HomeA la uneEXHUMATION DES RESTES DE THOMAS SANKARA : Communiquer pour éviter les suspicions

EXHUMATION DES RESTES DE THOMAS SANKARA : Communiquer pour éviter les suspicions


28 ans après la disparition tragique du chef de la Révolution burkinabè, Thomas Sankara, ses présumés restes ont été exhumés hier, mardi 26 mai 2015. La veille, l’on avait procédé à l’exhumation des restes de deux de ses 12 compagnons d’infortune, Noufou et Amadé Sawadogo, qui étaient à l’époque des faits, des soldats en charge de la sécurité de l’illustre disparu. Les témoins oculaires de ces opérations d’exhumation pouvaient se compter sur le bout des doigts. Les nombreux journalistes de la presse nationale et internationale, tout comme la foultitude de Burkinabè qui ont fait le déplacement du cimetière de Dagnoën, en ont été tenus éloignés. Si pour les partisans de Thomas Sankara et autres badauds, l’on peut comprendre que des mesures draconiennes aient été prises pour les tenir loin des tombes, l’on peut avoir du mal, en revanche, à s’expliquer que les journalistes aient été logés à la même enseigne. Ce d’autant plus qu’ils sont censés informer les Burkinabè de bout en bout, qui, légitimement, ont besoin de tout savoir en temps réel sur le plus grand dossier politico-judiciaire de l’histoire politique de leur pays. Au-delà du Burkina, c’est toute l’Afrique qui trépigne d’impatience de connaître le moindre détail sur l’exhumation des restes de celui à qui bien des Africains continuent de vouer un véritable culte et ce 28 ans après sa mort. Qui mieux que la presse, peut témoigner de ce grand moment à la fois chargé de fortes émotions et d’espoirs ? Pour toutes ces raisons, des mesures auraient dû être prises pour que les journalises venus des quatre coins du monde pour couvrir l’événement, puissent le faire dans les meilleures conditions.

Mais l’on peut, dans le même temps, comprendre pourquoi les autorités judiciaires n’ont pas permis aux gratte-papiers et autres paparazzi d’arriver sur les lieux des fouilles.

D’abord, pour des raisons évidentes liées à l’éthique, l’on peut admettre que les restes de Thomas Sankara soient exhumés dans la discrétion. En effet, si l’on avait permis que les chasseurs d’images aient accès aux tombes, l’on aurait couru le risque de voir diffuser des éléments susceptibles de porter atteinte à la dignité des disparus et de heurter la sensibilité de certaines personnes, notamment celles des parents des victimes.

Tel que les choses se passent, des gens croiront que si la presse a été tenue très loin des exhumations, c’est parce que l’on veut leur cacher la vérité

Ensuite, le travail qui se mène actuellement sur les tombes, est un travail technique et scientifique qui nécessite un cadre sécurisé et serein, à l’effet de permettre aux acteurs du domaine de bien jouer leur partition dans le processus qui doit conduire à la manifestation de la vérité.

Enfin, les exhumations des restes de Thomas Sankara et de ses compagnons se font dans le cadre d’une instruction judiciaire. De ce point de vue, les choses doivent se passer sous le sceau du secret, de sorte à favoriser l’atteinte de la vérité. Dans cette perspective, le fait d’admettre un grand monde à l’endroit des investigations est beaucoup risqué. Non seulement, la sécurité des lieux pourrait ne pas être assurée comme il le faut par les forces de l’ordre, mais aussi des indices importants pourraient être soustraits par des individus qui n’ont pas intérêt à ce que toute la vérité soit connue dans le dossier Thomas Sankara. Car s’il est vrai que Thomas Sankara a de nombreux partisans qui veulent que toute la lumière soit faite hic et nunc sur sa mort, il est vrai aussi que le défunt et illustre président du Faso a des détracteurs qui pourraient n’avoir aucun scrupule à organiser un capharnaüm sur les lieux des fouilles pour que l’opération échoue.

Cela dit, entre le droit légitime des Burkinabè à être informés de bout en bout sur les opérations d’exhumation des restes de Thomas Sankara et de ses compagnons et les mesures qui doivent être observées dans le cadre d’une instruction judiciaire digne de ce nom, les autorités de la justice doivent trouver une formule qui rassurerait au quotidien le peuple burkinabè. Elles doivent d’autant plus le faire que le dossier est à la fois judiciaire et politique et que les Burkinabè attendent depuis 28 ans pour en connaître les tenants et les aboutissants. D’où l’intérêt qu’il suscite au pays et au-delà, en Afrique et dans le monde. C’est pourquoi il faut communiquer pour éviter surtout les suspicions. Car, tel que les choses se passent, il pourrait se trouver des gens qui croiront dur comme fer que si la presse a été tenue très loin des exhumations, c’est parce que l’on veut leur cacher la vérité et ce malgré la présence des avocats et des ayants droit des victimes.

Pousdem PICKOU


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