HomeA la uneSITUATION NATIONALE : Quand la transition fait le jeu du camp Compaoré

SITUATION NATIONALE : Quand la transition fait le jeu du camp Compaoré


Depuis novembre 2014, le Burkina est engagé dans un processus de transition, suite à l’insurrection populaire de fin octobre de la même année, qui a conduit à la chute et à la fuite de Blaise Compaoré, réfugié depuis lors en Eburnie. Mais, l’euphorie passée, le processus qui doit prendre fin en octobre prochain, avec l’élection d’un nouveau président du Faso, a du mal à véritablement prendre son envol, et à montrer une véritable rupture avec les pratiques de l’ancien régime. Pire, par moments, il tangue dangereusement, si fait que l’on a l’impression que la transition, consciemment ou inconsciemment, travaille à ramener Blaise Compaoré aux affaires.

Blaise Compaoré se croit irréprochable

En effet, plus de quatre mois après sa chute, ni Blaise Compaoré, ni aucun de ses partisans fieffés n’ont été officiellement inquiétés. Mieux, l’on constate un regain d’activisme de ses partisans qui recommencent à reprendre du poil de la bête. Surtout que son parti, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), qui avait été un moment suspendu, a vu sa suspension levée. Ce qui, pour eux, est une réhabilitation, étant donné qu’ils sont libres de mener tranquillement leurs activités et même de prendre part aux scrutins à venir. Du reste, l’ex-opposition, qui ne s’imaginait certainement pas retrouver de sitôt le CDP et ses alliés sur son chemin, avait fait dans le démocratisme, en s’offusquant de cette suspension de l’ex-parti au pouvoir, appelant à sa réintégration dans le jeu politique, au nom de l’inclusion.
Mais c’était mal connaître Blaise Compaoré et ses partisans qui, dès lors qu’aucune poursuite n’a été officiellement engagée contre eux, se prennent à rêver d’un retour immédiat aux affaires, comme si de rien n’était. Aidés en cela par la naïveté des acteurs de la révolution qui ont cru qu’ils tireraient eux-mêmes les leçons des événements d’octobre dernier pour s’astreindre à une ligne de conduite responsable. Que nenni !
Aussi, pendant que ses partisans s’activent à occuper le terrain jusque dans les derniers hameaux du pays en vue de reconquérir dans quelques mois ce qu’ils ont perdu, Blaise Compaoré s’est confortablement installé à Abidjan où il mène le combat de son côté. Entre audiences accordées à des pontes de son parti et d’autres personnalités, Blaise Compaoré, qui rumine sa vengeance, est en train de fourbir ses armes pour revenir, comme le chantent d’ailleurs à cor et à cri certains de ses partisans qui parlent même d’organiser une caravane pour aller lui remonter le moral. Tout cela, au vu et au su de tout le monde, sans que les autorités ne daignent donner de la voix. Surtout qu’apparemment, Blaise Compaoré ne s’astreint pas au droit de réserve qui est généralement celui des réfugiés politiques. C’est pourquoi, les organisations de la société civile ont raison de demander la clarification du statut de Blaise Compaoré. S’il n’est pas un réfugié politique, c’est qu’il se croit en villégiature au bord de la lagune Ebrié ou qu’il y a observé un repli tactique dans l’objectif de revenir. La Côte d’ivoire ne peut pas se prêter à ce jeu. Etant donné que si rien ne l’en empêche, Blaise Compaoré a les moyens financiers et surtout les réseaux pour parvenir à ses fins.
Au demeurant, si des poursuites avaient été engagées contre lui, il est fort probable qu’il ne serait peut être pas resté aussi près de son pays, surtout pas en Côte d’ivoire, pour ne pas mettre son ami Alassane Ouattara dans l’embarras d’une éventuelle demande d’extradition du Burkina. Mais comme rien ne lui est officiellement et formellement reproché, Blaise Compaoré se croit irréprochable et il a raison de vouloir revenir au bercail. Tout comme son frère François et la belle-mère nationale qui ne cache pas son mal du pays, et toute leur suite. D’autant plus qu’on ne les a pas chassés, mais qu’ils ont quitté le pays pour leur propre sécurité physique.

On a été trop loin dans la relâche

Une fois de plus, la transition paye le prix de ses péchés originels. En manquant de s’assumer après la démission de Blaise Compaoré, l’ex-opposition n’a pas joué son rôle jusqu’au bout. Elle n’a pas su gérer un grand acquis que l’histoire lui a donné, se contentant du satisfecit de la fuite de Blaise Compaoré qu’elle n’osait imaginer, même en rêve. C’était déjà un « happy end » pour elle. C’est donc sans surprise que face à une opposition déroutée, déboussolée et non préparée, l’armée est venue à la rescousse pour ramasser cette manne tombée du ciel et prendre les choses en main. La suite, on la connaît, avec toutes ces personnes jugées proches du clan Compaoré, qui tentent de récupérer la transition ou qui sont en train de revenir, par des chemins insidieux, aux affaires. C’est pourquoi l’on peut dire que l’ex-opposition et la société civile ont manqué de vision et de vigilance, pour avoir été les principaux acteurs de la lutte qui a conduit à la chute de Blaise Compaoré. Elles auraient pu profiter de la situation pour mieux baliser le terrain.
Toutefois, en prônant l’inclusion, la transition avait peut-être des idées nobles, en termes de réconciliation entre Burkinabè. Mais, au regard de l’évolution de la situation, il est évident qu’elle s’est laissé piéger, parce que l’on a le sentiment que les bourreaux d’hier se sentent une virginité en termes de responsabilité dans le drame vécu. Si bien que non contents de n’avoir pas fait leur sincère mea culpa, certains n’ont pas mis de l’eau dans leur discours d’arrogance qui avait, entre autre, contribué à dégrader fortement la situation. Et ce, nonobstant les pertes en vies humaines. Pourtant, hier encore, ces gens rasaient les murs. Mais aujourd’hui ils sont tous sortis de leurs cachettes et évoluent au grand jour, aidés en cela par l’impunité totale dont ils jouissent. Comment, dans ces conditions, s’étonner qu’ils nourrissent des ambitions de revenir aux affaires ? Ailleurs et dans d’autres circonstances, à défaut de les mettre aux arrêts, on les aurait au moins gardés en résidence surveillée ou entamé des procédures qui réduiraient leur capacité de nuisance. Mais ici, l’on a été trop loin dans la relâche, si bien que l’on se demande aujourd’hui comment mettre des balises, face à certaines dérives, pour ne pas remettre le feu aux poudres. Car, il y a des signes qui ne trompent pas. En effet, les comportements de certains acteurs de l’ex-majorité commencent à agacer une partie des révolutionnaires d’octobre dernier.
C’est pourquoi il convient de voir comment arrêter les choses pendant qu’il est encore temps. Autrement, l’on pourrait ouvrir un boulevard à Blaise Compaoré, et courir le risque d’une deuxième révolution dont la seule pensée des conséquences donne des frissons. De ce point de vue, on peut être d’accord avec le Pr Laurent Bado qui prédisait, dans ces mêmes colonnes, que le pire reste à venir. Il pensait sans doute à une deuxième insurrection populaire aux effets plus tragiques. Les autorités sont donc interpellées.

« Le Pays »


Comments
  • Belle analyse de la situation. Il arrive qu’on se pose cette question: y a-il un deal secret au plus de la transition pour qu’une enquête ne soit pas ouverte sur les tueries des 30 et 31 octobre 2014!? La question mérite d’être posée puisque le commandant en second du rsp est aujourd’hui premier ministre de la transition, or c’est vers le rsp que tous les regards se tournent quand on parle de la répression des manifestations qui ont conduit à la chute du régime.

    13 mars 2015
  • Les autorités de la transition n’ont pas plein pouvoir pour travailler. Elles ne sont pas libres. L’éléphant annoncé est arrivé avec un pays cassé. Comprenne qui pourra.

    13 mars 2015
  • C’est avec le cœur serré que je mette un commentaire sur cette belle analyse.
    En effet, tout porte à croire que nos enfants sont morts pour rien. Et que justice ne sera jamais faite dans ce pays.
    Mais, que les pilleurs du passé qui rêvent de leur de retour sachent, qu’ils sachent donc, que le peuple ne portera pas de gants. LES COUPS SERONT SECS ET PLUS DUR LA PROCHAINE FOIS.
    Nous accepterons de mourir plus nombreux, que ceux qui nous ont devancé les 30 et 31 octobre, pour que notre cher Faso soit vraiment libre et débarrassé de la gangrène.
    S’ils pensent vraiment qu’ils vont revenir, parce qu’ils n’ont pas du tout été physiquement inquiétés, qu’ils viennent. Ils nous trouveront sur leur route.
    Ceux qui veulent organiser une caravane pour aller prendre de l’argent avec blaise, n’ont qu’à la faire, là aussi ils reviendront nous trouver sur leur route.
    Puisque ce gouvernement transitoire de la transition transitoire est entrain de transiger avec les criminels impunis, qui se pavanent dans le pays, ne peut pas prendre ses responsabilités, alors, nous vaillant peuple, nous les prendront, car maintenant, NOUS AVONS SURTOUT ET SURTOUT PEUR DE VIVRE.

    LA PATRIE OU LA MORT, NOUS VAINCRONS !

    13 mars 2015
  • Ménager la chèvre et le choux à la fois est l’exercice périlleux auquel sont se sont astreints dès leur installation les autorités de la transition en transigeant avec un certains nombre de principe simple d’une prise de pouvoir post-insurrectionnel.
    Aujourd’hui personnes ne semble satisfait d’eux; ni le CDP, ni les OSC, encore moins l’ex CFOP.
    Pire des gens sont en passe de connaître plus d’injustice avec la transition qu’avec la dictature crasse de Blaise.
    Dieu sauve notre beau et cher patrie, le Burkina Faso.

    13 mars 2015
  • D’abord gérer un État est différent de la gestion par exemple d’un ménage ou bien d’un lieu de culte là ou quand on vous frappe sur un joue; il faut tendre l’autre joue pour recevoir un autre coup dans un sentimentalisme béat; qui friserait à notre avis de l’aberration ! Du reste des gens l’on déjà dit; l’inclusion ne veut pas dire impunité! Sur les dossiers de crimes économiques; de crimes politiques et de crimes de sang il faut prendre des mesures idoines pour que les auteurs si ils sont reconnus par la justice comme des coupables alors que des sanctions soient prises à leurs encontre ! il ne faut pas transiger avec les principes de la justice car ça pourrait retourner contre la transition et contre l’insurrection populaire au cours desquelles des burkinabé innocents ont payé le prix fort c’est dire de leur vie! Voila; les assoiffés de pouvoir et leur affidés nous narguent comme si la jeunesse militante et insurgée en octobre 2014 s’était révolté et d’autre perdu la vie pour rien! Non il faut se ressaisir et avancer dans la direction indiquée par le peuple en octobre dernier! Salut !

    14 mars 2015
  • Belle analyse cher journaliste,
    premièrement ,il faut que tout le monde sans exception accepte que cette transition navigue a vue et est dirigée par un groupuscule de militants MPP revêtu en OSC qui font la pluie et le beau temps au détriments de ceux qui ont mené la lutte. tout le monde voit mais personne ne dis mot.
    Deuxièmement, le burkinabé qui a soif de la justice devra savoir que certains autorités de la transition ont pris gout au privilège et donc ne pourra prendre des mesures qui pourrait s’appliquer à eux juste après leurs mandats: prenez le délit d’apparence qui pourrait frapper certains de nos OSC qui mine de rien sont devenus de richissimes personnalités tout juste après l’insurrection, les activités mené spontanément par les OSC qui les finances et les parrains qu’elle est la source de leur richesse. Voila autant de question que le citoyen doit se poser ou s’il veut mieux vivre, vaquer a ses occupations.
    des conseils de ministre extraordinaire pour reconduire des projet de l’ancien régime et dire que vous voulez réduire la pauvrette mon oeil soyons vigilant car c’est les dirigents des OSC aquis a la cause de certains autorités de la transition qui vont en beneficier pour leur copines puisque c’est devenu la mode au niveau de la Transition de la prostitution qui ne dit pas son nom .

    18 mars 2015

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