RECONNAISSANCE DE LA MAROCANITE DU SAHARA OCCIDENTAL PAR L’ESPAGNE : Une décision lourde de conséquences
Les autorités du Royaume chérifien étaient sans doute aux anges, le week-end écoulé. Et pour cause : ce jour-là, le chef de la diplomatie espagnole a apporté le soutien de son pays au plan d’autonomie du Maroc sur la question du Sahara occidental. A entendre le diplomate ibérique, ce plan est « la base la plus sérieuse, réaliste et crédible pour la résolution de ce différend ». En rappel, ce plan qui vient de recevoir l’approbation, on ne peut plus dithyrambique de Madrid, propose une autonomie du Sahara occidental mais sous la souveraineté du royaume du Maroc. Autrement dit, ce plan consacre la marocanité du Sahara occidental. Hassan II en avait fait un des axes majeurs de la diplomatie du royaume. Il est mort sans obtenir le soutien dont vient de bénéficier son successeur de la part de l’ancienne puissance colonisatrice. Ce que le père n’a pas pu obtenir durant son long règne, le fils l’a obtenu en 2022. Au-delà de ce dernier, c’est tout le royaume qui vient de se voir honoré par l’Espagne.
L’Espagne gagne à entretenir les meilleures relations possibles avec Rabat
Car, après « Dieu », la « patrie » et « le Roi », la marocanité du Sahara occidental représente la valeur la plus partagée du Royaume chérifien. De ce point de vue, il ne serait pas étonnant que dans les jours à venir, Rabat tue le veau gras pour célébrer la reconnaissance par l’Espagne, de la marocanité du Sahara occidental. Par- là, l’Espagne vient de mettre fin à 47 ans de neutralité dans le conflit du Sahara occidental. En réalité, derrière cette nouvelle posture pro-marocaine de l’Espagne, se cache la volonté de ce pays de caresser le Royaume chérifien dans le sens du poil, pour que ce dernier travaille à mettre fin aux faits suivants. Il y a d’abord, l’entrée massive d’immigrés irréguliers dans la ville de Ceuta. On peut citer, ensuite, la fermeture prolongée, au-delà des raisons sanitaires, des frontières de Ceuta et Melilla. Pour terminer, l’on peut évoquer l’interruption du trafic de passagers via le détroit de Gibraltar. Comme on le voit, l’Espagne gagne à entretenir les meilleures relations possibles avec Rabat. Et cela est de bonne guerre. Car, ce sont les intérêts qui décident de la qualité des relations entre les Etats. Cette vérité nous renvoie à cet homme politique de l’Hexagone, selon qui, la « France n’a pas d’amis mais des intérêts ». Conscient de cela, le Maroc a su actionner les leviers qu’il faut pour convaincre son plus grand voisin européen, de partager ses vues sur la question du Sahara occidental. Et cela vient illustrer, s’il en est encore besoin, le dynamisme et l’efficacité de la diplomatie marocaine sur le dossier du Sahara occidental. Dans le même registre, l’on peut aussi évoquer la reconnaissance, en 2020, de la souveraineté du Maroc sur le Sahara, par les Etats-Unis d’Amérique.
L’Algérie a toujours fait de la cause du Front Polisario, une cause nationale
C’était sous le régime de Donald Trump. La position de l’Administration Biden n’a pas changé à ce sujet. Au plan africain, l’on ne compte plus le nombre de pays que le Maroc a su rallier à sa cause relativement à la question du Sahara occidental. Cela dit, l’Espagne, en décidant, après 47 ans de neutralité, de s’aligner sur la position du Maroc relativement à la question du Sahara occidental, a pris une décision lourde de conséquences. La première est que désormais, elle peut compter parmi ses « ennemis » déclarés, l’Algérie et des pays africains, et même au-delà, qui ont toujours combattu avec force, l’idée de la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental. Outre l’Algérie, la tête de proue de ce camp sur le continent noir, est l’Afrique du Sud. Et tout le monde sait qu’à l’échelle de l’Afrique voire à celle du monde, le pays de Mandela est loin de compter pour du beurre. La deuxième conséquence liée à cette décision est qu’elle peut amener l’Algérie à bander davantage les muscles contre le Maroc au point de provoquer un conflit armé entre les deux pays. Et la preuve que l’Algérie ne digère pas la décision de l’Espagne, est que le pays de Ben Bella a déjà rappelé son ambassadeur à Madrid pour consultation. Et l’on peut craindre que ce rappel soit la première étape d’un processus susceptible d’aboutir à une rupture des relations entre les deux pays. Car, l’Algérie, depuis 1975, année à laquelle l’Espagne s’est désengagée du Sahara occidental, a toujours fait de la cause du Front Polisario, une cause nationale algérienne. L’Algérie donc de 1975, c’est-à-dire celle de Houari Boumédienne, sur la question, ressemble à l’Algérie de 2022, c’est-à-dire l’Algérie de Tebboune. De ce point de vue, il n’est pas exclu que cette Algérie-là aille jusqu’à couper le robinet du gaz avec Madrid en guise de représailles, même si ce n’est pas encore à l’ordre du jour. L’on peut, enfin, dire que ce revirement de Madrid peut définitivement enterrer la résolution de l’ONU, d’organiser un référendum dans la région du Sahara. Du coup, c’est la signature de l’accord de cessez-le-feu entre les deux parties en conflit, qu’elle a laborieusement obtenu en 1991, qui risque de voler en éclats. Mais l’on doit, à la vérité, de dire que si la question du Sahara occidental peine à trouver une réponse, c’est aussi parce que, quelque part, l’ONU, ce « machin » comme l’appelait le Général De Gaulle, n’a pas fait grand’ chose pour mettre en œuvre, sa résolution sur le Sahara occidental.
« Le Pays »