ULTIMATUM ONUSIEN AUX PROTAGONISTES DE LA CRISE MALIENNE : Un coup d’épée dans l’eau ?
Face à l’absence de progrès notable dans la résolution de la crise malienne, l’Organisation des nations unies a fini par montrer son agacement. En effet, elle est sortie du bois et a tapé du poing sur la table, menaçant explicitement le pays de Soundiata Keïta de sanctions, si d’ici à la fin du mois de mars prochain, il n’y avait pas d’évolution significative dans l’application de l’accord de paix de la capitale algérienne, signé à la mi-2015 à Bamako. Un ultimatum qui sonne comme un coup de semonce visant à accentuer la pression sur les protagonistes de la crise, dans le but de faire bouger les lignes. Morceau choisi. « Les parties maliennes ont pris des engagements récents importants, ce que nous saluons. Il faut maintenant traduire ces paroles en actes. Et à défaut, le Conseil devra prendre ses responsabilités, y compris en utilisant des sanctions tel qu’il est prévu par la résolution 2374 », a lancé le représentant de l’Elysée à l’ONU, François Delattre.
Il était temps que l’ONU sonne la fin de la récréation
En attendant de savoir jusqu’où ira la prise de ces responsabilités, le moins que l’on puisse dire, c’est que cet ultimatum de l’ONU est le bienvenu, tant les lignes peinent à bouger dans la résolution de cette crise qui n’a que trop duré et qui continue de piétiner, malgré les moyens colossaux déployés pour le retour de la paix au Mali. En cause, la mauvaise foi des différents protagonistes qui se sont lancés dans une danse du tango qui se traduit presque toujours par un retour en arrière, à chaque fois que l’on pense avoir fait des progrès dans le sens de la résolution de la crise. Il était donc temps que l’ONU sonne la fin de la récréation, car il est difficile de continuer à porter à bout de bras des gens qui ne montrent aucune volonté réelle de sortir de leur situation de belligérance, et qui semblent même s’y complaire au point que l’on est porté à croire qu’ils y ont des intérêts cachés. L’on avait peut-être naïvement cru en leur bonne foi, mais ils ont largement eu le temps de faire la preuve du contraire. Il est donc temps de sévir et de la façon la plus musclée qui soit. Car, ce sont ces gens-là qui sont les véritables ennemis de la paix au Mali et que l’ONU cherche visiblement à mettre au pas. C’est de bonne guerre. Et tout le mal que l’on peut souhaiter à l’organisation internationale, c’est d’arriver à imposer la marche irréversible d’une paix durable au Mali, pour une sortie définitive d’une crise dont les populations commencent à se lasser ; elles qui en payent déjà malheureusement le prix fort. Mais en même temps, la question que l’on pourrait se poser est de savoir si cette menace n’est pas un coup d’épée dans l’eau. Car, à moins de mesures vraiment draconiennes et autrement coercitives, si les sanctions devraient se limiter aux traditionnels gels des avoirs et autres interdictions de voyager, l’on ne voit pas comment cela pourrait véritablement amener les protagonistes maliens à plus de sincérité dans la mise en œuvre de l’accord d’Alger censé tracer la voie de sortie de crise et pour lequel ils se sont librement engagés. C’est dire si c’est menace pourrait couler sur eux comme de l’eau sur les plumes d’un canard. Du reste, les Maliens peuvent-ils réussir en deux mois ce qu’ils ont échoué à réaliser en plus de deux ans ? Rien n’est moins sûr. Car, à quelque six mois des échéances électorales, la classe politique malienne semble plus préoccupée par la présidentielle à venir que par la mise en œuvre de cet accord qui ressemble plus à un boulet qu’à autre chose au pied de Bamako.
Il est grand temps que cesse le jeu d’hypocrisie de certaines grandes puissances
C’est pourquoi l’on peut nourrir un certain scepticisme quant à la capacité de cet ultimatum à faire bouger les lignes dans le sens souhaité par l’ONU. Car, comme on le sait, la mauvaise foi semble devenue la chose la mieux partagée entre les protagonistes maliens. Et tant que l’on sera dans un tel schéma, il serait illusoire de penser à une sortie de crise, si l’ONU ne donne pas plus de poids à ses menaces. C’est pourquoi elle devrait se préparer à joindre l’acte à la parole, en n’hésitant pas à mettre ses menaces à exécution pour envoyer un message fort à toutes les parties. Et elle en a les moyens. Autrement, l’on peut être fondé à croire que ces agitations de la communauté internationale ne sont que de la poudre aux yeux destinée à se donner bonne conscience. D’autant plus que certaines sources ne cessent d’indexer le jeu trouble de certaines grandes puissances, pour leurs accointances supposées ou réelles avec des groupes armés, dans ce conflit malien qui est loin d’avoir révélé tous ses dessous. Cela, pour leurs propres intérêts.
Par conséquent, s’il est vrai que les Maliens doivent mettre de l’eau dans leur thé pour se donner des chances de sortir de la crise, il est aussi grand temps que cesse le jeu d’hypocrisie de certaines grandes puissances dans ce conflit malien. Autrement, c’est à un jeu de dupes que l’on s’adonne et cela ne conduira nulle part qu’à un enlisement de la situation.
« Le Pays »