HomeA la uneRETRAIT ANNONCE DE PARCELLES ILLEGALEMENT ACQUISES : Le plus dur reste à venir

RETRAIT ANNONCE DE PARCELLES ILLEGALEMENT ACQUISES : Le plus dur reste à venir


Les pratiques mafieuses autour de la gestion du foncier urbain, étaient connues de tous. Elles étaient pratiquement devenues un sport national. Excellaient dans le domaine, des acteurs diversifiés : hommes politiques, techniciens du cadastre et de l’urbanisme, leaders d’opinion et l’on en oublie. La situation avait atteint un tel niveau de pourrissement que les odeurs fétides induites, avaient envahi toute la cité. L’assainissement du milieu donc passait pour un impératif catégorique. C’est dans ce sens que l’Assemblée nationale, sous la houlette de “Gorba”, c’est-à-dire Salifou Diallo, avait mis en place une commission d’enquête parlementaire. Celle-ci, composée de députés de toutes les sensibilités politiques, a mis 3 mois pour faire le travail. Le contenu de ce boulot commando et inédit vient d’être porté à la connaissance des Burkinabè. Les faits révélés sont gravissimes. Mais ils n’ont pas surpris pour autant les Burkinabè. Car, le moins que l’on puisse dire, est qu’ils sont en parfaite harmonie avec le paradigme dans lequel Blaise Compaoré avait inscrit sa gouvernance. Les caractéristiques de ce cadre de référence sont, entre autres, la prédation des biens de la communauté, l’avidité de gains et de richesses, la jouissance sans modération des biens en nombre et en qualité. De ce point de vue, les 105 000 parcelles illégalement acquises débusquées et révélées par les limiers de l’hémicycle, s’inscrivent dans l’ordre normal des choses. Néanmoins, l’on peut rendre hommage à ceux qui ont eu l’initiative de l’enquête et à ceux qui l’ont menée jusqu’aux résultats que l’on sait. Car, pour reprendre l’expression de l’honorable Laurent Bado, ils ont fait œuvre « de salubrité publique ». Mais faire un travail d’investigation et déceler des irrégularités est une chose, donner une suite judiciaire à ce travail de manière à réparer les torts subis, en est une autre. C’est à ce niveau que l’on peut craindre, comme le disent les Ivoiriens, que « l’éléphant annoncé n’arrive avec un pied cassé ». Dans le cas d’espèce, les membres de la commission préconisent le retrait des parcelles mises en cause. L’on peut se demander comment cela peut se traduire en actes sans pour autant brimer des citoyens qui, de bonne foi, ont trimé pour acheter des parcelles d’habitation parce qu’ils étaient simplement dans le besoin urgent et vital de s’en procurer une.

 

La justice ne doit épargner personne

 

S’il y a des gens à sanctionner dans le cadre de cette opération, cette catégorie de personnes, peut-on se risquer à dire, ne devrait pas être concernée. Et ce d’autant qu’elles ont les documents afférents à leur parcelle en bonne et due forme. Et puis, dans l’hypothèse où l’on retirerait comme promis les parcelles à problèmes, l’on peut aussi se poser la question de savoir comment l’on va procéder à leur redistribution sans susciter des grincements de dents. Une autre question est de savoir si ces retraits ne seront pas attaqués avec succès en justice. Car, nous sommes avant tout dans un Etat de droit. Autant de questions qui interpellent le pouvoir de Roch Marc Christian Kaboré en particulier et les Burkinabè en général. Moralement et politiquement, il est difficile de s’insurger d’emblée contre le retrait annoncé de parcelles illégalement acquises. Mais l’on doit y mettre la manière. Faute de quoi, le remède préconisé risque d’être pire que le mal lui-même. Une autre inquiétude que l’on peut formuler à propos de cette opération, est liée au fait que l’on peut avoir le sentiment qu’elle a visé essentiellement des Burkinabè restés fidèles à l’ancien régime. Car, il est difficile de nettoyer les écuries d’Augias dans le domaine du foncier urbain sans que certaines personnes qui sont aux affaires actuellement, ne soient éclaboussées. Même dans l’hypothèse où elles ne seraient pas coupables, l’on peut dire tout de même qu’elles ont une part de responsabilité dans le “bordel” excusez le mot, qui a été créé sous le régime Compaoré autour du foncier urbain. Les Burkinabè ne comprendraient pas et pourraient ne pas tolérer qu’il y ait de la discrimination dans la réponse apportée à la problématique des parcelles illégalement acquises. Le plus dur reste donc à venir. Les Burkinabè attendent qu’il y ait justice. Mais cette justice ne doit épargner personne, quelle que soit sa position du moment. C’est pourquoi pour lever toute suspicion dans le traitement de la question délicate du foncier urbain, l’on peut envisager par exemple de confier le boulot à une structure de la société civile comme le Réseau national de lutte anti-corruption (REN/LAC). Cette organisation, on le sait, a déjà abattu un important travail dans le domaine de la lutte contre la corruption. Cette suggestion, pour sûr, ne manquera pas de susciter des diarrhées chez bien des personnes parce qu’elles savent que le REN/LAC ne fait pas dans la dentelle en la matière. Mais c’est le prix à payer si l’on veut véritablement connaître toute l’étendue du mal, traquer ses auteurs et le soigner dans la durée.

 

Sidzabda


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