19E JOURNEE NATIONALE DU PAYSAN : Sous le signe de la lutte contre le chômage
La 19e édition de la Journée nationale du paysan s’est tenue du 28 au 30 avril 2016, sous le thème : « Agriculture et lutte contre le chômage : développer et soutenir l’entrepreneuriat agro-sylvo-pastoral, halieutique et faunique pour l’insertion socio-professionnelle des jeunes ». La cérémonie officielle d’ouverture de ladite journée a eu lieu le 29 avril, en présence du président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré. Etaient également présents, le Premier ministre Paul Kaba Thiéba, des présidents d’institutions, des membres du gouvernement et des producteurs venus nombreux pour la circonstance.
Quelles sont les opportunités à saisir pour le développement de l’entrepreneuriat agro-sylvo-pastoral, halieutique et faunique, dans la lutte contre le chômage, surtout des jeunes et des femmes ? Quelles sont les mesures et actions à promouvoir pour réussir l’entreprise agricole ?
C’est autour de ces questions que s’est tenue la 19e édition de la Journée nationale du paysan (JNP) à Tenkodogo, du 28 au 30 avril dernier, sous le thème : « Agriculture et lutte contre le chômage : développer et soutenir l’entrepreneuriat agro-sylvo-pastoral, halieutique et faunique pour l’insertion socio-professionnelle des jeunes ». A la cérémonie d’ouverture le 29 avril dernier, après le mot de bienvenue du gouverneur du Centre-Est, Ousmane Traoré, ce fut au tour du président de la Chambre nationale d’agriculture, Seydou Naaba Ouédraogo, de rappeler que le monde rural représente plus de 80% de la population du Burkina, avec une importante frange de jeunes et de femmes. Pour lui, la création d’emplois dans le secteur agro-sylvo-pastoral, halieutique et faunique représente un enjeu majeur et constitue une des réponses plausibles pour la réduction de la pauvreté, la baisse du chômage, la préservation de la cohésion et de la paix sociale au Burkina. « Au regard de la jeunesse de la population burkinabè, du rôle et de la contribution de l’agriculture au PIB au Burkina Faso, une politique innovante de création d’emplois agricoles s’avère impérative. Cette politique doit faire partie intégrante des piliers de la stratégie du développement de l’entrepreneuriat agro-sylvo-pastoral, halieutique et faunique », a relevé Seydou Naaba Ouédraogo.
70 personnes décorées
Il a aussi dit qu’autant le secteur agricole offre des opportunités d’emplois, autant de nombreuses contraintes minent le monde rural, notamment la faible productivité dans les exploitations, la faible valorisation des produits, la faible capacité d’investissement et un savoir-faire basé sur des technologies rudimentaires.
Pour sa part, Aristide Ongone Obame, représentant du Fonds des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), a relevé que le thème de la 19e JNP répondait aux travaux de la 28e conférence régionale de la FAO pour l’Afrique, tenue en 2014 et consacrée à « la jeunesse africaine et au développement agricole et rural ». A l’en croire, la transformation de l’agriculture en un secteur moderne est susceptible d’attirer la jeunesse. Mais, a-t-il ajouté, au regard des difficultés qui dissuadent les jeunes, telles les difficultés d’accès à la terre et aux financements, il est important de créer un environnement favorable à l’implication effective des jeunes dans les politiques et programmes de développement agricole et rural par la prise de mesures appropriées. Le ministre de l’Agriculture et des aménagements hydrauliques, Jacob Ouédraogo, a, quant à lui, relevé la particularité de cette 19e édition de la JNP, « empreinte des nouvelles valeurs sociales et démocratiques qui imprègnent désormais l’ensemble du peuple burkinabè depuis l’insurrection populaire d’octobre 2014 ». Parlant des spécificités de cette 19e JNP, le ministre Jacob Ouédraogo a rappelé que les paysans ont été responsabilisés dans l’organisation de celle-ci. Aussi, l’accent a été mis sur les fora régionaux pour permettre de traduire les préoccupations à la base. Il a également signifié que des réflexions seront entreprises pour donner un nouveau format à la JNP, plus adapté aux aspirations des producteurs. Pour Jacob Ouédraogo, le thème « Agriculture et lutte contre le chômage : développer et soutenir l’entrepreneuriat agro-sylvo-pastoral, halieutique et faunique pour l’insertion socio-professionnelle des jeunes », conforte la volonté du gouvernement de lutter contre le chômage des jeunes. S’il y a un secteur qui est potentiellement en mesure d’absorber en grande partie les jeunes, a confié Jacob Ouédraogo, c’est certainement le secteur rural. Car, il regorge d’énormes potentialités qu’il faudrait transformer en opportunités d’emplois. La cérémonie d’ouverture de la JNP a également été l’occasion pour la Nation de reconnaître et de récompenser le travail de certains de ses fils qui œuvrent au développement rural. En effet, 70 personnes ont été faites Chevalier de l’Ordre du Mérite du développement. Avant l’ouverture officielle de la foire et la visite des stands par les officiels, le président du Faso a remis des semences améliorées aux producteurs.
Dans la soirée du 29 avril, le président Roch Marc Christian Kaboré a effectué des visites de terrain, à Bagré. Il s’est d’abord rendu sur le site du barrage hydroélectrique et hydroagricole de Bagré, puis dans une ferme semencière d’un groupement de 33 producteurs. Le président du Faso a également visité l’Unité diocésaine du riz de Bagré (URDIBA PLUS) et la Ferme laitière avicole et agricole (FLAVIA) de Tenkodogo.
Thierry Sami SOU
LES A-COTES DE LA CEREMONIE
Beaucoup de cadeaux pour les autorités
Lors de la cérémonie d’ouverture de la JNP, les autorités ont reçu plusieurs cadeaux. Le président du Faso a reçu un bœuf des mains du roi de Tenkodogo. Le président de l’Assemblée nationale a, quant à lui, reçu un bélier, tout comme le Premier ministre, Paul Kaba Thiéba. Les ministres concernés par la JNP, à savoir celui en charge de l’agriculture, le ministre en charge des ressources animales, celui en charge de l’environnement, le ministre de l’Enseignement supérieur, de la recherche scientifique et de l’innovation et celui en charge de l’Eau, ont reçu une tonne de riz.
Aussi, lors de la visite des sites, le président du Faso a reçu un bélier, un coq et du riz.
Le vent s’est vainement opposé à la tenue de la foire
A 2 reprises, le vent a mis sens dessus dessous les stands de la foire d’exposition. Dans la nuit du 27 avril, la pluie, accompagnée de vents forts, a fait s’écrouler les stands, au grand dam des exposants. Et cela s’est répété dans la nuit du 28 avril. Mais c’était sans compter avec la détermination des organisateurs qui ont tout remis en ordre avant le début de la foire.
Différence de traitement entre journalistes
Pendant que les organes éditant à Ouagadougou avaient annoncé à leurs correspondants de Tenkodogo que les organisateurs de la JNP les prendraient en charge sur le plan financier, ces derniers ont été désillusionnés lorsque le Directeur de la communication et de la presse ministérielle du ministère de l’agriculture leur a signifié qu’il ne prenait en charge que les journalistes venus de Ouagadougou. Il leur a demandé de se référer au comité régional d’organisation de la JNP qui, visiblement, n’avait pas les ressources nécessaires pour gérer les journalistes « locaux». Ces derniers ont donc dû collecter et traiter l’information à leurs propres frais. Pourtant, le problème avait été posé en conférence de presse, et le ministre en charge de l’agriculture avait dit qu’il n’était pas question de faire une quelconque discrimination au préjudice des journalistes locaux qui devraient être pris en compte dans les prises en charge.
Le président à propos des mandats d’arrêt
En marge de la 19e JNP, Roch Marc Christian Kaboré s’est prononcé sur l’annulation des mandats d’arrêt par la Cour de Cassation. Voilà ce qu’il a dit : « Du fait qu’il y a la séparation des pouvoirs, je ne peux pas me permettre de commenter une décision de Justice. Mais ce que je peux dire, c’est que dans leurs rêves les plus fous, ni Blaise Compaoré ni ceux qui ont fait le coup d’Etat, ne pensent que nous allons lever les mandats d’arrêt pour donner une suite à l’impunité et à la déstabilisation de notre pays. Vous pouvez en être sûrs. Je ne pense pas qu’eux-mêmes rêvent à cela. Cela, pour simplement dire et sans rentrer dans les commentaires qu’il faut faire confiance à la Justice. Depuis la refondation de celle-ci, nous avons décidé d’assumer la séparation des pouvoirs. C’est pourquoi ni le président du Faso ni le ministre de la Justice ne font partie du Conseil supérieur de la magistrature. J’ai foi en la Justice et ce qui a amené Blaise Compaoré à quitter le pays et à se naturaliser ivoirien reste un problème pour lequel il va revenir répondre au Burkina Faso. Il n’y a pas d’autre choix. C’est la base même de l’insurrection populaire. Je pense qu’il n’y a pas à avoir peur, tout va rentrer dans l’ordre ».
TS et MN
(Correspondant)
QUELQUES PROPOS DE PARTICIPANTS
Roch Marc Christian Kaboré, président du Faso
« Sur le plan du principe, nous devons moderniser notre agriculture. Nous ne pouvons pas continuer à cultiver à la daba et penser pouvoir nourrir le Burkina Faso. Cela veut dire une meilleure organisation, une meilleure sélection des semences, de meilleurs moyens matériels, notamment des tracteurs, pour permettre à nos agriculteurs de cultiver de plus grandes superficies. Je l’ai souvent dit, l’agriculture et l’élevage sont la base de notre économie. Ce sont également les domaines dans lesquels nous pouvons créer le maximum d’emplois, aussi bien dans la production que dans la transformation des produits. Comme vous le savez, nous avons dit que pour ajouter de la valeur, il fallait mettre en place des PME/PMI de transformation. La visite de la foire confirme qu’il y a beaucoup de potentialités. Il suffit de se structurer et d’expliquer aux Burkinabè, à la jeunesse surtout, qu’il n’y a pas de sot métier. Il suffit d’y croire et de s’engager. Il suffit également que le gouvernement mette en place les infrastructures pour appuyer financièrement les uns et les autres pour qu’on puisse être producteur et pourvoyeur d’emplois. Dans l’agriculture, il y a beaucoup à faire pour l’emploi des jeunes. Et nous allons nous atteler à prendre les dispositions qui pourront les encourager dans ce sens. »
Abdoulaye Sawadogo, président de l’Union des producteurs semenciers du Burkina et SG de la Confédération paysanne du Faso
« Les semences que nous venons de recevoir ont beaucoup d’importance pour les producteurs burkinabè, d’autant qu’elles sont de variétés améliorées. Elles sont adaptées à notre climat. C’est l’occasion de faire connaître aux producteurs l’existence de ces nouvelles variétés, adaptées aux changements climatiques.
La JNP est un très bon exemple dans la sous-région. La JNP est vraiment importante pour nous. C’est une rencontre familiale où chacun arrive à s’exprimer, à dire ses préoccupations et à prendre des engagements pour améliorer ce que nous faisons. On espère améliorer ainsi les conditions de vie des producteurs et de tous ceux qui consomment ce que nous produisons. Cette rencontre est donc très importante et unique en son genre. C’est la raison pour laquelle des pays de la sous-région prennent exemple sur le Burkina et c’est une fierté pour nous ».
Parlant de ses attentes quant à la JNP
« Nous avons besoin de beaucoup de choses. Par exemple, pour l’agriculture familiale qui est très présente au Burkina, il faut un changement. Il faut propulser les petits producteurs à un niveau supérieur et cela passe par la mécanisation. C’est par cette voie que l’Etat pourra accompagner ces producteurs. Et nous pensons qu’il a en ligne de mire la transformation de l’agriculture. Nous attendons donc de voir la suite. »
Orokia Barry, région du Sahel
« J’espère que les attentes des producteurs seront réellement prises en compte, notamment dans l’agriculture. Le président de la Chambre nationale d’agriculture a évoqué un certain nombre de problèmes tel le difficile accès des femmes et des jeunes à la terre. J’espère qu’une solution sera trouvée pour satisfaire les préoccupations des producteurs. Par rapport à l’organisation de cette 19e édition, je la trouve meilleure que les précédentes. Je félicite d’ailleurs les organisateurs. »
Naaba Seydou Ouédraogo, président de la Chambre nationale d’agriculture
« Les défis du monde agricole sont nombreux. Aujourd’hui, c’est de pouvoir produire en quantité et en qualité. Il est également nécessaire d’arriver à transformer les produits pour l’exportation. Ce n’est que par-là que nous pouvons développer le secteur rural et l’agriculture.
La JNP est un moment de rencontre, d’échanges d’idées. C’est la seule rencontre qui réunit les producteurs agro-sylvo-pastoraux des 45 provinces du pays. La JNP permet de discuter des problèmes que nous rencontrons, et de les soumettre aux autorités. Cela a l’air folklorique dans certains de ses aspects, mais nous arrivons à sortir quelque chose de concret, chaque fois qu’on se rencontre.
Parlant de la mise en œuvre des recommandations des éditions passées de la JNP, il faut reconnaître qu’il y a eu des problèmes de suivi et d’accompagnement qui l’ont entravée. Nous avons quand même engrangé des résultats, à hauteur de plus de 60% d’application, notamment pour les engagements de la 18e JNP.
Pour les prochaines éditions de la JNP, il faut une structuration afin de diminuer les participants pour mieux les encadrer. Cela permettra de leur faire prendre réellement conscience du but de la JNP. Actuellement, c’est un marché et c’est difficilement gérable. Aussi, à la JNP, la moitié des participants sont des fonctionnaires, alors que c’est un même budget qui prend tout le monde en charge. Il serait intéressant que chaque ministère s’engage davantage et voie comment il peut accompagner le monde rural. Même si le budget est réduit, avec l’aide de ces ministères, on peut aboutir à un meilleur résultat. »
TS et MN (correspondant)
SANON Eis
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Beau tout ça mais pour quel résultat?
13 mai 2017