HomeDroit dans les yeuxRECOMMANDATIONS DES « 11 SAGES » POUR UNE SORTIE DE CRISE AU BURKINA

RECOMMANDATIONS DES « 11 SAGES » POUR UNE SORTIE DE CRISE AU BURKINA


S’il y a une expression qui revient au Burkina  comme un leitmotiv, notamment depuis le début des attaques terroristes, c’est bel et bien « la réconciliation nationale ». C’est dans ce contexte qu’un groupe de 11 personnalités, composé de grand commis de l’Etat à la retraite, de leaders religieux et coutumiers et de sommités de la société civile, a proposé aux Burkinabè des recommandations dont la mise en œuvre, à leurs yeux, pourrait faciliter le retour de la paix et de la réconciliation nationale dans notre pays. L’on peut rendre hommage à ces hommes et à ces femmes qui, visiblement préoccupés par le drame que vit le Burkina, se sont fait le devoir d’apporter leur pierre à la construction de la paix et du vivre-ensemble. L’intention en elle-même est d’une grande noblesse. Il faut ajouter à cela la grandeur morale, spirituelle et intellectuelle qui caractérise l’ensemble de ces « 11 sages ». Il n’est donc pas permis, un seul instant, de croire que la démarche de ces grandes personnalités qui, manifestement, sont à l’abri du besoin, a été motivée par autre chose que par celle d’aider à sauver le pays en danger. Ce dernier élément est bon à souligner pour la raison suivante. Au Burkina Faso, l’on a assisté et l’on assiste encore à l’émergence d’associations et autres initiatives qualifiées abusivement de citoyennes, qui sont passées maîtres dans l’art d’exploiter les crises du pays pour juste augmenter leurs comptes en banque. L’on peut avoir la faiblesse de croire que les « 11 sages » ne mangent pas de ce pain-là. Cela dit et avec tout le respect qu’on leur doit, puisqu’en plus de leur qualité morale et intellectuelle, tous les « 11 sages » sont d’un âge avancé, l’on peut se risquer à faire quelques observations à propos de certaines de leurs recommandations. La première recommandation est celle qui concerne les acteurs de l’insurrection populaire.

L’intérêt supérieur de la Nation exige que tout le monde travaille à la réconciliation, la vraie, celle qui repose sur la Vérité et la Justice

 

Les « 11 sages » recommandent, en effet, à ces derniers de se livrer à une contrition publique. En français facile, cela signifie que les 11 sages demandent aux acteurs de l’insurrection de déclarer qu’ils regrettent vivement d’avoir offensé Blaise Compaoré en le contraignant à lâcher le pouvoir. Et ce n’est pas tout car la contrition recommandée, doit être publique. Autrement dit, une cérémonie officielle doit être organisée pour permettre aux acteurs de l’insurrection populaire de battre chacun sa coulpe. Franchement, on voit mal les acteurs de l’insurrection populaire se livrer à une telle séance d’humiliation publique. Car, l’insurrection des 30 et 31 octobre 2014, a été un acte héroïque qui a libéré tout un peuple de la servitude et de la patrimonialisation du pouvoir. Bien des observateurs avisés de la scène publique burkinabè, d’ici et d’ailleurs, l’ont déjà souligné. Et pendant qu’on y est, pourquoi ne pas demander aux acteurs de l’insurrection du 3 janvier 1966 encore vivants, de se livrer à un tel acte de contrition publique ? Lorsqu’on parle des acteurs de l’insurrection, à qui pense-t-on ? En tout cas, ceux qui se sont déversés  dans les rues pour que Blaise Compaoré quitte le pouvoir après avoir régné 27 ans sur le pays et après avoir tenté de modifier la Constitution pour prolonger son bail, étaient dans leur bon droit. Et si c’était à refaire, la probabilité est grande qu’ils le refassent. Et puis, Dieu seul sait si les acteurs de l’insurrection étaient nombreux et même très nombreux. En tout cas, on a rarement vu autant de monde prendre d’assaut les rues pour réclamer le départ d’un régime. Et au sein de cette foule en colère, il y avait tout le monde : hommes politiques, étudiants, travailleurs, acteurs de la société civile, syndicats, etc.  D’ailleurs, l’on peut dire que c’est la composante « société civile » du mouvement insurrectionnel qui a été la plus déterminante dans le dénouement de la situation. La deuxième recommandation sur laquelle l’on peut s’arrêter, est celle qui suggère de faciliter le retour au pays de tous les exilés politiques et autres qui le souhaitent, par la prise de mesures favorables. Le chat a un nom et il convient de l’appeler par son nom. Ce n’est ni plus ni moins qu’une prime à l’impunité si l’affaire devait seulement en rester là. C’est cette réalité que l’on tente de cacher derrière l’expression « mesures favorables ».  Il ne faut pas cacher « le caca pour déguster le néré ». Car, l’on peut parier que le peuple burkinabè veut la réconciliation mais pas à n’importe quel prix. De ce point de vue, l’intérêt supérieur de la Nation exige que tout le monde travaille à la réconciliation, la vraie, celle qui repose sur la Vérité et la Justice. Tout autre manière de s’y prendre s’apparente à de la mascarade, de  la diversion et à un défoulement collectif.

 

Sidzabda

 

 


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