HomeA la uneCONCERTATION DES GROUPES ARMES ET CIVILS DE L’AZAWAD SUR L’ACCORD D’ALGER : Une ruse pour gagner du temps

CONCERTATION DES GROUPES ARMES ET CIVILS DE L’AZAWAD SUR L’ACCORD D’ALGER : Une ruse pour gagner du temps


Le Mali poursuit tant bien que mal son long et pénible chemin vers le retour de la paix dans sa partie Nord. Et on peut aujourd’hui dire que les efforts consentis par les uns et les autres ont, à ce jour, abouti à un projet d’accord que les deux parties, l’Etat malien et les groupes armés du Nord, doivent parapher pour qu’enfin les populations maliennes du Nord puissent vivre dans la paix et s’adonner à des activités de développement. Du côté de Bamako, aucun problème majeur n’a été relevé, si bien que les autorités l’ont immédiatement paraphé. Du côté de l’Azawad par contre, ce document est encore loin de soulever le même enthousiasme chez tous les groupes armés et civils. Conséquence, le document souffre de quelques récriminations de la part du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) et de ses alliés qui ne montrent pas du tout le même empressement à le parapher. Une concertation est d’ailleurs organisée entre les différentes composantes civiles et militaires de l’Azawad, pour décider si oui ou non elles doivent apposer leurs paraphes à côté de celui de Bamako. A vrai dire, le suspense n’est pas encore fini et à Bamako comme à Alger, on retient encore son souffle. Kidal la rebelle va-t-elle enfin rejoindre la République ? Pour l’instant, en tout cas, rien n’est moins sûr. Cela est d’autant plus hypothétique que les leaders du MNLA laissent entendre à qui veut, qu’ils ne peuvent pas parapher le document sans l’accord de leur base. Entendez par là, que la décision de parapher ou non le projet d’accord d’Alger doit venir des populations elles-mêmes. Autant dire que l’on n’est pas encore sorti de l’auberge. Cette inquiétude trouve sa justification dans l’ambiance qui prévaut à Kidal depuis bientôt une semaine et qui, franchement, n’incite pas du tout à l’optimisme. Des touaregs et des populations arabes manifestent tous les jours dans les rues de Kidal, leur hostilité à ce projet. Ces manifestations sont-elles spontanées ou suscitées par les leaders du MNLA qui ne trouvent pas leur compte dans ce projet d’accord et qui cherchent ainsi à gagner du temps pour mieux se réorganiser, s’équiper davantage et se reconstituer?

La communauté internationale devrait s’employer à forcer la main au MNLA

On sait en tout cas que le MNLA n’a jamais renoncé à ses velléités indépendantistes. Mieux, en se rendant à Alger pour participer aux négociations, les leaders du MNLA sont toujours restés dans leur logique souverainiste ; les touaregs négocient avec le sentiment qu’ils sont déjà une république, et donc qu’ils négocient d’égal à égal avec l’Etat malien. Quoi de plus normal, dans la mesure où depuis bientôt deux ans, le MNLA a travaillé à effacer tout symbole de l’Etat malien à Kidal. Pour ces gens du MNLA, Kidal est un Etat souverain, autant que le Mali, et eux s’y sentent bien, sans la présence de Bamako. C’est pourquoi on peut penser légitimement qu’il aurait fallu d’abord ramener Kidal dans la République, avant d’entamer toute négociation. Sous cet angle, on peut dire qu’on a mis la charrue avant les bœufs.
Cela dit, faut-il s’attendre à un retour à la case départ ? Le MNLA prendra-t-il le risque de rejeter le projet d’accord dans son ensemble et de provoquer à nouveau un retour à la guerre ? Une telle option n’est pas à exclure, si l’on en juge du reste par la posture qui est celle du mouvement rebelle en ce moment. Cela pour la simple raison que le mouvement rebelle ne jouit plus suffisamment de l’unicité qui faisait sa force d’antan. Il n’est pas le seul à contrôler la ville de Kidal, depuis que nombre de mouvements armés ont quitté son giron, préférant réaffirmer leur loyauté à Bamako. Plusieurs groupes armés ont, du reste, déjà paraphé ce document en même temps que Bamako. Ces défections sont autant de brèches ouvertes dans la légitimité du MNLA et qui, de ce fait, le rendent plus faible qu’il ne veut le laisser croire. On peut donc croire que malgré les mouvements de protestations auxquels on assiste, le MNLA saura convaincre ses partisans et que dans un avenir proche, il paraphera à son tour le projet d’accord. S’il devait traîner davantage les pieds, la communauté internationale devrait s’employer à lui forcer la main. Cela est nécessaire à plus d’un titre car on a le sentiment que les responsables du MNLA ne jouent pas franc jeu. En effet, ils donnent l’impression de travailler à convaincre la base alors qu’eux-mêmes ne sont pas favorables à la signature de cet accord. La mise en œuvre de cet accord sur le terrain restera certes un problème, mais on peut gager que l’accompagnement de la CEDEAO et du reste de la communauté internationale sera d’un grand apport.

Dieudonné MAKIENI


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