HomeOmbre et lumièrePIRATAGE DU RESEAU INFORMATIQUE DE LA CBAO : Le verdict attendu le 21 juillet prochain

PIRATAGE DU RESEAU INFORMATIQUE DE LA CBAO : Le verdict attendu le 21 juillet prochain


Le Procès du piratage du réseau informatique de la Compagnie des banques d’Afrique de l’Ouest (CBAO) est entré dans sa phase décisive. Le  29 juin 2017, ont eu lieu les plaidoiries de la partie civile et de la défense, et les réquisitions du procureur. Ouverte donc aux environs de 8h 45mn, l’audience a été suspendue aux environs de 1h 15 mn du 30 juin. Le verdict est attendu le 21 juillet prochain au Tribunal de grande instance de Ouagadougou (TGI).

Sayouba Zidwemba dit  « Will Télécom » et les 13 autres personnes  présumées impliquées dans l’affaire de cyber-attaque ayant abouti au piratage du réseau informatique de la CBAO, basée au Sénégal, ont encore près de 3 semaines à passer à la Maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou (MACO) avant de connaître leur sort. Ils sont poursuivis, entre autres, pour  complicité de falsification de documents informatisés, complicité d’escroquerie et de recel.  Annoncé pour le 29 juin dernier, le délibéré du procès a été renvoyé au 21 juillet prochain. Cela, après une journée « chargée » pour les juges, le procureur, les témoins, les prévenus,  les avocats de la défense et ceux de la banque. En effet, au regard de l’indisponibilité des salles d’audience et des vacances judiciaires qui devraient démarrer le 1er  juillet dernier, les juges en charge du dossier voulaient vaille que vaille en finir une bonne fois pour toute le 29 juin dernier. Mais, c’était sans compter avec les débats houleux qui ont eu lieu entre les deux camps, en l’occurrence la partie civile et la défense. Ouverte donc aux environs de 8h 45mn, l’audience s’est poursuivie jusqu’aux environs de 1h 15 mn du 30 juin.  Après l’écoute d’un témoin en l’occurrence la responsable de l’audit et du contrôle de la CBAO durant toute la matinée, le tribunal avait donné la parole aux avocats pour leurs plaidoiries et au parquet pour sa réquisition. Les premiers à prendre la parole furent donc les avocats de la banque, constitués partie civile. A tour de rôle,  Me Issa Diallo et Me Prosper Farama  ont argumenté pour démontrer   la culpabilité des 14 prévenus. Pour la partie civile, Sayouba Zidwemba alias  « Will Télécom » est bel et bien coupable de complicité de falsification de documents informatiques, de complicité d’escroquerie et de recel.  Revenant sur les faits, elle a soutenu  que Will Télécom  a proféré des menaces contre le Directeur général (DG) de la CBAO, lorsque celui-ci l’a contacté pour lui signifier que l’argent qu’il retirait  était d’origine frauduleuse. Et,  pour elle, c’est lorsque Will Télécom a senti les choses se compliquer qu’il s’est rendu à Abidjan, en Côte d’Ivoire, pour « produire les preuves de la vente de matériel informatique à un client fictif qui y résiderait et qui s’appellerait Kouassi André, celui-là même qui aurait viré de l’argent à Will Télécom pour la commande du matériel informatique ». Ce qui  a amené Me Issa Diallo, un des avocats de la banque, à émettre des doutes sur  la façon hâtive dont l’argent viré dans le compte de Will Télécom  a été retiré.  « Comment un compte bancaire créé le 28 février se voit-il renfloué le lendemain de 67, 8 millions de F CFA en l’espace d’une journée et dès le lendemain, l’argent avait déjà été retiré ? », s’est-il  interrogé. A cette question qui avait été auparavant posée à Will Télécom lors de son audition, le 22 juin dernier, celui-ci avait répondu aux avocats de la défense que contrairement à eux qui laissent leur argent dormir dans les comptes, les commerçants ne le font pas. « Nous savons toujours ce qu’il faut faire avec notre argent », avait-il répondu le 22 juin dernier à la barre. En sus, la  partie civile a conclu que les prévenus sont donc coupables des charges retenues à leur encontre et doivent être condamnés conformément à la loi. Et pour Me Prosper Farama, les prévenus ont terni « l’image » de la CBAO. « Aujourd’hui, les gens vont se dire qu’à la CBAO, l’argent n’est pas sécurisé », a-t-il soutenu.  C’est pourquoi, dans ses plaidoiries, il a réclamé que la banque soit remboursée pour préjudice subi par chacun des prévenus, dont 67, 8 millions de F CFA par Sayouba Zidwemba dit « Will Télécom ». Il a aussi demandé que les prévenus soient condamnés à payer à la banque, la somme de 250 millions de F CFA pour préjudice moral et 10 millions de F CFA au titre du remboursement des frais engendrés par le procès.

Le Parquet requiert 5 ans de prison ferme contre les prévenus

Au regard de tout ce qui a été dit durant les différentes auditions du procès, le Procureur du Faso  a  essayé de donner quelques explications liées notamment à la manière dont les prévenus et leur complice de la CBAO procédaient pour détourner les 1, 8 milliards de F CFA. Pour lui, il s’agit d’une intrusion qui consiste à modifier les données des opérations faites des années antérieures pour pouvoir détourner de l’argent de certains « gros » clients de la banque. Par exemple, une opération d’un million peut être faite en 2012. On manipule ces données afin que celles-ci deviennent une opération faite en 2017, avec une somme peut-être de 27 millions de F CFA voire plus.   En clair, selon le Parquet, les deux versements de Will Télécom, en l’occurrence les 67, 8 millions de F CFA, sont des opérations de 2012 qui ont été falsifiées.  De façon pratique, a soutenu le Parquet, le premier virement est une opération de   250 000 F CFA datant du 30 mars 2012 qui a été falsifiée pour devenir 30 millions de F CFA et le deuxième, en l’occurrence les 37,8 millions de F CFA, est une falsification d’un virement de 300 000 F CFA du 10 décembre de la même année.  Embouchant la même trompette que les avocats de la CBAO, le procureur du Faso a soutenu aussi que c’est parce que  la banque a appelé Will Télécom pour lui signifier l’origine frauduleuse de l’argent qui lui est transféré, qu’il s’est précipité pour se rendre  au bord de la Lagune Ebrié pour se faire établir des pièces justificatives de la vente du matériel informatique. « Sinon, comment l’on peut être convoqué le 7 mars 2017 par la banque pour un problème, et partir dès le lendemain, 8 mars, en voyage, si ce n’est pour se faire  produire des pièces justificatives d’une commande fictive ? », s’est indigné le Procureur.   En conclusion, il a laissé entendre que Sayouba Zidwemba dit  « Will Télécom » est coupable des  chefs d’accusation retenus à son encontre. Par conséquent, il a requis 5 ans de prison ferme et 1, 5 million de F CFA d’amende contre  lui  et les 13 autres prévenus.   Pour leur part, les avocats de la défense ont essayé de balayer du revers de la main, les arguments de la partie civile. Huit heures durant, soit de 17h à 00h 40, chacun d’eux, à tour de rôle, a apporté ses arguments pour « blanchir » les prévenus, en l’occurrence Will Télécom. Selon la défense, leur client, en l’occurrence Will Télécom, n’est coupable de rien. Il est appelé à la barre, pour avoir tout simplement fait une transaction commerciale qui est d’ailleurs sa profession.

« Même si le client est un voleur, ce n’est pas pour autant que le commerçant l’est »

Revenant sur les faits, la défense a expliqué que Will n’a fait que saisir une opportunité  qui lui était offerte comme « un don du ciel ».  Pour rappel, c’est son frère cadet qui l’aurait appelé pour lui faire part  de la commande du sieur Kouassi. Et comme tout commerçant « ambitieux », a soutenu la défense,  il n’a fait que remplir les conditions de son client qui voulait qu’il ouvre un compte à la CBAO pour faciliter le virement de l’argent de la commande. Mieux, a laissé entendre un des avocats de la défense, un commerçant, « aussi honnête soit-il », ne saurait vouloir savoir d’où provient l’argent d’un client. « Tout ce qu’il a à faire, c’est de remplir sa part de contrat, et même si le client est un voleur, ce n’est pas pour autant que lui, le

commerçant, l’est. Donc, Will  a ouvert le compte sans aucune autre intention, la transaction a été faite et il est allé prendre sa position avec la banque. La banque lui a confirmé que l’argent a été viré. Il a donc fait des retraits pour acheter le matériel de son client, qu’il a convoyé à Abidjan  », a expliqué un des avocats de la défense dans sa plaidoirie. Dans ce cas de figure,  a conclu  la défense, il s’agit donc d’une  affaire purement commerciale, qui  ne saurait souffrir d’aucun  soupçon. Donc, pour elle, il est inadmissible que l’on puisse condamner leurs clients sur la simple base d’indices et sans preuves apparentes.  A tour de rôle, les avocats de la défense ont   tous demandé la relaxe pure et simple de leurs clients pour infractions non constituées pour certains, et au bénéfice du doute pour d’autres. Après les plaidoiries des avocats de la défense,  la parole a été donnée à chacun des prévenus pour dire son dernier mot. L’émotion était grande. Et une fois de plus, tous les accusés ont clamé leur innocence tout en demandant  aux juges de les acquitter afin qu’ils reprennent leurs activités commerciales restées en suspens depuis leur incarcération à la MACO. Le verdict est attendu le 21 juillet prochain. En rappel, dans cette affaire de piratage du réseau informatique de la CBAO qui aurait permis le détournement de 1, 8 milliards de F CFA de la banque, le présumé cerveau serait un agent de l’institution bancaire. Il s’agit de Georges Félix Bidi, actuellement aux arrêts. Il est le chef du département de la Production et de l’intégration de la CBAO, groupe bancaire marocain. Il est chargé de tout le système intégré en interne. Ancien responsable de la Société générale de banques au Sénégal (SGBS), il intègre le groupe CBAO-Attijari en 2012. Georges Félix Bidi, Sénégalais de nationalité, est réputé être un grand  «bosseur». Certains disent même qu’il a été débauché pour ses compétences. Outre le Sénégal,  Georges Félix Bidi  couvre depuis 5 ans,  le Bénin, le Burkina Faso et le Niger. C’est au Niger que le lièvre a été levé. En effet, c’est  là qu’un client a signalé des anomalies sur son compte, après plusieurs réclamations d’autres clients.  La Direction générale a diligenté une enquête en interne. Et le pot aux roses a été découvert. L’affaire remonte au 9 mars dernier et 14 entrepreneurs issus de différents pays y sont présumés trempés.  Au Burkina Faso,  outre Christian Tapsoba dit « Goroko » et Sayouba Zidwemba dit « Will Télécom », d’autres têtes connues du monde du commerce seraient au centre de ce vol d’argent. Il s’agit, entre autres, de Hamidou Zongo, un opérateur économique, Samuel Poda, Mahamoud Kaboré, François Xavier Kaboré.

Mamouda TANKOANO

 

 

 

 

 


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