HomeA la uneDIALOGUE POLITIQUE AU GABON : Des solutions cosmétiques pour un mal profond  

DIALOGUE POLITIQUE AU GABON : Des solutions cosmétiques pour un mal profond  


 

Après le père Omar, c’est le fils Ali. A eux deux, ils totalisent 50 ans de règne sur le Gabon. Et tout permet d’affirmer haut et fort que le fils ne caresse pas l’idée de quitter un jour le Palais du bord de mer pour céder la place à un autre Gabonais par le truchement d’une élection digne de ce nom. Il en a donné la preuve à l’occasion de la présidentielle de 2016. En effet, à la faveur d’un scrutin dont il a pris le soin de tronquer les résultats, et ils sont nombreux les observateurs à avoir reconnu cela, il a réussi à prolonger son bail de 7 ans à la tête de l’Etat gabonais. C’est contre cette imposture que Jean Ping et ses camarades sont vent debout au Gabon. De ce fait, une crise politique majeure s’est installée dans le pays et tout laisse croire que ce n’est pas demain la veille que l’on va assister à son épilogue. A cette situation politique explosive est venue se greffer une fronde sociale tous azimuts. Et pour ne pas arranger les choses, les signaux de l’économie sont aujourd’hui au rouge foncé. Bref, en un mot comme en mille, tout le corps du Gabon ainsi que son âme sont mal en point. Et c’est le moins que l’on puisse dire. Pour remédier au mal, le médecin Bongo est entré dans son cabinet et en est ressorti avec un traitement tant prisé sous nos tropiques : le dialogue politique national. Les travaux préparatoires de ce dialogue ont commencé le 15 février dernier. Trois jours plus tard, soit le samedi 18 février, les différentes commissions ont fini de présenter leurs conclusions. Hier 27 février, le rapport final devait être adopté avant une cérémonie de clôture aujourd’hui et une remise du rapport au chef de l’Etat qui interviendra prévue pour demain mercredi.

Bongo fils s’est fait accompagner par des opposants de son goût

Après toutes ces péripéties, Ali Bongo décidera de la date du dialogue. L’objectif poursuivi est double : tourner la page des violences liées à la présidentielle et adopter des réformes politiques d’importance pour éviter de nouvelles crises au pays. Et comme l’on pouvait s’y attendre, le principal opposant, Jean Ping, a refusé de s’associer à ce dialogue. Pour combler ce vide, Bongo fils s’est fait accompagner par des opposants de son goût. Dans ces conditions, l’on peut se demander si les résultats qui en seront issus suffiront pour soigner le mal gabonais. L’on a de fortes raisons d’en douter. En effet, Ali Bongo, conscient de l’illégitimité de son pouvoir et incapable de gérer le front social se retrouve aujourd’hui dans une situation où il ne peut pas gouverner le Gabon. Par conséquent, il se démène dans tous les sens, instinct de survie oblige, pour s’accorder un moment de répit. Et le mode opératoire le plus commode en usage dans ce genre de situations en Afrique est ce qu’il vient de mettre en route : le dialogue national. Et quand l’opposant « motard » Pierre Claver Maganga Moussavou affirme prendre part au dialogue de Bongo tout en restant vigilant afin  « d’éviter les pièges », l’on peut avoir envie d’en rire. Car, il est déjà dans le piège. Le simple fait de participer à un dialogue initié par un individu qui n’a eu aucune gêne à trafiquer les résultats d’une présidentielle pour s’accrocher à son trône est un crime contre la démocratie. Dès lors, l’on peut comprendre pourquoi Jean Ping n’est pas disposé à aller à ce dialogue là. Et en cela, l’on peut dire que l’opposant gabonais a fait preuve de cohérence dans sa posture. Ce serait illogique, en effet, pour lui de contester fortement la légitimé de la victoire de Bongo fils dans un premier temps, puis dans un second temps, faire dans le parjure au point de prendre part à un dialogue qu’il a convoqué sous le prétexte de sortir le pays de l’impasse politique et sociale.

Un prédateur de la démocratie convoque toujours une rencontre pour gagner du temps pour conforter son trône

Et comme nul ne peut se prévaloir de ses propres turpitudes, l’on peut dire que la maladie dont souffre le Gabon aujourd’hui a un et unique nom : c’est Ali Bongo. Si ce dernier avait eu la sagesse de respecter la vérité des urnes, il aurait permis au Gabon de faire l’économie des crises multiformes qui le gangrènent aujourd’hui. Mieux, il aurait par là eu l’occasion de quitter le pouvoir par la grande porte avec la possibilité que le peuple gabonais lui pardonnera les abus commis pendant son règne. Et Dieu seul sait si ces abus sont nombreux. Ce genre de renoncements au pouvoir au nom de l’intérêt supérieur de la nation, on l’a vécu avec l’ancien président béninois, feu le Général Mathieu Kérékou. En effet, ce dernier, tirant leçon d’une expérience révolutionnaire chaotique qui avait endeuillé bien des familles et conduit le pays vers la banqueroute, avait eu l’idée lumineuse d’organiser une conférence nationale souveraine pour permettre à la nation de renaître politiquement. C’est ce courage qui a permis au Bénin de renouer avec la démocratie avec l’élection de Nicéphore Soglo. Aujourd’hui, Kérékou n’est plus de ce monde. Mais les Béninois ne peuvent pas parler de la marche vers la démocratie de leur pays sans évoquer avec déférence son nom. Le comportement de Kérékou est la marque des hommes d’Etat. Manifestément, Bongo fils n’en est pas un. En effet, au lieu de prendre la mesure de tout le mal qu’il a fait à son pays, à l’effet de lui appliquer le remède le plus approprié, il est en train de concocter des mesures cosmétiques pour soigner la pathologie. Pourtant, le mal est profond. Et à l’allure où vont les choses, il peut se métastaser au point de se transformer en un poison de type V/X, du nom de la substance dont vient d’être victime le demi- frère du dictateur Nord-coréen, qui risque de n’épargner personne, à commencer par le médecin traitant lui-même, c’est-à-dire Ali Bongo. Mais les assoiffés du pouvoir ont ceci de déroutant qu’ils sont pathologiquement incapables de se sublimer pour épargner à leur peuple les gémissements et autres soupirs. Et tous ceux qui ont la faiblesse de croire aujourd’hui que des entrailles du dialogue initié par Ali Bongo sortira un Gabon véritablement démocratique, ne tarderont pas à déchanter. Les exemples sont légion, en effet, dans l’histoire, qui illustrent le fait que quand un prédateur de la démocratie convoque une rencontre pour soigner la démocratie, l’objectif inavoué est de gagner du temps pour mieux conforter son trône.  A bon entendeur, salut.

« Le Pays »


Comments
  • Merci cher journaliste du Burkina pour cette brillante analyse !!!

    28 février 2017
  • Merci pour cette analyse aussi riche

    28 février 2017
  • Merci pour ces réalités mises en évidence afin que tous les frères Africains sachent les difficultés auxquelles sont confronter leurs frères Gabonais.
    Le peuple Gabonais dans son ensemble dit NON aux mensonges qu’Ali utilisé pour s’attirer la faveur des panafricanistes !
    Omar était panafricanistes et il donnait à manger à son peuple.
    Aujourd’hui Ali emprisonnent les jeunes au Gabon, fait violer les femmes et les hommes en prison, assassiné les opposants.
    C’est un véritable K. Ô dans ce petit pays.
    Encore un grand Merci à vous pour cette vérité, longue vie à votre journa!, recevez la reconnaissance de vos frères Gabonais !

    1 mars 2017

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