HomeA la uneSITUATION NATIONALE : Quand la détermination du peuple prend le dessus

SITUATION NATIONALE : Quand la détermination du peuple prend le dessus


La population burkinabè était dans la rue hier 30 octobre 2014,  conformément à sa promesse d’empêcher les députés de voter la loi portant révision de la Constitution.  Les manifestants  ont bravé les  dispositifs  des forces de l’ordre, pour assiéger l’Assemblée nationale qu’ils ont incendiée par la suite.

Déterminés, courageux et téméraires, tels sont les qualificatifs que certains ont  attribués  aux manifestants qui ont pu empêcher le vote du projet de loi portant modification de l’article 37 de la Constitution, hier 30 octobre 2014. 

8h 00 minute. La tension monte d’un cran à la place de la Nation. Les manifestants décident de foncer vers l’Assemblée nationale où le projet de loi devait être voté par la représentation nationale. « N’ayons pas peur », disaient certains manifestants.  « Bougeons ! S’ils le veulent, qu’ils nous tuent tous, mais nous  ne voulons pas de cette loi », disait un autre.  A ce moment précis, des camions sur lesquels l’on lisait « Gendarmerie nationale »   font leur apparition. Ils sont suivis  de camions transportant des éléments de la Compagnie républicaine de sécurité (CRS).  Une course-poursuite s’est alors engagée entre les forces de l’ordre et les manifestants.

 8h30. La foule semble être déterminée à foncer, coûte que coûte, vaille que vaille, vers l’Assemblée nationale. Face à elle, des forces de l’ordre qui intensifient  leurs actions avec des va-et-vient rapides, ponctués de  tirs de gaz lacrymogènes.  Nous étions  à ce moment  au grand marché de Ouagadougou.  Certains vigiles servaient les manifestants en eau. « Nous sommes obligés de surveiller les biens de nos patrons, sinon nous sommes de cœur avec vous. Allez-y ! La lutte paiera »,  a dit l’un d’entre eux. « Il y a de l’eau de l’autre côté. Servez-vous, car vous luttez pour tout le peuple burkinabè », a  lancé un autre  vigile.

9h. Les manifestants décident de redoubler d’efforts sous les balles blanches tirées en l’air pour les disperser.  « Même s’ils tirent,  avançons,  car ces députés veulent voter cette mauvaise loi », a laissé entendre un manifestant.

9h 30. Sous la détermination des manifestants qui ont réussi à  repousser les forces de l’ordre jusqu’au rond- point des Nations unies, l’on a vu en l’air l’eau chaude. Des cris, des soupirs, mais le « mouvement est resté le même. Pas de recul !  On ne recule pas ! Nous n’avons pas le droit de reculer », a dit un manifestant.

 Certains manifestants, à la vue des journalistes étrangers,  s’approchaient  pour crier leur ras-le-bol.

«  Nous ne voulons plus de Blaise Compaoré comme président.  Il a trop duré. 27 ans, ce n’est pas 27 mois, ni 27 jours. Trop c’est trop, qu’il parte », nous confie un jeune manifestant.

C’est aux environs  de 10 h que l’on a vu des flammes jaillir de l’Assemblée nationale. Puis des cris retentirent : «Victoire ! Victoire ! Victoire ! », scandait la grande partie des manifestants. Dans les airs, un hélicoptère tourne. « Ils vont tirer à balles réelles », disaient certains. « Qu’ils nous tuent tous », a rétorqué un autre manifestant. Puis, les manifestant, fiers d’avoir mis le feu à l’Assemblée, se confient  aux journalistes :   « Nous avons chassé les députés et brûlé l’Assemblée nationale ».

Au milieu de la foule, l’on a  vu  un député de l’UNIR/ PS. Il est acclamé par les manifestants. « Merci, merci merci, vous avez été formidables », disait-il.  Puis, il se dirige vers nous : « Nous allons nous retrouver  tout de suite pour  analyser la situation. Actuellement, le chef de file  est en réunion avec les chefs de partis. Nous pensons que d’ici ce soir, quelque chose va être fait et Blaise Compaoré va quitter le pouvoir.  Ce n’est plus le vote de l’Assemblée qui nous intéresse.  C’est que Blaise quitte le pouvoir », a-t-il dit.   Puis, certains décident de continuer à la Télévision nationale. Là,  ils mettent à sac tout ce qu’ils trouvent. Certains camions sont incendiés, des ordinateurs cassés, des postes téléviseurs  détruits, etc. Après l’étape de la RTB, certains manifestants ont mis le cap sur le domicile de François Compaoré, frère cadet du président Blaise  Compaoré. Et c’est là que les choses se sont mal déroulées. Des tirs à balles réelles et blanches. 15 minutes après, les sapeurs- pompiers viennent en toute vitesse transporter les corps vers le Centre hospitalier universitaire Yalgado Ouédraogo. « Ils ont tué  2 manifestants », disent les uns. « Ils en ont tué 6 », disent les autres.

 Il est à noter que certains  manifestants ont tenu à marcher les mains nues, sans casser, sans voler ni piller. Ceux  qui tentaient de faire usage de  pierres ou de tout autre objet, étaient tout de suite rattrapés et dissuadés.

Issa SIGUIRE, Colette DRABO, Mamouda TANKOANO et Rita BANCE


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