HomeA la uneGUERRE DANS L’EST DE LA RDC : Comment éviter l’embrasement des Grands Lacs ?

GUERRE DANS L’EST DE LA RDC : Comment éviter l’embrasement des Grands Lacs ?


Après le Secrétaire général des Nations unies qui disait craindre un embrasement régional du conflit en cours dans le Kivu avec l’ouverture possible de nouveaux théâtres de confrontation, c’est au tour du président du Burundi d’affirmer que la propension à l’extension transfrontalière de cette guerre qui mêle enjeux locaux et régionaux, est particulièrement grande, du fait de la situation volatile et explosive enregistrée, la semaine dernière, dans les deux extrémités du Kivu. A vrai dire, même s’il n’y a pas actuellement une guerre de haute intensité menée frontalement par des armées régulières dotées d’armements lourds et stratégiques, il n’en reste pas moins vrai que la situation est lourde de menaces et pourrait agiter davantage toute cette région des Grands Lacs gangrenée, à quelques rares exceptions près, par des rivalités ethniques, une corruption au dernier degré et une mal gouvernance sur tous les plans. L’Est de la République démocratique du Congo pourrait se transformer, si rien n’est fait pour mettre fin au chaos en cours, en un champ de ruines avec une population exsangue entièrement sous le contrôle des rebelles du M23 et de leur parrain rwandais.

 

Malgré la série de revers enregistrée par son armée, le président congolais reste droit dans ses souliers

 

Ces derniers ont, en effet, étrillé, en quelques semaines, une armée congolaise qui a vite fait de capituler en rase campagne et à Goma, malgré le soutien d’une multitude de milices de soudards prétendument patriotes. Pendant ce temps, à Kinshasa, les autorités continuent d’instruire le procès en impérialisme contre le trublion de la région, Paul Kagamé, à la tête d’un Etat confetti dont la surface ne vaut même pas le dixième d’un pays comme le Burkina Faso. Les menaces de « contre-offensive foudroyante » que Tshisekédi a brandies, la semaine dernière, ont été, du reste, accueillies par ses ennemis du M23 et du Rwanda comme une épée de Damoclès en carton, et ne les ont pas empêchés de braquer leurs canons sur Bukavu, la capitale du Sud-Kivu, en attendant de fondre sur Kinshasa si Félix Tshisekedi refuse de manger son chapeau en négociant directement avec les rebelles. Malgré la série de revers enregistrée par son armée et ses supplétifs, le président congolais reste droit dans ses souliers d’autant qu’il s’oppose toujours à toute négociation avec le M23, mais accepte, paradoxalement, de dialoguer avec le parrain rwandais. Félix Tshisekedi n’a visiblement pas compris que son pays ne se sentira pas bien en combattant la peste tout en adoptant le choléra, et qu’en restant dans cette posture, il se rapproche dangereusement du bord du gouffre et pourrait y tomber si le réalisme et le bon sens ne l’emportent pas sur son orgueil et sa condescendance. Au demeurant, il est très loin de s’avouer vaincu, et tout en déplorant la stupéfiante passivité de la communauté internationale face à l’agression dont est victime son pays et au risque d’escalade régionale, il a invité, le 29 janvier dernier, ses compatriotes à se dresser comme un seul homme pour faire barrage aux velléités moralement scandaleuses et géopolitiquement inconséquentes de certaines grandes puissances, de procéder au pillage en règle des ressources naturelles de la RDC, en se servant du Rwanda comme cheval de Troie.

 

Arrondir les angles et trouver des compromis autour des questions qui fâchent

 

 Cet appel au patriotisme semble entendu du côté de Bukavu, où les populations seraient en train de s’organiser pour repousser les assaillants qui projetteraient d’envahir la ville. De quoi rappeler à Corneille Nanga et au Général John Numbi, tous déterminés à chasser Tshisekedi du pouvoir, qu’on doit se garder de vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. C’est vrai qu’en 1997, Laurent Désiré Kabila avait débouché de l’Est du pays pour déboulonner le président d’alors Mobutu Sese Seko avec le soutien de Paul Kagamé. Mais le contexte n’est plus le même, et les Congolais ne semblent plus prêts à voir des soldats rwandais parader dans les rues de Kin-la belle, même si c’est pour les aider à se débarrasser d’un président qui serait déconnecté des réalités du pays, mais qui se considère à la fois comme légitime et populaire. Mais même si à Kinshasa et à Lumumbashi, l’heure n’est pas à l’expression des peurs, les Congolais, dans leur grande majorité, se demandent si l’onde de choc de ce qui se passe à l’Est, ne va pas se ressentir dans les autres parties du pays, surtout si tous les Grands Lacs devaient prendre feu à partir du Kivu. Sur le comment éviter cet embrasement, quasiment tous les analystes se perdent en conjectures, et les plus optimistes espèrent que les chefs d’Etat de la région, avec l’aide de la communauté internationale, se retrouveront autour d’une même table pour arrondir les angles et trouver des compromis autour des questions qui fâchent, tout en décidant de démilitariser l’Est de la RDC et de respecter la souveraineté de ce pays.

 

« Le Pays »

 


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