HomeA la uneREPRISE DU PROCES THOMAS SANKARA

REPRISE DU PROCES THOMAS SANKARA


Après deux semaines de suspension afin de permettre aux avocats commis d’office de s’imprégner du volumineux dossier de l’accusation, le procès Thomas Sankara a repris hier, 25 octobre 2021, à la salle des banquets de Ouaga 2000. Toutes les parties se sont donc retrouvées devant le Tribunal militaire, sans l’ancien président Blaise Compaoré et sans l’ancien chef de la sécurité de ce dernier, Hyacinthe Kafando, auxquels la Cour avait pourtant donné dix jours pour se présenter à l’audience. Tout laisse croire qu’ils n’ont pas voulu se soumettre à cette injonction, pour ne pas cautionner le triste spectacle d’une parodie de justice aux mobiles politiques sous-jacents, qui restera dans la mémoire collective comme le cercueil d’un certain nombre de droits, selon l’argumentaire de leurs avocats qui ont aussi brillé par leur absence. Qu’à cela ne tienne, la Cour d’assises replonge à partir donc de ce matin dans la terreur de cet après-midi du 15 octobre 1987, et sauf nouveau rebondissement, on entrera dans le vif du sujet et de plain-pied dans ce procès historique et inédit, de par sa charge émotionnelle et par la personnalité des accusés. En tout cas, ces derniers sont appelés à la barre ce matin. Mais vont-ils vider leurs sacs ? Il faut l’espérer. Mais d’ores et déjà, l’on peut se réjouir du fait que le témoignage par visioconférence de certains témoins résidant à l’étranger ait été autorisé par le Tribunal.

 

Ce procès doit avoir un but pédagogique

 

Quid du filmage et de l’archivage de ce procès que réclament à cor et à cri de nombreuses personnes, dont la veuve Mariam Sankara ? Le tribunal va-t-il se raviser ? Rien n’est moins sûr. Mais une chose est certaine,  plusieurs semaines seront nécessaires à la Cour pour décortiquer les milliers de pages de procédure, afin d’évaluer les responsabilités de chacun des quatorze accusés, et faire la part de ce que l’enquête a révélé avec certitude, notamment sur les commanditaires et les membres du convoi de la mort qui serait parti du domicile de Blaise Compaoré, et sur toutes les zones d’ombre qui entourent d’un épais masque, les massacres perpétrés au Conseil de l’entente il y a 34 ans.  En tout cas, les attentes des Burkinabè et des biens d’autres personnes du reste du monde, vis-à-vis de ce procès, sont fortes et c’est peu de le dire. C’est pourquoi les juges doivent travailler à se montrer à la hauteur de l’enjeu. Ce procès doit, non seulement avoir un but pédagogique, mais aussi contribuer à poser les bases d’une vraie réconciliation nationale. C’est pourquoi l’on pourrait dire que l’ancien président, exilé à Abidjan depuis la chute de son régime en 2014, suite à une insurrection populaire, risque de se mordre les doigts. C’est d’autant plus vrai que son absence pourrait être interprété par certains citoyens comme un aveu de culpabilité. Toujours est-il qu’en décidant de ne pas se rendre au tribunal militaire, il manque ainsi l’occasion de s’expliquer sur l’assassinat de son ami et compagnon de lutte.

 

« Le Pays »


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