HomeA la uneRIEK MACHAR AU SOUDAN : A quel jeu joue Béchir ?

RIEK MACHAR AU SOUDAN : A quel jeu joue Béchir ?


La longue pérégrination  de Riek Machar, frère ennemi du président Salva Kiir, évincé de la vice-présidence sud-soudanaise, après les étapes de la RD Congo et de l’Ethiopie, semble pour l’instant s’arrêter aux terres de Khartoum, au Soudan. Et l’escale pourrait être de longue durée. Car, à en croire le porte-parole du gouvernement soudanais, son hôte « restera dans le pays jusqu’à ce qu’il décide de partir ». Même si, officiellement, ce séjour à durée indéterminée de Machar, répond  à des mobiles  « humanitaires et  de soins médicaux », on se doute bien que le choix de Khartoum comme exutoire  par l’ex-numéro 2  sud-soudanais, répond à d’autres raisons plus profondes. D’abord, le Soudan est la cité-mère du Soudan du Sud et les liens ombilicaux entre les deux Etats, même s’ils sont passés par de fortes zones de turbulences, n’ont jamais été véritablement interrompus. Au nom des intérêts économiques réciproques liés à la manne pétrolière, Khartoum ne s’est véritablement jamais éloignée de la scène politique sud-soudanaise.  Omar El Béchir est, de ce fait, soupçonné de soutenir en sous-main  Riek Machar dans la guerre civile qui endeuille des milliers de familles dans le dernier-né des Etats du contient noir et a contraint à l’exil 2,5 millions de ses habitants.  Le vice-président déchu qui n’a plus la maîtrise du terrain, pouvait-il trouver meilleur asile que l’aile protectrice de son grand-frère et  parrain ? En tout cas, le gîte offert par El Béchir à Machar vient confirmer l’existence d’atomes crochus entre les deux seigneurs de guerre ; toute chose qui pourrait compliquer davantage les relations déjà tendues avec Juba dont l’indépendance, arrachée de force par les Américains,  est restée comme un os en travers de la gorge du Soudan.  Salva Kiir tient là un mobile supplémentaire pour conforter sa position dans la mise à l’écart de son rival dont l’exil khartoumais peut être vu comme un acte de conjuration avec l’ennemi. Mais plus que le président sud-soudanais, c’est bien  les affaires d’Omar El Béchir que les malheurs de Machar arrangent.

En plus de tenir en main le destin de Machar, Béchir tient désormais  en joue Juba

D’abord, parce que l’histoire semble lui donner raison. L’indépendance du Soudan du Sud lui avait été arrachée de mauvais gré et l’impossible paix pour l’instant dans le jeune Etat né à l’ombre de la guerre, prouve  qu’il n’était  pas viable. Ensuite, l’exil de Riek Machar sur le sol soudanais lui donne l’occasion, diplomatiquement, de reprendre la main dans le dossier sud-soudanais. L’homme mis au ban de la communauté internationale semble détenir aujourd’hui les cartes de la paix à Juba, là où cette même communauté internationale, sous l’égide des Etats-Unis et l’ONU, semble avoir mordu les carreaux.  Il devient un interlocuteur incontournable pour une sortie de crise car, non seulement il parle désormais aux deux parties ; en témoigne la visite officielle du tout nouveau vice-président sud-soudanais à Khartoum,  mais aussi il  semble disposer de moyens de coercition pour leur faire entendre raison.  En effet, en plus de tenir en main le destin de Machar, il tient désormais  en joue Juba dont la stabilité dépend de lui. Il peut, à tout moment, réarmer son homme et troubler le sommeil de Salva Kiir.

Mais, en attendant que Béchir abatte ses cartes, le président sud-soudanais peut se féliciter de l’exil de son rival qui a toutes les allures d’une victoire politique. A preuve, Taban Deng Gai étrenne déjà ses nouveaux atours de vice-président.

SAHO


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