HomeDroit dans les yeuxAPPEL AU DIALOGUE DU FRONT REPUBLICAIN:Que cache ce changement de ton ?

APPEL AU DIALOGUE DU FRONT REPUBLICAIN:Que cache ce changement de ton ?


Jean-Paul Sartre, le philosophe français, avait trouvé la comparaison qui sied pour traduire la dangerosité des mots. En effet, les mots, disait-il, sont comme des « pistolets chargés ». Cet enseignement semble avoir inspiré le Front républicain qui, visiblement, est en train de calmer le jeu en recourant à des mots et à un ton lénifiants.

 

Le ton martial a cédé la place à un ton plus apaisé et plus conciliant

Tous ceux qui ont suivi avec attention les propos qui ont été tenus dans le cadre de la caravane de ce regroupement de partis politiques favorables au référendum dans le Sud-Ouest du pays, ont dû noter que le ton martial dans lequel étaient martelés certaines tirades de cette coalition, a cédé la place à un ton plus apaisé et plus conciliant. Les Burkinabè épris de paix peuvent donc s’en féliciter, nourrir l’espoir de voir ce changement de ton contribuer à désarmer les cœurs et à rapprocher les Burkinabè. En attendant la suite que l’opposition réservera à l’offre de dialogue et de paix que lui ont faite Assimi Koanda et ses camarades, l’on peut déjà s’interroger sur les probables motivations de ce changement de ton. Ces motivations pourraient être liées à des facteurs endogènes et exogènes.

Parlant de facteurs endogènes, l’on peut dire que le pouvoir a pu se rendre à l’évidence que l’aventure dans laquelle il veut se lancer pour permettre in fine à Blaise Compaoré de s’accrocher au pouvoir, peut comporter beaucoup de risques.

D’abord, au plan institutionnel, les choses pourraient se gâter au niveau de l’Assemblée nationale qui, il faut le rappeler, doit obligatoirement valider le projet de modification de la Constitution. Dans l’état actuel des choses, rien ne permet de dire que ce projet passera à l’Assemblée comme une lettre à la poste. En effet, aux députés de l’opposition et à ceux de l’ADF/RDA dont la position contre le référendum est déjà connue, pourraient s’ajouter des voix de certains députés du CDP qui ont de la sympathie pour le MPP (Mouvement du peuple pour le progrès) et qui, pour des raisons peut-être de stratégie, n’ont pas encore fait tomber le masque. Lorsque viendra le temps de se prononcer à l’hémicycle, à bulletins secrets, il faut le rappeler, des surprises amères pourraient être constatées dans les rangs du parti de Assimi Koanda, qui, aujourd’hui, semble constituer un front uni face à la question du référendum. Une autre raison endogène de ce changement de ton des ténors du Front républicain, peut être liée à la détermination de l’opposition et de certains mouvements de la société civile à faire barrage à la modification de la Constitution, en recourant le cas échéant à la désobéissance civile. Cette éventualité peut être redoutée par le pouvoir, qui sait qu’il peut être tenu pour responsable des dérapages liés à la gestion de cette forme de protestation citoyenne qui, du reste, est autorisée par la Constitution.

Le dernier élément endogène qui pourrait expliquer le changement de ton de ceux qui ont l’intention de tripatouiller la Constitution, renvoie à Blaise Compaoré lui-même. En effet, dans l’entretien qu’il a accordé à Jeune Afrique, « l’enfant terrible de Ziniaré » a donné l’impression qu’il ne fait pas de la modification de la Constitution une fixation ni une obsession personnelle.

L’opposition devrait aussi changer de ton

Il se pourrait donc qu’il y ait eu un renoncement au sommet qui s’est métastasé à la base.

A ces considérations domestiques pourraient s’ajouter des éléments exogènes susceptibles d’expliquer le changement de ton des « passionnés » de Blaise Compaoré. En effet, la sortie fracassante de l’ambassadeur des Etats-Unis d’Amérique dans laquelle il s’est dépouillé de son manteau de diplomate pour assener ses vérités aux tripatouilleurs des Constitutions et, dans une certaine mesure, la sortie de l’ambassadeur de France, ont dû ébranler des certitudes et susciter des appréhensions dans le camp des partisans du référendum.

Tous ces facteurs peuvent expliquer qu’aujourd’hui, les adeptes inconditionnels du tripatouillage de la Constitution raidissent moins la nuque. Cela passe naturellement par un changement de ton et c’est ce que, peut-on dire, le Front républicain vient d’opérer. Si ce changement de ton obéit véritablement à un changement de paradigme du pouvoir dont l’objectif est de préserver la paix sociale et de sauver la démocratie tout en aménageant une sortie honorable à Blaise Compaoré, l’opposition n’aurait pas de raisons de refuser l’offre de dialogue du Front républicain. Blaise Compaoré a beau être président, il demeure avant tout un être humain, donc susceptible d’avoir peur de ce qui pourrait lui arriver de fâcheux s’il décidait de s’arrêter en 2015. C’est pourquoi, dans un tel cas de figure, l’opposition devrait aussi changer de ton, pour ne pas donner des alibis à « l’enfant terrible » de Ziniaré de se cramponner au pouvoir.

Sidzabda


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