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RESULTATS DES ELECTIONS LOCALES EN RCI


 Chacun repart avec ce qu’il a semé

En Côte d’Ivoire,  la Commission électorale indépendante (CEI) a dévoilé les secrets des urnes des élections locales. Sans surprise, le Rassemblement des Houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP), la coalition au pouvoir, rafle la mise et conforte ainsi son hégémonie sur la scène politique ivoirienne. L’on peut donc dire que c’est un test réussi pour cette formation qui peut se vanter d’avoir enregistré d’éclatantes victoires avec ou sans son ex-allié du Parti démocratique de Côte d’Ivoire – Rassemblement démocratique africain (PDCI-RDA). Mais pouvait-il en être autrement quand on tient les rênes du pouvoir en Afrique ? Car, non seulement la formation du président Alassane Dramane Ouattara (ADO)  disposait de toute la machine de l’Etat mais aussi elle est partie avec un léger avantage comparatif sur les autres : elle avait un bilan à défendre devant l’électorat, contrairement à de nombreux autres concurrents qui n’avaient que les bouches pleines de promesses.

L’enseignement principal de ces élections de proximité reste la percée des candidats indépendants

Or, sous nos cieux, l’on sait bien ce que valent les promesses d’un homme politique.

Le bilan est beaucoup plus mitigé pour son rival, le parti de l’Eléphant. Même si le parti d’Henri Konan Bédié (HKB) réussit à maintenir une assise confortable sur l’échiquier politique en Côte d’Ivoire, l’on peut légitimement penser, au regard de son histoire et de la qualité des hommes qui l’animent, qu’il aurait pu

mieux faire. Mais l’on comprend que les héritiers du père de la Nation, le président Houphouët Boigny, n’avaient vraiment pas la tête à la compétition électorale. Ils étaient, en effet, plus préoccupés par les dissensions internes qui minent leur parti et la fronde de certains de ses cadres qui refusent de déserter le navire du RHDP après le divorce d’avec le Rassemblement pour la démocratie et la République (RDR) du président Alassane Dramane Ouattara (ADO). Pire, HKB et ses troupes devraient faire face à des agressions externes tout comme ils l’ont laissé entendre, il y a peu,  en pointant du doigt le parti au pouvoir qu’ils accusent  de fomenter des  complots visant à les déstabiliser et à les faire disparaître. Mais quelles que soient les raisons de ce bilan mi-figue mi-raisin pour le PDCI-RDA, ces élections locales ont été un test grandeur nature en prélude à la présidentielle de 2020. Car, elles ont été une occasion pour le parti de jauger ses forces propres et surtout de faire le diagnostic des défis à relever pour la reconquête du pouvoir d’Etat.

Au-delà des scores respectifs de ces deux poids lourds de la politique en RCI, l’enseignement principal de ces élections de proximité reste la percée des candidats indépendants qui ont réussi la prouesse de ravir la seconde place au PDCI-RDA. Considérés pour la plupart comme des pestiférés au sein de leurs formations politiques,  ces frustrés de tous les bords politiques, ont réussi le tour de passe de se tirer d’affaire. Ce succès tient individuellement d’abord à leur aura personnelle. Mais on peut aussi l’expliquer par le fait qu’en Afrique, les électeurs

votent très souvent pour leurs fils et cela est encore plus vrai quand il s’agit d’élections locales. L’autre explication possible est que beaucoup de ces candidatures d’indépendants ont été suscitées et soutenues en sous-main par les deux grandes formations rivales que sont le PDCI et le RDR pour parfois atomiser les voix.

L’autre grande leçon, c’est la déculottée du Front populaire ivoirien

Cela dit, la question que l’on peut se poser est la suivante :  vers quels rivages se dirigeront ces oiseaux qui ont pris le pari de voler de leurs propres ailes ?  Beaucoup sans nul doute retourneront vers leurs partis d’origine mais avec de nouveaux arguments pour renégocier leur place. Ce qui est certain, ils feront l’objet d’une cour assidue de la part de prétendants à la magistrature suprême en 2020 en raison de leurs capacités de mobilisation.

L’autre grande leçon de ces élections, c’est la déculottée faite au Front populaire ivoirien (FPI) de l’ex-président Laurent Gbagbo, qui a dû s’arracher les cheveux quand il a appris la nouvelle. Mais point n’était besoin d’être un spécialiste de la météo politique en Côte d’Ivoire pour prédire cette bérézina. En effet, alors qu’Affi Nguessan faisait le choix de cavaler seul, son rival de l’aile radicale, Abdhouramanne Sangaré, avait opté pour le boycott. Même si en Afrique, les absents ont toujours tort, l’électorat ivoirien a sévèrement sanctionné  Affi Nguessan qui s’est lancé dans la bataille sans s’assurer de disposer de soutiens. Dans tous les cas, ces résultats catastrophiques  traduisent l’impérieuse nécessité d’une profonde introspection. Le FPI a, en tout cas, les moyens de rebondir s’il sait profiter de l’ombre de Simone Gbagbo et surfer sur la sympathie qu’ont de nombreux Ivoiriens pour Laurent Gbagbo présenté à tort ou à raison comme un martyre. Cependant, à la décharge du parti, l’on peut évoquer le manque de moyens dont il souffre, du fait de la perte du pouvoir.

L’on peut donc globalement dire que chacun, à l’issue de ces élections, est reparti avec ce qu’il a semé. 

Cela dit, il faut tout de même déplorer les violences qui se sont soldées par des morts ; ce qui n’est pas sans rappeler les sombres épisodes de l’histoire politique récente de la Côte d’Ivoire. Le pays revient de loin et tous les acteurs politiques devraient se fixer des lignes rouges à ne pas franchir surtout que l’on sait, comme le dit l’adage, que « les anciens tisons s’allument vite » dans un pays où les blessures sont encore profondes.

« Le Pays »

  


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