HomeEchos des provincesREPRESSION CONTRE DES ELEVES DU LYCEE DEPARTEMENTAL DE GOUNGHIN : « Pourquoi cette célérité de la Justice ? »

REPRESSION CONTRE DES ELEVES DU LYCEE DEPARTEMENTAL DE GOUNGHIN : « Pourquoi cette célérité de la Justice ? »


Dans la déclaration ci-dessous parvenue à notre Rédaction et provenant de la Fédération des syndicats nationaux des travailleurs de l’éducation et de la recherche (F-SYNTER), il ressort que « la situation au lycée départemental de Gounghin relève d’une remise en cause du droit des élèves ». C’est du moins ce que dit le syndicat. Lisez !

 

S’il y a une question qui a défrayé la chronique en 2015-2016  dans notre région, c’est bien la situation au lycée départemental Saint-Joseph de Gounghin (LDSJG). Une manifestation d’élèves y a dégénéré et trois (3) motocyclettes appartenant à des membres de l’administration ont été incendiées. Cette situation avait soulevé une vague d’indignations et posé à nouveau la problématique de la profonde crise que traverse le système éducatif de notre pays.

En effet, face au refus de l’administration d’organiser les examens blancs, les élèves du LDSJG ont engagé des démarches qui ont buté à un mur de mépris de la part du  proviseur  Sayba  Dindané. Cela va les pousser à recourir à la grève pour se faire entendre.  A-t-on besoin de rappeler les conditions difficiles dans lesquelles étudient les élèves, en particulier ceux vivants en milieu rural? Eux qui ont rarement les enseignants dans toutes les disciplines, presque jamais des bibliothèques fournies. Les examens blancs représentent donc pour eux une belle  occasion de s’exercer pour  affronter avec confiance les examens nationaux.

Les premières manifestations ont eu lieu les 4 et 5 avril 2016, et n’ont pas connu de suite favorable. Pire, au lieu de se pencher sérieusement sur le problème, les autorités administratives ont préféré intimider et sanctionner. La fermeture du lycée intervient par exemple au moment où les discussions se poursuivent (entre administration, enseignants et élèves) pour trouver une solution ! La conséquence est la poursuite des manifestations d’élèves, exacerbées en sus par l’arrogance du proviseur Dindané. Mais cette fois-ci, pour exiger cours et examens blancs.

La Direction régionale du MENA  réagit à cette nouvelle évolution en demandant aux enseignants d’ignorer les manquements du proviseur et aux élèves, de rédiger une demande de pardon adressée au proviseur. Puis, elle fait de cette lettre d’excuses une fixation, un préalable à toute autre évolution de la situation. Pourtant, les élèves, eux, ont consenti à rédiger la fameuse demande d’excuses à la condition que l’administration leur garantisse la tenue des examens blancs. Un dialogue de sourds ou une volonté manifeste de l’administration de ne pas résoudre le problème tout en se cachant derrière le prétexte d’excuses ?

En tout état de cause, les élèves, dans leur majorité, ont rejeté la lettre d’excuses, du fait que les examens blancs n’étaient pas programmés. A partir de ce moment, les intimidations et autres menaces ont pris une autre tournure.

C’est dans ces conditions que le 1er mai 2016, Yougbaré Lucien, élève en classe de Tle A4 et délégué général adjoint du comité des élèves, se donne la mort. Il ressort de la note qu’il a laissée et que des élèves ont pu lire, qu’une des raisons de son suicide était la pression qu’on aurait exercée sur lui pour la rédaction de la lettre d’excuses. Qui a exercé la pression ayant conduit à la mort de l’élève Yougbaré Lucien? Quelle suite entend-on donner à cette situation ?

Le constat qui s’impose est que les autorités administratives et politiques ont préféré  banaliser le décès tragique de l’élève de la classe de Tle A4. Une telle attitude a déterminé la suite des évènements à Gounghin. Comme si cela ne suffisait pas, le bureau du comité des élèves est dissous et ils ne savent plus vers qui se tourner. Même le président de la Délégation spéciale semble si occupé que les élèves ne peuvent pas le rencontrer !

Le 16 mai 2016, les élèves sont obligés d’aller à nouveau en grève contre cet acharnement de l’administration. C’est ce mouvement qui se solde par l’incendie des 3 motocyclettes. Dès lors, l’administration tient la pièce qui lui manquait pour mater ces élèves qui ont eu le « culot » de revendiquer avec détermination, des examens blancs auxquels ils pensent avoir droit !

Le lycée de Gounghin est fermé, les examens de fin d’année sont délocalisés à Baskouré. Un conseil de discipline irrégulier et sous escorte policière se tient le  17 juin à Tenkodogo, sous l’égide de Mahamadi Guébré, proviseur du lycée Kourita de Koupéla. L’exclusion du lycée  est prononcée contre 2 élèves. Mais notre administration et nos politiques, si soucieux de mater pour l’exemple, traduisent les élèves en Justice. Là aussi, ils sont  condamnés  à douze (12) mois de prison ferme et au paiement de sommes d’argent. Quel acharnement ! Pourquoi un tel empressement à sanctionner des élèves qui ont passé des mois à revendiquer un examen blanc ? Pourquoi cette célérité de la Justice pour jeter de pauvres élèves en prison ?

La situation de Gounghin illustre bien :

– la  remise en cause du droit des élèves à revendiquer un enseignement  de qualité ;

– la promotion et la protection des chefs d’établissements irresponsables ;

– la diabolisation des luttes scolaires sous le prétexte de lutte contre l’incivisme en milieu scolaire.

La question de l’incivisme galopant en milieu scolaire est un débat qui peut se poser froidement afin de lui trouver une juste réponse. Mais il est inacceptable de fermer les yeux sur la démission de l’Etat du secteur de l’éducation, l’irresponsabilité de certains chefs d’établissement qui n’hésitent pas à détourner les maigres ressources des établissements dont ils ont la charge et au même moment, indexer et sanctionner sévèrement le moindre mouvement revendicatif des élèves. La portée de la situation de Gounghin réside dans ce désir ardent des gens du pouvoir actuel de criminaliser et d’affaiblir le mouvement scolaire. Gounghin fut l’occasion rêvée.

La F-SYNTER est attachée au principe de la solidarité syndicale entre travailleurs, élèves, étudiants et parents d’élèves. Pour cette raison, la coordination régionale F-SYNTER :

– condamne la répression orchestrée contre les élèves de Gounghin et exige leur libération et la levée pure et simple des sanctions contre eux ;

– exige toute la vérité sur le suicide de  l’élève Yougbaré Lucien ;

– exige le traitement diligent des préoccupations posées par les élèves et les enseignants.

 

Vive l’unité d’action entre travailleurs, élèves et étudiants !

Vive la coordination F-SYNTER !

Vive la F-SYNTER !

Pain et liberté pour le peuple !

 

Pour la coordination  des secteurs F-SYNTER du Centre-EST

 

Le Coordonnateur,

Abdoulaye TARNAGDA

 


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