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RECONCILIATION EN COTE D’IVOIRE


Il l’avait promis lors de son investiture. Et c’est désormais chose faite. Le président Alassane Dramane Ouattara (ADO) a désormais un ministre en charge de la réconciliation nationale en la personne de Kouadio Konan Bertin (KKB). Nommé le 15 décembre dernier, c’est lui qui aura la lourde tâche de réconcilier les Ivoiriens que l’on sait très divisés depuis le crise post-électorale de 2010-2011. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le président ivoirien semble décidé à faire de la question de la réconciliation nationale, l’un de ses chevaux de bataille lors de ce troisième mandat qui se veut le dernier pour lui, à l’en croire sur parole. Si c’est vraiment le cas, cela est une bonne chose car, c’est ce qui aura été la plus grande faiblesse de ses deux premiers quinquennats à la tête de la Côte d’Ivoire, au regard de la déchirure générée par la crise post-électorale de 2010-2011. De là à croire que le locataire du palais de Cocody se lance dans une sorte d’opération de rattrapage de son bilan qui a brillé sur bien des plans sauf sur le chantier de la réconciliation nationale, il y a un pas que d’aucuns ne se garderont pas de franchir. En tous les cas, il n’y aurait aucun mal à cela car, comme le dit l’adage, « il n’est jamais tard pour bien faire ».

 

On ne se réconcilie pas seul

 

Et si après dix ans au pouvoir, ADO ne cherchait pas à relever le défi de la réconciliation nationale, il y aurait des raisons de se demander s’il le ferait jamais. C’est dire si le combat pour recoller les morceaux du tissu social en lambeaux en Côte d’Ivoire, est un combat qui vaut bien la peine d’être mené. Autrement, à quoi sert-il de vanter les mérites d’une croissance économique quand les fils et les filles du pays continuent de se regarder en chiens de faïence ? En tout cas, tout le mal que l’on puisse souhaiter au président ADO, c’est de réussir à rapprocher les frères ennemis ivoiriens afin de leur permettre de fumer ensemble, le calumet de la paix. La question que l’on pourrait maintenant se poser, est la suivante : quelles sont les chances de succès pour l’Enfant de Kong ? Car, il est bien connu que la réconciliation ne se décrète pas, qui plus est, on ne se réconcilie pas seul. Et une chose est d’avoir la volonté d’aller à la réconciliation nationale, une autre est d’avoir l’adhésion de toutes les parties prenantes  au conflit. Et dans le cas de la Côte d’Ivoire, cela n’est pas gagné d’avance. Surtout si les acteurs politiques continuent à adopter des positions souvent maximalistes, très proches de leurs intérêts personnels au détriment de l’intérêt général. C’est dire si la tâche pour parvenir à la réconciliation nationale en Eburnie, sera très ardue. Elle ne dépend pas que de la seule volonté du chef de l’Etat, mais aussi de l’engagement de ses adversaires politiques à travailler à désarmer véritablement les cœurs en vue d’une réelle adhésion des populations au projet. Autrement, aussi géniale que soit l’idée de la création d’un ministère en charge de la question, si ce dernier est une coquille vide juste destinée à donner le change, cela ne suffira pas à opérer la catharsis nationale. Car, dix ans après la crise postélectorale de 2010-2011, tout porte à croire que les blessures sont loin d’avoir cicatrisé.  

 

La réconciliation nationale ne devrait pas se résumer à de petits arrangements entre politiciens sur le dos du peuple ivoirien

 

Pire, les lignes de fracture entre les Ivoiriens se sont davantage creusées au point que les amis d’hier sont devenus les ennemis d’aujourd’hui et vice-versa, sur fond de positionnement et de calculs politiques à la petite semaine. D’ailleurs,  l’on se demande si le scrutin du 31 octobre dernier sur fond de fortes tensions politiques, n’est pas venu en rajouter à la situation déjà bien complexe. C’est pourquoi on ne peut qu’encourager vivement le président Ouattara à jouer à fond sa partition en posant des actes forts allant dans le sens de la décrispation. Dans le même temps, on peut inviter l’opposition politique à mettre de l’eau dans son vin, en privilégiant l’intérêt national. En cela, des assises nationales pour définir les contours de cette réconciliation nationale, ne seraient pas de trop. Mais encore faut-il au préalable s’accorder sur son contenu, et prendre en compte son pendant judiciaire. C’est dire si cette notion de réconciliation nationale ne devrait pas se résumer à de petits arrangements entre politiciens sur le dos du peuple ivoirien. Ensuite, elle aura besoin de sincérité sur toute la ligne. D’où la nécessité, pour chaque acteur, de jouer sa partition en toute franchise, en évitant par exemple, de venir sous l’arbre à palabres avec un couteau dans le dos. En tout état de cause, pour paraphraser l’Ecclésiaste, on dira qu’il y a un temps pour tout : un temps pour faire la guerre, un temps pour faire la paix. Et dans le cas d’espèce, les Ivoiriens gagneraient tous à faire leur cette pensée pleine de sagesse de l’ex-président Félix Houphouët Boigny pour qui « la paix n’est pas un mot, c’est un comportement ».

 

 « Le Pays »

 


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