HomeA la unePASSE D’ARMES ENTRE GBAGBO ET LE GOUVERNEMENT A PROPOS DE SA CONDAMNATION PAR LA JUSTICE IVOIRIENE

PASSE D’ARMES ENTRE GBAGBO ET LE GOUVERNEMENT A PROPOS DE SA CONDAMNATION PAR LA JUSTICE IVOIRIENE


Définitivement acquitté en mars dernier par la Cour pénale internationale (CPI), Laurent Gbagbo a foulé le sol ivoirien le 17 juin 2021. On s’en souvient, l’homme avait été accueilli par des milliers de partisans en liesse. Et le moins que l’on puisse dire, est que l’émotion était au rendez-vous et que le Christ de Mama avait gardé intactes sa popularité et sa grande capacité de mobilisation. Ce que bien des observateurs redoutaient, à savoir un affrontement entre ses partisans et ceux du pouvoir d’ADO, n’a finalement pas eu lieu. Mieux, Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara s’étaient rencontrés. Et l’atmosphère était détendue. A cette occasion, toute la Côte d’Ivoire et l’Afrique avaient retenu que l’actuel locataire du palais de Cocody, avait qualifié Laurent Gbagbo de ceci : « mon ami ». Ces signes d’apaisement se sont poursuivis avec la présence d’Adama Bictogo, un cacique du parti présidentiel, au Congrès constitutif du nouveau parti de Laurent Gbagbo. Tous ces signes pouvaient être décryptés comme des pas vers la réconciliation tant prônée par presque tous les acteurs de la scène politique ivoirienne. Et toute la Côte d’Ivoire s’était mise à rêver de ce grand jour où tous les fils et filles du pays se donneront la main en frères et sœurs, pour chanter ensemble « l’Abidjanaise ». L’on peut craindre désormais  que ce rêve soit compromis par la passe d’armes à laquelle l’on vient d’assister entre Laurent Gbagbo et le gouvernement, à propos de sa condamnation par la Justice ivoirienne. En rappel, alors qu’il était enfermé à la CPI, Gbagbo avait été jugé et condamné à 20 ans de prison par la Justice ivoirienne dans l’affaire dite du « casse » de la BCEAO (Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest).

 

La condamnation  à 20 ans de prison de Gbagbo, plane sur la tête de ce dernier comme une épée de Damoclès

 

Gbagbo est revenu sur ce sujet dans un entretien accordé à France 24. A cette occasion, il a laissé entendre ceci : « Je n’ai jamais braqué une banque. La BCEAO a été braquée par pas mal de braqueurs, par des rebelles. Et c’est Gbagbo qu’on condamne à 20 ans ? On ne va pas me faire admettre ce qui est inadmissible ». C’est clair, net et ferme. Gbagbo est convaincu que l’affaire du casse de la BCEAO, est une cabale politique contre lui. Il s’en indigne et désigne à son tour les vrais auteurs du casse. Comme l’on pouvait s’y attendre, la réponse du gouvernement a été immédiate. C’est son porte-parole, Amadou Coulibaly, qui l’a fait connaître : « M. Laurent Gbagbo a beau être étonné, il demeure poursuivi devant la Justice ivoirienne. Je ne veux pas faire plus de commentaire sur les propos de M. Laurent Gbagbo qui a beaucoup de conflits à régler, y compris des conflits avec sa propre personne ». Le moins que l’on puisse dire est que le ton employé par le ministre est ferme. L’on peut même dire qu’il est allé loin quand il dit que « Gbagbo a beaucoup de conflits à régler, y compris des conflits avec sa propre personne ». En tout cas, ces genres de propos ne devraient être adressés à « un ami ». Pour un rappel ferme à l’ordre, c’en était un. Avant cet échange verbal inamical, Gbagbo avait martelé, à propos de ses intentions pour la présidentielle de 2025, à peu près ceci : « Personne ne doit décider à ma place ». L’allusion est explicite. Elle renvoie à son « ami » Alassane Ouattara qui nourrit aujourd’hui, et cela est de notoriété publique, l’idée de réintroduire dans la Constitution, la clause de la limite d’âge à la présidentielle. Et plus l’échéance de 2025 s’approchera, plus l’on pourra craindre que les relations entre les deux hommes se dégradent davantage. Les éléments précurseurs de cela, peut-on dire, sont en train d’être réunis. En effet, la condamnation  à 20 ans de prison de Gbagbo, plane sur la tête de ce dernier comme une épée de Damoclès. A tout moment, le pouvoir peut manier cette épée contre lui. Au nom de l’apaisement, peut-on dire, la Justice ivoirienne n’a pas daigné inquiéter Gbagbo depuis qu’il est rentré au pays. Mais encore faut-il que ce dernier le comprenne comme tel. De toute évidence, ça ne semble pas être le cas. Car, Gbagbo ne reconnaît pas les faits  qui lui sont reprochés. Mieux, il n’est pas prêt à  «  admettre ce qui est inadmissible ». Toute cette passe d’armes peut contribuer  à dérouler le tapis rouge à un retour  des vieux démons en Eburnie. Cela est d’autant plus justifié que la plaie géante provoquée par la crise de 2010, n’est pas encore cicatrisée. Par ailleurs,  en matière de propos assassins, incitant à la haine, certains acteurs politiques ivoiriens passent pour des orfèvres. La sagesse donc commande que les uns et les autres fassent attention aux mots qu’ils emploient dans leurs discours. Car, comme le soutient le philosophe français Jean Paul Sartre, les mots sont «  comme des pistolets chargés ».

 

Pousdem PICKOU          

 


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