HomeA la uneMe BENEWENDE SANKARA, A PROPOS DU DOSSIER THOMAS SANKARA / « On ne peut  pas nous payer »

Me BENEWENDE SANKARA, A PROPOS DU DOSSIER THOMAS SANKARA / « On ne peut  pas nous payer »


Le deuxième numéro du club de presse du Centre de presse Norbert Zongo avait comme invité Me Bénéwendé Stanislas Sankara, le 6 mai 2022. Pendant deux heures d’horloge, Me Bénéwendé Stanislas Sankara est revenu sur son parcours en tant qu’avocat de la famille du président assassiné le 15 octobre 1987. L’avocat a aussi  réagi aux accusations faisant état de son enrichissement dans le dossier Thomas Sankara. 

 

« Dossier Thomas Sankara : péripéties et enseignement d’un marathon judiciaire de 25 ans ». C’est sur ce thème que s’est tenu le deuxième numéro du club de presse du Centre de presse Norbert Zongo, le 6 mai dernier à Ouagadougou. Me Bénéwendé Stanislas  Sankara qui était l’invité de ce 2e numéro  de l’année du Club de presse du Centre de presse Norbert Zongo, est revenu sur son parcours en tant qu’avocat de la famille du président Thomas Sankara assassiné le 15 octobre 1987, mais aussi en tant qu’homme politique. En ce qui concerne le dossier Thomas Sankara, Me Sankara a indiqué que c’est en septembre 1997 qu’il a été approché par un confrère français inscrit au barreau de Montpellier, qui souhaitait faire élection de domicile dans son cabinet, dans le but de porter une plainte au niveau du Tribunal de grande instance (TGI) de Ouagadougou. La plainte a donc été déposée le 29 septembre 1997, soit 10 ans après l’assassinat du père de la révolution et de ses douze compagnons d’infortune.  Pendant ces 10 ans, il y a eu un déni de justice, d’après ses dires. Car, dit-il, « aucune enquête n’avait été ouverte. Il n’y a pas eu, de la part du ministère public, donc des procureurs, de la Gendarmerie ou de la Police, le moindre acte qui dit que l’Etat du Burkina Faso va ouvrir un dossier pour chercher la vérité». La prescription étant de 10 ans, la partie civile, c’est-à-dire les ayants droit du président assassiné, n’avait d’autre choix que celui d’actionner en portant plainte avec constitution de partie civile. C’est le 10 octobre 1997 que Me Bénéwendé Sankara s’est personnellement engagé à se constituer aux côtés de son confrère français pour pouvoir suivre le dossier.  Et s’en suivra une longue bataille judiciaire qui les conduira en 2006, devant les juridictions internationales. « Nous avons été devant le Comité des droits de l’Homme de l’ONU qui a rendu une décision, les constatations, pour constater que l’Etat du Burkina Faso a violé le pacte relatif aux droits civils et politiques. Ce comité a condamné l’Etat du Burkina Faso à faire une enquête, à établir un certificat de décès conforme, à faire en sorte qu’il y ait un procès équitable », relate-t-il. Une décision que l’Etat du Burkina refusera d’exécuter.  « Le Burkina a invoqué plus tard un communiqué administratif qui disait en substance que les réformes opérées au Burkina sont de nature démocratique », a confié Me Sankara. Il a fallu attendre l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014 pour donner un nouveau souffle au dossier du président Thomas Sankara. C’est le juge François Yaméogo, actuel président du tribunal militaire, qui a été saisi. Ce dernier mettra ainsi six ans pour mener l’enquête.  Et le procès débutera le 11 octobre 2021 pour s’achever le 6 avril 2022. 

 

« Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que nous avons réclamé 1 Franc symbolique »

 

Selon l’avocat, ce qu’il faut retenir comme leçon de cette longue bataille judiciaire pour l’aboutissement du dossier Thomas Sankara, c’est qu’il faut la mobilisation, l’engagement et de la constance. Selon Me Bénéwendé Sankara, c’est le dossier Thomas Sankara qui l’a conduit en politique.  A la question de savoir si pendant les 25 ans  de combat, il a été confronté à la peur, l’avocat répond qu’ « on affronte les risques, les menaces. Mais il faut aussi travailler à éviter de tomber dans ces risques (…). Il faut souvent minimiser les risques par son propre comportement. A l’en croire, il a été confronté à la calomnie, la médisance, aux ragots. Et souvent, ce sont nos confrères même qui le font. Je n’intègre pas la peur dans ce que je fais », a-t-il laissé entendre. Quant à la question de savoir si Me Sankara s’est enrichi avec le procès Thomas Sankara, l’avocat répond que l’affaire a été pour lui un combat de toute une vie. « Quand j’entends dire que l’affaire Thomas Sankara a été un fonds de commerce pour moi, je réponds que c’est plus qu’un fonds de commerce. Pour moi, c’est un capital. Un capital d’investissement de toute ma vie dans un combat pour la vérité et la justice pour des gens qu’on a assassinés parce qu’ils aimaient leur pays », a-t-il fait savoir.   Est-ce que c’est la pauvre veuve Mariam ou les enfants qui sont dans la nature qui vont m’enrichir ? Ou bien, ça va venir d’où ?,  s’interroge-t-il.  Et de renchérir que « moi seul sais ce que j’endure, ce que je dépense et je sais ce que chacun fait comme sacrifice dans ce dossier. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que nous avons réclamé 1 Franc symbolique. Notre engagement n’a pas de prix. On ne peut pas nous payer.  Mariam Sankara a dit haut et fort d’ailleurs au cours de la conférence de presse, que nous avons travaillé gratuitement et elle tenait à nous en remercier ». L’avocat a, en outre, rappelé que ce sont les avocats étrangers, au nombre de trois, qui ont réclamé une somme forfaitaire de 50 millions de F CFA pour leurs déplacements et leurs séjours. « Moi, j’ai parcouru l’Europe. J’ai été au Canada, en France, rencontrer les confrères, discuter avec des gens à mes frais. Je n’ai pas demandé qu’on me rembourse un seul centime. Ce dont je me suis enrichi, c’est l’expérience, c’est l’endurance. C’est aujourd’hui, le fait d’avoir avec fierté réussi un pari », a-t-il martelé. En ce qui concerne les restes de Thomas Sankara et de ses compagnons d’infortune, il assure qu’ils sont sous scellé, en lieu sûr gardé secret. Ils seront inhumés en temps opportun après un choix consensuel du lieu où aura lieu l’inhumation.

 

Rahamatou SANON

 

 

 

 

 


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