HomeA la uneNOUVEAU GOUVERNEMENT NIGERIAN:Quand Buhari veut faire du neuf avec du vieux

NOUVEAU GOUVERNEMENT NIGERIAN:Quand Buhari veut faire du neuf avec du vieux


Réélu en février dernier pour un second mandat, le président nigérian, Muhammadu Buhari, a fait connaître son nouveau gouvernement le 21 août dernier, après trois mois d’exercice solitaire du pouvoir depuis sa prestation de serment en mai dernier.  Si ailleurs sur le continent ou même dans le monde, un tel délai pour la formation d’un gouvernement peut sortir de l’ordinaire, au Nigeria, cela semble anecdotique.

En effet,  pour son premier mandat en 2015, le locataire du Presidential Villa, du nom du palais d’Abuja, avait déjà mis plus de cinq mois pour former son  équipe gouvernementale. A l’époque,  il disait vouloir s’assurer de la probité morale de ses collaborateurs mais justifiait surtout le retard dans la formation de l’Exécutif par la nécessité de « mettre la bonne personne au bon endroit ». Est-ce pour les mêmes raisons qu’il a encore traîné le pas cette fois-ci ? Bien malin qui saurait le dire.

 Buhari et son gouvernement sont attendus au tournant

En attendant, le premier constat que l’on peut faire, c’est que le nouveau gouvernement compte 43 membres, contrairement à l’équipe du premier mandat qui  en comptait 36. Cela s’explique en partie par le fait que le président a divisé en deux certains ministères, comme par exemple l’Aviation qui est désormais séparée des Transports ou encore l’Electricité qui est séparée des Travaux et de l’habitat. Et il a créé trois nouveaux départements que sont le ministère des Affaires policières, celui des Devoirs

spéciaux et celui de la Gestion des affaires humanitaires et des catastrophes.  Toutefois, le président Buhari continue de concentrer entre ses mains, le ministère hautement stratégique du Pétrole. De même, les titulaires des portefeuilles des Affaires étrangères, des Finances, des Transports et du Logement ont vu le chef de l’Etat leur renouveler sa confiance aux mêmes postes. Dix autres membres de l’ancienne équipe ont connu un jeu de chaises musicales ; ce qui porte à 14, le nombre des ministres reconduits dans le nouveau gouvernement. Les autres sont des caciques du parti au pouvoir, l’APC (le Congrès des progressistes), qui ont roulé leur bosse à différents niveaux de responsabilités de l’administration nigériane.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que Buhari veut faire du neuf avec du vieux. D’autant que la majorité des ministres, quand ils ne sont pas issus de l’ancienne équipe,  sont des hommes du sérail dont la moyenne d’âge tourne autour de soixante ans, et qui brillent par leur ancienneté sur la scène politique nigériane.  Comment, dans ces conditions, ne pas comprendre les vives critiques de Nigérians gagnés par le doute qu’une telle équipe puisse aller à des réformes profondes pour aboutir au changement tant espéré ? C’est dire si le président Buhari et son gouvernement sont attendus au tournant.

Et l’on attend de voir la coloration de ce second mandat, constitutionnellement le dernier pour Buhari, quand on sait que les défis restent énormes et se traduisent principalement en termes  de sécurité, de lutte contre la corruption et de relance économique. Et comme sa santé n’a pas toujours été au rendez-vous et ne lui a pas permis d’être en permanence au front lors de son précédent mandat, on espère que le valétudinaire président placera ce second mandat sous le signe du rachat et travaillera surtout pour l’Histoire et s’emploiera  à mettre sur orbite un dauphin pour qui parlera son bilan.

 On espère que le casting aura été le bon

Car, les attentes de ses compatriotes sont nombreuses, avec une demande sociale toujours très forte, dans un contexte économique difficile. En effet, après quatre ans passés à la tête de l’Etat, le général putschiste qui a toujours clamé haut et fort que la corruption n’a pas de place dans son gouvernement, doit se rendre compte qu’il a encore bien du chemin à parcourir pour venir à bout de ce fléau qui gangrène véritablement son pays.

Si l’intégrité du chef de l’Etat lui-même n’est pas en cause, ce dernier a semblé montrer des signes de faiblesse voire d’impuissance dans la lutte contre la corruption. Ainsi, non seulement les milliards de francs détournés qu’il promettait de récupérer sont loin de l’avoir été, mais aussi le président Buhari est soupçonné d’épargner certains de ses proches, des enquêtes. Pendant ce temps, sur le plan sécuritaire, la secte islamiste Boko Haram continue de donner du fil à retordre à l’armée nigériane et de donner des insomnies aux populations qui ne savent plus véritablement à quel saint se vouer. En effet, pas plus tard que le 27 juillet dernier, 65 Nigérians périssaient dans deux attaques dans le Nord-Est du pays. Quelques semaines plus tôt, à la mi-juin, c’est un triple attentat kamikaze qui faisait une trentaine de morts à Konduga, à une quarantaine de kilomètres de Maïduguri, la capitale de l’Etat de Borno.

C’est dire toute l’immensité de la tâche qui attend le nouveau gouvernement, pour relever le défi sécuritaire qui est l’une des priorités du chef de l’Etat. Ce, au moment où l’économie n’est pas non plus au mieux de sa forme et montre, par moments, des signes d’essoufflement. Buhari est donc attendu au pied du mur. Et l’on espère que son casting aura été le bon, car c’est aux résultats que ses compatriotes le jugeront.

 « Le Pays »

 

 


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