PROCES DE NAÏM TOURE : Le plaignant demande 1 franc symbolique
Le 30 janvier 2017, le cyber-activiste, Naïm Touré, poursuivi par Antoine Zong-Naba, conseiller juridique du président de l’Assemblée nationale, Salifou Diallo, comparaissait devant le Tribunal de grande instance de Ouagadougou. A la demande du conseil du prévenu, le dossier a été renvoyé. Hier, 13 février 2017, le dossier a, en effet, été jugé. Mais, le délibéré, lui, est prévu pour être rendu le 27 février prochain.
« Diffamation et injures publiques » ; c’est ce que reproche Zong-Naba Antoine au web activiste, Naïm Touré pour, dit-il, l’avoir traité, entre autres, de « larbin », « mounafica » et de « bandecon » en réaction à l’un de ses posts sur le réseau social Facebook. En effet, dans ce post, Zong-Naba Antoine, conseiller du président de l’Assemblée nationale burkinabè, affirmait que ce dernier avait « offert gracieusement » du matériel biomédical d’une valeur de 700 millions de FCFA au Centre hospitalier universitaire Souro Sanou de Bobo-Dioulasso. Interrogé sur les faits à lui reprochés, le 13 février dernier, lors de sa comparution au Tribunal de grande instance de Ouagadougou, Naïm Touré a indiqué que sa réaction était liée à la nature du post en question. Après avoir vu le post, a-t-il dit, il a mené sa « petite enquête » et s’est rendu compte que le don en question n’était pas le fait du président de l’Assemblée nationale comme le stipulait le post du Sieur Antoine, mais d’une association suisse. C’est alors qu’il a réagit en affirmant en substance que les affirmations de Zong-Naba étaient loin de la réalité, bien sûr avec les termes comme « bandecon », « larbin »,… C’est alors que le président du tribunal lui a demandé de donner la définition de ces termes. « Bandécon », pour Naïm Touré, c’est « quelque chose qui n’est pas sérieux » et « mounafica » pour « quelqu’un qui dit des choses qui ne sont pas vraies ». Et le procureur de lui demander s’il ne pensait pas que ces propos étaient injurieux. « Je reconnais que je suis allé un peu fort », a lancé le web-activiste en guise de réponse. Après ces interventions, la parole est donnée au procureur du Faso. Celui-ci a d’abord rappelé que contrairement à ce que les uns et les autres pensent, le réseau social Facebook n’est pas une zone de non droit. Il a ensuite indiqué qu’étant dans un Etat de droit, les libertés des uns devraient prendre fin où commencent celles des autres. Le procureur du Faso a aussi déploré le fait qu’après la prononciation du renvoi, le 30 janvier dernier, Naïm Touré a posté encore sur sa page Facebook, un message tendant à dire que la justice était à la solde du pouvoir et que le tribunal aurait réuni les moyens afin de le condamner. « Le dés sont jetés », a publié Naïm Touré, selon le procureur du Faso. En outre, le même procureur, lors d’une émission et bien avant le procès, a eu à se prononcer sur la nécessité de recadrer l’usage fait des réseaux sociaux en sévissant.
En lieu et place des 15 millions de F CFA, il réclame désormais 1 franc symbolique
En tant que tel, il a donc demandé à Naïm Touré si celui-ci voudrait que le procès soit renvoyé afin de laisser la place à un autre procureur pour la suite de la procédure. « Je ne vois pas la nécessité », a répondu Naïm Touré à ce sujet. Toute chose qui a permis au procureur de poursuivre et de faire sa réquisition. Dans cette réquisition, il a souhaité que le prévenu soit relaxé pour les faits de diffamtion mais qu’il soit condamné à payer 3 millions de F CFA pour les faits d’injures. Les conseils du plaignant, quant à eux, ont embouché la même trompette que le procureur. Pour eux, en effet, il n’y a pas lieu de laisser tomber un tel manquement de la part du web-activiste. Surtout que selon eux, le prévenu a continué avec ses amis à proférer des injures à l’endroit de leur client via sa page Facebook. Ils ont donc demandé que le président du tribunal, au regard de ces faits, condamne le prévenu pour l’exemple. D’ailleurs, a révélé Me Bayala, l’un des avocats du plaignant, son client n’a pas entamé cette procédure pour se faire de l’argent. A ce titre, en lieu et place des 15 millions de F CFA qu’il avait demandés pour réparer le préjudice subi, il réclame désormais que le prévenu soit condamné à payer 1 franc symbolique. L’avocat du prévenu, Me Farama Prosper, a souhaité que le tribunal, avant de prendre toute décision, tienne compte de l’évolution des sociétés et du fait que les uns et les autres n’ont pas la même conception des problématiques. En effet, selon la défense, les faits de diffamation ne sauraient tenir dans la mesure où le langage sur les réseaux sociaux est tout autre avec l’évolution. Mieux, il va plus loin et précise que le plaignant lui-même a, par le passé, « insulté » des gens sur Facebook, via sa page. Par ailleurs, selon Me Farama, dans le cas Naïm Touré, il n’y a pas eu d’injures publiques dans la mesure où le post en cause était seulement vu par les amis du prévenu et qu’il peut arriver à tous d’insulter des gens en causant entre amis. Au président du tribunal, le conseil du prévenu dira donc que : « Si c’est pour le condamner pour moraliser la société, laissez ce rôle à ceux qui en ont la charge. Sinon, nous sommes ici pour dire le droit ». C’est sur cette note que le président du tribunal a pris la parole pour ramener le délibéré du dossier au 27 février 2017.
Adama SIGUE