REPRISE ANNONCEE DES MANIFS DU M5 POUR LE DEPART DE IBK
On se rappelle que le M5 de l’Imam Dicko, avait suspendu ses manifs anti-IBK, à l’effet de permettre aux Maliens de fêter la Tabaski. La trêve a été religieusement observée. La fête passée et alors que certains fidèles n’ont pas fini de digérer la viande du mouton, revoilà le Mali face à ses problèmes. En effet, les contestataires du M5, comme prévu, reprennent du service en milieu de semaine en cours. Et le moins que l’on puisse dire est que c’est la semaine de tous les dangers. Et pour cause : le Mali, depuis juin dernier, s’est installé dans un manichéisme politique qui n’augure rien de bon pour le pays. D’un côté, l’on a le Mali de l’Imam Dicko qui ne jure que par le départ de Ibrahim Boubacar Kéïta et de l’autre, le camp du pouvoir qui ne veut pas en entendre parler. Et tous ceux qui avaient eu la faiblesse de croire que la médiation de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) serait parvenu à rapprocher les positions des protagonistes, sont en train de déchanter tout en se posant la question de savoir ce que réserve au Mali, cette deuxième phase de désobéissance civile.
Tout le monde retient son souffle
La première phase a laissé sur le carreau une vingtaine de morts et fait un nombre important de blessés. L’unité militaire anti-terroriste avait été pointée du doigt par le M5 et cette présumée implication avait davantage fait monter le mercure politique sur les bords du fleuve Djoliba au point que l’on peut aujourd’hui objectivement craindre le chaos pour le Mali. En tout cas, tout le monde retient son souffle dans l’attente de ce que va nous réserver cette semaine. Et cette attente est d’autant plus angoissante que l’on ne voit pas se profiler à l’horizon, une solution qui contentera à la fois et l’opposition et le pouvoir, après l’échec cuisant des 5 missi dominici de la CEDEAO. La thérapie de cette institution, on le sait, a été balayée du revers de la main par les croquants. Notamment, son volet « maintien au pouvoir d’IBK » irrite dans le camp d’en face tant et si bien que la CEDEAO peut, d’ores et déjà, considérer que sa mission est quasiment terminée. De ce point de vue, elle peut, à présent, comme prévu, mettre à exécution sa menace de sanctions contre les récalcitrants. Mais rien ne garantit l’efficacité du recours à la méthode forte aujourd’hui au Mali. Bien au contraire, le fouet pourrait augmenter la sympathie des populations à l’endroit des leaders du M5. D’ailleurs, un homme comme Mahmoud Dicko pourrait tirer des dividendes d’éventuelles sanctions infligées contre sa personne par la CEDEAO. Le religieux fondamentaliste qu’il est, sait que le chemin de la gloire passe incontestablement par le chemin du martyre. C’est pourquoi l’homme dit préférer mourir en « martyr » plutôt qu’en « traître ». La CEDEAO serait donc mal inspirée de prendre cette option. Car, au lieu d’éteindre le feu, elle l’attiserait. L’on peut prendre le risque de dire que le moindre mal pour le Mali, pourrait être tout simplement le renoncement d’IBK au pouvoir. Comparaison n’est pas raison certes, mais l’on se rappelle encore la démission du Général Charles De Gaulle. C’était le 28 avril 1969.
Une éventuelle démission d’IBK pourrait permettre au Mali de repartir sur des bases politiques plus saines
Et c’était la conséquence du rejet, par la majorité des Français, du référendum qu’il avait organisé le 27 avril. Le grand De Gaulle, au propre comme au figuré, n’avait pas craint de ranger sa fierté et son orgueil pour éviter à la France, l’impasse. Ce geste l’avait grandi davantage. Et la suite est connue. De Gaulle passe aujourd’hui pour l’un des présidents qui a le plus marqué dans le bon sens, l’histoire politique de son pays. Certes, le héros qu’il fut pendant la Deuxième Guerre mondiale y a contribué, mais sa démission courageuse, le 28 avril 1969, n’y est pas étrangère. Une éventuelle démission d’IBK aurait également l’avantage d’éviter à la CEDEAO, de perdre la face. Et ce scénario pourrait permettre au Mali de repartir sur des bases politiques plus saines et plus démocratiques. Et au-delà de la CEDEAO, le partenaire traditionnel français, pourrait s’en accommoder. Et effet, la France est consciente aujourd’hui que le régime d’IBK a failli. Sur le plan de la corruption, par exemple, il semble avoir touché le fond. Mais de là à s’aligner sur la position du M5 pour exiger qu’il rende le tablier, il y a un pas que la France ne saurait franchir. Dans ces conditions, si les Maliens eux-mêmes font le ménage de façon endogène, l’on ne voit pas comment la France pourrait s’y opposer sans prendre le risque d’être taxée de soutien des régimes vomis d’Afrique. En tout cas, au Burkina Faso, la France, après avoir soutenu pendant longtemps le régime de Blaise Comparé, n’a pas longtemps hésité à le lâcher quand elle a senti que le sort de l’enfant terrible de Ziniaré, était scellé. En tout cas, IBK ne dispose pas de beaucoup de temps pour sauver le Mali pour autant qu’il veuille encore sortir de l’histoire par une porte qui préserve sa dignité. Et au cas où il se déciderait à démissionner, l’on peut compter sur le génie du peuple malien pour trouver, de manière endogène, une thérapie à son mal. Et le guide religieux ne dit pas autre chose quand il dit ceci : «Il faut restaurer la Nation malienne par les Maliens et pour les Maliens ».
« Le Pays »