HomeA la uneDECISION DE LA CIJ SUR LA PLAINTE DE KHARTOUM CONTRE ABOU DABI : Quel impact sur la guerre au Soudan ?

DECISION DE LA CIJ SUR LA PLAINTE DE KHARTOUM CONTRE ABOU DABI : Quel impact sur la guerre au Soudan ?


Le 5 mai dernier, alors que la Cour internationale de justice (CIJ) se déclarait incompétente dans le différend qui oppose Khartoum à Abou Dabi, la guerre au Soudan prenait une nouvelle tournure avec l’utilisation de drones par les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FRS) pour bombarder la ville de Port-Soudan, considérée jusque-là comme une zone sûre et devenue par la force des combats, le siège du gouvernement et un refuge pour les déplacés de guerre. En rappel, le 5 mars dernier, le Soudan a déposé devant l’institution judiciaire de La Haye, une plainte pour « complicité de génocide » contre les Emirats arabes unis que Khartoum accuse de soutenir les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) du Général Mohamed Hamdane Daglo dit Hemetti. Lesquelles FSR, dans leur combat contre l’armée régulière fidèle au Général Abdel Fattah al-Burhan qui occupe le pouvoir, se sont rendues coupables de graves exactions contre des populations.

 

Au-delà de son incompétence avouée sur le sujet, l’institution judiciaire n’a pas toujours les moyens de faire respecter ses décisions

 

Toujours est-il que dans sa requête, Khartoum souhaitait non seulement que l’institution judiciaire internationale ordonne aux Emirats arabes unis, de cesser leur soutien présumé aux FSR, mais aussi qu’elle impose à Abou Dabi, de payer des « réparations » aux victimes. Décidés à se défendre, les Emirats arabes unis ont non seulement balayé du revers de la main, ces accusations en déniant toute implication dans le conflit soudanais, mais aussi tout mis en œuvre pour que la procédure ne prospère pas devant la juridiction internationale. Mais au-delà du verdict, la question qui se pose est la suivante : quel impact cette décision de la CIJ, pourrait-elle  avoir sur la guerre au Soudan ? Est-ce que cela va refroidir les ardeurs des protagonistes, en particulier les Emirats arabes unis épinglés par plusieurs rapports d’ONG ou d’experts des Nations unies pointant du doigt leur implication directe dans le dossier soudanais à travers leur soutien et autres livraisons d’armes aux FSR ? Ou bien cela va-t-il décupler la hargne vindicative des belligérants, en l’occurrence celle des deux généraux rivaux, al-Burhan et Hemetti, engagés dans une lutte à mort pour le pouvoir ? La question mérite d’autant plus d’être posée qu’au-delà de son incompétence avouée sur le sujet, l’institution judiciaire internationale basée aux Pays bas, n’a pas toujours les moyens de faire respecter ses décisions. Et même si ces dernières sont contraignantes, à quoi peuvent-elle servir si elles ne peuvent pas être mises en application ? Et dans le cas du Soudan, l’enjeu est d’autant plus grand qu’au-delà de l’image et de la réputation des Emirats arabes unis, qui auraient pu prendre un sérieux coup, l’objectif, pour le Général al-Burhan et son gouvernement, était de priver leur plus grand rival d’un appui précieux qui peut peser sur le cours d’une guerre qui dure depuis plus de deux ans maintenant. Et qui n’est pas prête à connaître son épilogue. Quoi qu’il en soit, avec l’utilisation de ces drones stratégiques, on peut croire, avec les FSR, que « la guerre est entrée dans une nouvelle phase ».

 

Plus de deux ans après le déclenchement de la crise, aucune lueur d’espoir ne pointe à l’horizon

 

Et cela, pour le plus grand malheur du peuple soudanais qui souffre le martyre d’une guerre qu’il n’a pas demandée. Et qui est pris en otage par la boulimie du pouvoir de deux Généraux prêts à sacrifier d’innombrables vies humaines pour assouvir des ambitions égoïstes. Toujours est-il que plus de deux ans après le déclenchement de la crise, aucune lueur d’espoir ne pointe à l’horizon. Comment peut-il en être autrement quand pendant qu’on appelle à la paix, les belligérants bénéficient dans l’ombre, du soutien de puissances étrangères ? C’est dire la complexité de cette crise soudanaise dans laquelle se jouent bien des intérêts cachés. En tout état de cause, l’entrée en action des drones dans ce conflit, est la preuve que les belligérants sont en quête permanente d’armements toujours plus performants. C’est aussi le signe que malgré les déclarations, les parties au conflit sont plus dans la logique d’une hypothétique victoire militaire, que d’une paix négociée. Et ce, dans un contexte où la diplomatie peine à produire les effets escomptés alors que la situation humanitaire reste éminemment préoccupante sur le terrain. C’est dire si la paix au Soudan viendra d’abord des Soudanais eux-mêmes, à commencer par les deux Généraux rivaux qui sont les principaux acteurs de la crise. Mais ces officiers supérieurs sont-ils capables d’un sursaut d’orgueil ? Rien n’est moins sûr.

 

« Le Pays »

 


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