HomeA la uneREUNION DU CSA A KIDAL

REUNION DU CSA A KIDAL


Longtemps attendue et maintes fois compromise, la première réunion du Comité de suivi des accords d’Alger (CSA) censés sortir le Mali de la crise, s’est enfin tenue le 11 février 2021, à Kidal. Un accouchement certes difficile, mais porteur d’espoirs puisqu’il aura fallu attendre pratiquement six ans pour voir les frères ennemis maliens s’asseoir autour d’une table pour se pencher sur la feuille de route tracée et signée de commun accord dans la capitale algérienne en 2015. La délégation venue de Bamako et qui ne comptait pas moins de six ministres dans ses rangs, était conduite par le Colonel Ismael Wagué, ministre de la Réconciliation nationale du gouvernement de Transition.  Le moins que l’on puisse dire,  c’est qu’au-delà de la symbolique de la ville rebelle du Nord qui accueille cette réunion des protagonistes de la crise malienne,  cette réunion est d’importance parce que non seulement la plupart des observateurs s’accordent à présenter l’Accord d’Alger, en panne d’application depuis sa signature, comme la voie de sortie de crise au Mali, mais aussi, comme le dit l’adage, « le plus long voyage commence toujours par un premier pas ».

 

Cette rencontre se tient au lendemain de la visite d’une forte délégation gouvernementale dans la capitale du Nord

 

 

C’est pourquoi l’on peut déjà se féliciter de la tenue effective de cette réunion qui se présente comme une étape importante sur le chemin du retour de la paix sur les rives du fleuve Djoliba, en espérant que cela permettra de briser le mur de la méfiance qui a souvent fait capoter, de par le passé,  les retrouvailles entre protagonistes autour de cette feuille de route. En tout cas, avec ces premières assises, il y a lieu de se demander si l’on va enfin vers le bout du long tunnel de la guerre qui a transformé le pays de Modibo Kéita en un véritable champ de bataille depuis qu’il est entré dans l’œil du cyclone djihadiste, il y a près de dix ans. C’est tout le mal que l’on puisse souhaiter au Mali, surtout aux populations qui souffrent le martyre, prises qu’elles sont entre plusieurs feux sans véritablement savoir… à quel protecteur se vouer.  Il est à noter que cette rencontre de Kidal se tient au lendemain de la visite d’une forte délégation gouvernementale, en fin janvier dernier, dans la capitale du Nord jadis zone interdite pour les autorités de Bamako. Elle se tient aussi au moment où des accords sont signés par-ci par-là sur le territoire national, entre groupes communautaires antagoniques, dont l’un des plus récents et des plus emblématiques reste encore celui entre Peuls et Dogons, dans un souci d’apaisement des tensions intercommunautaires qui viennent en rajouter à la complexité d’une situation sécuritaire délétère. Enfin, cette réunion de Kidal se tient à quelques jours de l’ouverture du sommet du G5 Sahel à N’Djamena, prévu le 15 février prochain, et où la question de la lutte contre le terrorisme sera une fois de plus au cœur des échanges entre les têtes couronnées de la bande sahélo-saharienne et leur partenaire français en plein spleen et au bord de l’essoufflement, au point, pour Paris, de chercher une nouvelle stratégie d’approche de la question. Autant de signaux qui devraient convaincre, si ce n’est déjà le cas,  les «conclavistes » de Kidal de la nécessité de « siffler » ensemble le thé de la paix, dans l’intérêt supérieur du pays.

 

Il est temps que les agendas personnels et partisans fassent enfin place à l’application stricte et au respect de la feuille de route d’Alger

 

Car, après huit ans de tiraillements au rythme du sifflement saccadé des balles des terroristes, la lassitude se lie à tous les niveaux au sein des populations. C’est pourquoi il faut espérer que cette réunion de Kidal autour de l’Accord de paix d’Alger qui se présente à bien des égards comme la thérapie au mal malien, en appellera d’autres. Car, aujourd’hui plus que jamais, seul le dialogue semble en mesure de sortir le Mali de la profonde crise qu’il traverse depuis bientôt une décennie. Les forces en présence ayant pratiquement fini de marquer leurs territoires, avec un Sud essentiellement maîtrisé par Bamako, un Nord encore fortement sous contrôle des groupes armés, et le Centre du pays largement disputé par les terroristes. Mais ce dialogue demande de la franchise et surtout de la sincérité dans les négociations, si l’on veut mettre fin à la danse du tango qui a jusque-là rythmé et rendu difficile, la mise en œuvre de cet accord. C’est dire s’il est temps que les agendas personnels et partisans fassent enfin place à l’application stricte et au respect de la feuille de route d’Alger. Et personne, mieux que les Maliens eux-mêmes, ne semble en mesure d’administrer cette thérapie de cheval au malade « Mali » pour lui permettre de se remettre de ses déchirures. Encore faudrait-il, pour cela,  que cette rencontre de Kidal qui ne pousse visiblement pas certains observateurs à l’optimisme, ne soit pas de la poudre de perlimpinpin destinée à donner le change, plutôt qu’une volonté réelle d’aller de l’avant dans la recherche de la paix. En tout cas, après l’échec de la tentative de réunion de 2019, on peut légitimement s’interroger si cette fois-ci encore, les choses ne vont pas finir par partir en vrille au point de renvoyer une fois de plus l’application de cet accord censé sortir le pays de l’impasse, aux calendes…maliennes. C’est une perte de temps et en somme, un luxe que le Mali ne peut pas se permettre.

 

« Le Pays »

 

 


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