PÂQUES 2020
Un mois après la déclaration des deux premiers cas de Covid-19 au Burkina Faso, le bilan affiche, au 9 avril, 443 cas confirmés d’infections dont 146 guérisons, 24 décès et 273 cas en traitement. Entre-temps, pour freiner la propagation de la maladie, le gouvernement a pris une batterie de mesures allant de la suspension des événements d’envergure à la mise en quarantaine de toutes les villes ayant enregistré au moins un cas de Covid-19, en passant, entre autres, par l’instauration d’un couvre-feu, la fermeture des établissements scolaires et universitaires, des frontières terrestres, aériennes et ferroviaires, des marchés, restaurants, débits de boissons, salles de cinémas, de jeux et de spectacles, la suspension des transports en commun, etc. C’est dans ce contexte d’alerte maximale face à la maladie et de confinement sur fond de lieux de culte fermés, que les fidèles chrétiens s’apprêtent à célébrer la fête de Pâques, le 12 avril 2020. Pour une expérience inédite, c’en sera une.
A l’épreuve du Covid-19, Pâques 2020 s’annonce des plus moroses, d’autant que les célébrations se feront sans les fidèles
Car, en temps normal, dans la ferveur de leur foi, les fidèles chrétiens ne se feraient pas prier pour prendre d’assaut les églises et les temples, en ce triduum pascal qui a commencé le 9 avril dernier. Et les prémices de la fête se feraient déjà sentir au-delà même de ces lieux de culte jusque dans les marchés et autres débits de boissons, pour une fête qui se veut aussi celle du partage avec les frères d’autres religions. Mais à l’épreuve du Covid-19, Pâques 2020 s’annonce des plus moroses, d’autant que les célébrations se feront sans les fidèles, contraints qu’ils sont de rester à domicile non seulement en raison du couvre-feu, mais aussi des mesures d’interdiction de rassemblements prises par les autorités. Une expérience inédite que l’Eglise du Burkina, sauf erreur ou omission, n’a jamais connue. Qu’à cela ne tienne. Sans être physiquement présents dans la maison de Dieu, les fidèles chrétiens sont invités à vivre de chez eux, les célébrations pascales par le biais de la radio et de la télévision voire des réseaux sociaux. Une initiative qui permettra certes de rester en communion dans la prière, mais qui pourrait aussi avoir un petit goût d’inachevé pour ceux qui ont du mal à trouver leurs repères dans une messe sans eucharistie. C’est dire si en cette Pâques sur fond de Covid-19, c’est la foi même des fidèles qui est quelque part éprouvée. D’autant que contrairement aux années précédentes, on n’a pas senti cette préparation collective qui va généralement du mercredi des cendres au dimanche pascal en passant par les différents chemins de croix, le dimanche des rameaux et le triduum pascal. Autant dire que c’est une marche individuelle vers Pâques, qui peut avoir ébranlé bien des chrétiens dans leur préparation spirituelle en les amenant à baisser de régime parce que ne ressentant pas la même ferveur habituelle. Au-delà, c’est une situation qui ne manquera pas non plus d’impact sur le goût de la fête en raison du report des sacrements que s’apprêtaient à recevoir certains fidèles obligés de prendre leur mal en patience, en attendant la fin de l’épidémie.
Pour nous, Africains, habitués à passer nos fêtes dans la convivialité, qu’est-ce que Pâques si on ne peut pas aller à l’église, rendre visite à des proches, recevoir des invités et partager un repas dans la gaieté ?
C’est dire si au-delà de la crise sanitaire, cette Pâques qui se présente comme une véritable épreuve pour le peuple de Dieu, est aussi un appel à l’introspection pour les fidèles chrétiens. D’un certain point de vue, ce n’est pas non plus mal car, dans la vie, il faut parfois savoir marquer une halte. Mais pour nous, Africains, habitués à passer nos fêtes dans la convivialité, qu’est-ce que Pâques si on ne peut pas aller à l’église, rendre visite à des proches, recevoir des invités et partager un repas dans la gaieté ? C’est peu dire que l’ambiance dans les églises et les temples, manquera aux fidèles chrétiens tout comme ces derniers manqueront aux serviteurs de Dieu, c’est-à-dire les pasteurs et les prêtres célébrants. Vivement donc que ce satané virus qui n’est pas loin de remettre en cause notre vivre-ensemble, soit vaincu le plus rapidement possible pour que la vie reprenne son cours normal. Car, rien ne saurait remplacer la chaleur des relations humaines, surtout en Afrique où la célébration d’une fête religieuse est une occasion de réjouissances qui vont largement au-delà du cercle restreint des fidèles de cette religion. Cela dit, après les chrétiens, ce sont les fidèles musulmans dont le jeûne du Ramadan se profile déjà à l’horizon, qui risquent d’être soumis à la même épreuve, pour cause de Covid-19. On espère que d’ici là, à défaut d’être totalement vaincue, la maladie sera fortement en recul dans notre pays et partout ailleurs dans le monde.
« Le Pays »