c’est la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) qui s’est, pour ainsi dire, taillé la part du lion, en obtenant, avec la bénédiction, pour ne pas dire la complicité du gouvernement malien, l’administration de la très convoitée région de Kidal de même que celle de Tombouctou. Les trois autres régions que sont Gao, Ménaka et Taoudéni seront, si tout se passe comme prévu, gérées par les autorités de Bamako et leurs alliés de circonstance que sont la Plateforme et le Mouvement pour le salut de l’Azawad (MSA). Si on peut espérer un calme relatif dans la lutte fratricide pour le contrôle de l’Azawad suite à cette redistribution des cartes, il est à craindre que ce ne soit un calme qui précède la tempête, au regard des tensions latentes qui subsistent et d’une éventuelle alliance entre des groupes armés incontrôlés et les irréductibles et irrédentistes islamistes. C’est peut-être cette sombre perspective qui a motivé le ministre de la défense Jean Yves le Drian à effectuer cette dernière « revue des troupes » au Mali et au Niger, afin de rassurer les autorités des deux pays et de tous les autres couverts par l’opération Barkhane que le président français François Hollande est déterminé à mettre le turbo dans cette lutte sans merci contre le terrorisme, avant de passer le témoin à son successeur au mois de mai prochain.

Hamadou GADIAGA


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