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RESOLUTION DES CRISES EN AFRIQUE


Après avoir suspendu, il y a peu,  ses patrouilles conjointes avec le Mali, la France a récemment gelé son aide budgétaire à la République centrafricaine (RCA). Elle a,  par la même occasion,  suspendu sa coopération militaire avec le pays de Faustin-Archange Touadéra. Dans les deux pays, les mesures prises par Emmanuel Macron sont intervenues dans un contexte de suspicion de manœuvres souterraines menées par les autorités des Etats incriminés afin de basculer dans l’aire d’influence de la Russie. A titre illustratif, la RCA a été jugée complice d’une campagne antifrançaise téléguidée par le pays de Vladimir Poutine. C’est dire que des pays traditionnellement dans le pré-carré français, ne cachent plus leurs velléités de se défaire de la tutelle française pour se mettre sous les ailes de la Russie qui s’est taillé une solide réputation dans la lutte contre les groupes armés. La question que l’on peut cependant se poser est la suivante : la Russie vaut-elle vraiment mieux que la France en matière de résolution des crises sur le continent ? Il est difficile de répondre de façon objective à la question dans un contexte africain marqué, de plus en plus, par l’exaltation d’un sentiment pro-russe sans être accusé de parti pris par les partisans de la « pax russia ».

 

Il faut craindre que l’influence russe ne fasse fleurir un nouveau printemps de dictatures en Afrique

 

Et pourtant, une analyse froide de la question devrait tempérer les ardeurs de ceux  qui  voient dans l’option russe, la panacée aux conflits armés en Afrique. En effet, en fuyant la France pour aller se mettre sous protectorat russe, l’on ne fait que déplacer le problème sans véritablement le résoudre. L’on ne fait que quitter un pays impérialiste pour aller vers une autre puissance impérialiste. Or, la problématique qui est posée, est celle de la présence des troupes étrangères en Afrique, que d’aucuns voient comme des troupes d’occupation où comme une nouvelle phase de la colonisation du continent. La seconde raison pour se méfier de la présence russe sur le continent, est que le pays de Vladimir Poutine se moque éperdument du respect des droits humains et des principes de la démocratie. Cela dit, il faut donc craindre que l’influence russe ne fasse fleurir un nouveau printemps de dictatures en Afrique, avec une remise en cause des libertés individuelles et collectives. Un troisième motif pour récuser la présence des Russes  en Afrique, est qu’ils  n’interviennent économiquement sur le continent que pour la vente des armes qui ne servent finalement qu’à alimenter les conflits dans lesquels ils reviennent jouer les pompiers. A titre illustratif, la quasi-totalité des armes utilisées par les groupes armés en Afrique, sont les légendaires kalachnikovs russes qui ont été introduites sur le continent par des circuits illégaux de vente d’armes, donc sans véritable plus-value pour les économies des Etats africains. Enfin, ce qu’il faut redouter de cette influence qui peut aller grandissante, de Moscou en Afrique, c’est la prolifération des mercenaires qui constituent la marque déposée de l’exportation des conflits par les Russes dans le monde. 

 

La duplicité de la France est passée aux yeux des opinions africaines, comme une complicité avec les forces du mal

 

Pillant les ressources des Etats où ils interviennent, ils sont prêts à faire perdurer les conflits tant que leurs intérêts financiers sont assurés. L’exemple tout proche de la Libye est là pour nous le rappeler.  Cela dit, la France aujourd’hui parfois huée sur le continent, doit, elle-même, se poser des questions sur sa politique en Afrique. Après le succès de l’opération Serval en 2012, qui avait empêché l’effondrement de l’Etat malien, elle n’est pas parvenue à éradiquer le terrorisme dans la bande sahélo-saharienne, moins par l’inefficacité des stratégies militaires déployées que par la complaisance française pour Kidal reconnue pourtant par tous, comme étant le repaire de toutes les grandes katibas terroristes en Afrique de l’Ouest. Cette duplicité est passée aux yeux des opinions africaines, comme une complicité avec les forces du mal sur fond de soupçons de pillage des ressources du continent. La France paie aussi aujourd’hui pour les liens de servilité dans lesquels elle a maintenu les pays africains depuis la traite négrière jusqu’aux rapports néocoloniaux actuels en passant par la colonisation qui ont eu pour effet, la paupérisation des populations. Or, il est connu que le terreau du terrorisme, c’est bien la pauvreté.  Ceci étant, le plus important  aujourd’hui pour les Africains, ce n’est pas de faire le choix entre des puissances impérialistes qui n’ont que les mêmes intérêts ou même de faire leur procès pour leur faire endosser tous nos malheurs. Ce qui importe aujourd’hui, c’est de nous assumer pleinement. Et nous assumer équivaut d’abord à reconnaitre nos propres responsabilités dans nos malheurs. Car, ce qui empêche nos Etats de bâtir des armées puissantes à même de défaire l’hydre terroriste, ce sont les détournements, la gabegie, la corruption, le clanisme et le manque de vision pour ne pas dire la mal gouvernance. Il nous faut nous attaquer courageusement à ces fléaux si l’on veut véritablement l’indépendance de notre continent au lieu d’alimenter la rivalité historique entre Français et Russes qui n’hésiteront pas à exporter leurs conflits sur le continent. Et comme dit le proverbe, « quand les éléphants se battent, c’est l’herbe qui en pâtit ». Nous assumer équivaut ensuite à élaborer et mettre en œuvre des politiques de développement inclusives de façon à rendre inopérants tous les facteurs incitatifs et attractifs du terrorisme dans nos différents Etats. 

 

« Le Pays »


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