HomeA la uneAPPEL DE L’OPPOSITION AU RECUEILLEMENT AU GABON : Le ballon de sonde de Jean Ping

APPEL DE L’OPPOSITION AU RECUEILLEMENT AU GABON : Le ballon de sonde de Jean Ping


 

L’opposition gabonaise, à l’appel de Jean Ping, a honoré, hier, 6 octobre 2016, la mémoire de ses militants tombés sur le champ de bataille au lendemain de la proclamation des résultats provisoires de l’élection présidentielle controversée du 27 août  dernier. Le challenger malheureux d’Ali Bongo Odimba a, en effet, appelé les Gabonais à observer pour ces morts « une journée nationale de recueillement » et de compassion avec les familles endeuillées, en restant chez eux.  Cette journée de deuil intervient au moment où le bilan des victimes des violences post-électorales, fait encore polémique. En effet, l’opposition parle de 50 à 100 morts et le pouvoir n’en évoque que quatre et une centaine de blessés, pour l’essentiel des membres des forces de l’ordre. A cet appel de Jean Ping, le régime en place a répondu en bandant les muscles. Ali Bongo a, en effet, lancé une sévère mise en garde contre l’opposition et a rappelé à toutes fins utiles, que la  journée du jeudi restait ouvrée.  Cette menace à peine voilée  laisse envisager l’éventualité de représailles administratives à l’encontre de ceux  qui seraient tentés de répondre favorablement à l’appel de Ping. Et pour preuve, dans une note administrative adressée aux responsables de ses services administratifs, le maire de Port-Gentil  leur intimait l’ordre de dresser pour la journée du jeudi, une liste de présence des agents municipaux, tout en précisant que ceux qui seraient absents de leur poste de travail, seraient privés de leurs émoluments à la fin du mois.  En tapant ainsi du poing sur la table, le système Bongo  ignore volontairement,  sans nul doute,  cette sagesse africaine qui dit que « l’on peut forcer les abeilles à entrer dans la ruche, mais pas à faire du miel ». Les lieux de travail  peuvent constituer des lieux de résistance passive dont les effets peuvent s’avérer des plus pernicieux.

Ping fait preuve de génie politique

Quoi qu’il en soit, c’est donc l’arme de la peur que le pouvoir manie pour endiguer la contestation née du hold-up électoral qu’il a opéré. Il faudra sans nul doute y adjoindre la guerre des chiffres que le « perroquet du palais de marbre » s’efforcera de gagner.  Dans ce cas de figure, le moins que l’on puisse dire, c’est que le pouvoir  fait preuve d’une morbide frilosité. Il en faudra certainement plus pour faire démordre Jean Ping, pour qui cette journée a un enjeu double. Non seulement, il avait un devoir de  mémoire moral pour les martyrs de sa cause, mais il a aussi là l’opportunité de tester sa popularité. Cette journée de recueillement avait les allures du grand rassemblement des combattants par le général d’armée, avant de lancer ses troupes à l’assaut. Le Gabon pourrait connaître, alors, dans les jours à venir,  de fortes turbulences. Quelle que soit l’issue de la journée donc, Ping fait preuve de génie politique en surfant non seulement sur l’émotion soulevée par l’orgie sanguinaire d’Ali Bongo Odimba pour assouvir son inextinguible soif du pouvoir, mais aussi en exploitant à son compte, l’échec du gouvernement d’ouverture qui n’aura finalement appâté que du menu fretin. Il reste à espérer pour lui qu’en écho, les Gabonais ne soient pas gagnés par la lassitude en se disant ceci : « game is over ». Mais si au contraire, les Gabonais refusent de se laisser nouer l’estomac par l’étreinte de la peur et  trouvent en leurs morts des ferments pour fertiliser la lutte démocratique, Ali Bongo  et tous les Raspoutine qui arpentent les arcanes de son palais, devraient s’apprêter pour une mauvaise saison au Gabon. A moins d’agir comme Erdogan en Turquie, auquel cas le Gabon, vu le nombre peu élevé de sa population et l’étroitesse de sa superficie, devrait devenir une prison à ciel ouvert.

 

SAHO  


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