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ANNONCE DE LA SIGNATURE DE L’ACCORD D’ALGER : On attend de voir


 

S’il y a une crise dans cette Afrique des catastrophes politico-sociales et économiques, dont la résolution est négativement impactée par les sautes d’humeur des acteurs, c’est bien celle du Mali. Disons les choses sans détour : les mouvements rebelles du Nord Mali, membres de la Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA), de part leurs surenchères et leur constante volte-face, ont torpillé jusque- là le processus de paix. Le refus des rebelles de signer l’Accord d’Alger, le 15 mai dernier, est la suite logique de cette surenchère. Mais comme le dit si bien le chanteur ivoirien Alpha Blondy, « tout change, tout évolue, seuls les imbéciles ne changent pas». La CMA qui regroupe les principaux groupes rebelles du Nord malien s’est engagée, la semaine dernière, à signer l’accord de paix d’Alger le 20 juin à Bamako. Elle estime que ses préoccupations ont été prises en compte par le pouvoir de Bamako. Ces préoccupations étaient, entre autres, liées à des questions économiques, sécuritaires, politiques et institutionnelles, telles l’érection des cercles de Ménaka et de Taoudéni en régions, ou encore « une plus grande représentativité des ex-combattants de la CMA dans les commandements des forces armées et de sécurité ».  Ouf ! Est-on tenté de s’exclamer. Tellement beaucoup d’acteurs conditionnent, et non sans raison, le retour de la paix au Mali à la signature de l’accord de paix par les mouvements rebelles, notamment la CMA. En attendant la concrétisation de la promesse de signature pour le 20 juin 2015, on peut d’avance se féliciter et surtout féliciter tous ces acteurs qui ont joué un rôle majeur pour que l’impossible devienne possible. On nourrit le grand espoir qu’à partir de cette date, la paix triomphera de la guerre, la raison de la folie, l’intérêt général de celui particulier, la République du Mali des velléités indépendantistes. Et que surtout le Mali enclenchera un processus irréversible de retour dans le cercle des pays démocratiques et stables où les citoyens réalisent leurs potentiels. Mais voilà. Beaucoup de questions restent en suspens. Que vaut la parole de la CMA ? Que valent ses promesses ? Peut-on faire confiance à des groupes extrêmement ondoyants et imprévisibles dans leurs agissements ? Quel accueil la population de « l’Azawad » va-t-elle réserver à l’accord signé ?

Le 20 juin 2015 ne doit pas être une date propagandiste

Sans jouer l’oiseau de mauvais augure, on peut être sceptique  sur toute la ligne. Primo, d’ici au 20 juin, beaucoup de choses tendant à remettre en cause le processus enclenché, pourraient survenir. Malgré les assurances des uns et autres, il pourrait y avoir des rétropédalages  au niveau des mouvements constituant la CMA. Qui a bu boira. Autrement dit, rien n’indique que les mouvements rebelles ne vont pas rééditer des comportements qu’ils ont eus de par le passé.

Secundo, l’application ou l’applicabilité de l’accord sur le terrain a de fortes chances de poser problème. Déjà, une bonne partie de la population des territoires dits de l’Azawad, voient en la signature de l’accord de paix, une façon pour les mouvements rebelles dont elle se réclame, de calmer juste la situation face à la pression de la communauté internationale. Car, estime-t-elle, l’accord en perspective ne prend pas en compte toutes ses préoccupations. Il ne serait pas surprenant de voir des manifestations spontanées et/ou instrumentalisées de populations du Nord du Mali, pour dénoncer un accord qui a été pourtant paraphé par la CMA.  En tout état de cause, ce serait commettre une erreur stratégique, pour les populations des territoires de l’Azawad et la CMA, que de penser qu’elles peuvent continuer à traîner tout le monde dans la boue et à ruser pour retarder l’avènement de la paix au Mali. Pourquoi ? D’abord parce que la signature de l’accord par la CMA   permettra d’isoler diplomatiquement les terroristes implantés dans le Nord du Mali. En maintenant leur intransigeance, les mouvements de l’Azawad  pourraient être traités comme des djihadistes. Ensuite, les soutiens des mouvements de l’Azawad se sont effrités au fil du temps. Or, s’isoler n’est pas la meilleure des stratégies pour défendre les intérêts des communautés pour lesquelles ces mouvements prétendent agir. En tout cas, la CMA a intérêt à signer l’accord de paix d’Alger. Mais encore faut-il qu’elle ait une lecture objective de la situation et des rapports de force sur le terrain. Bamako a tendu la main. A la CMA de la saisir. Le 20 juin 2015 ne doit pas être une date propagandiste. On attend de voir.

Michel NANA


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