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RETOUR D’ETIENNE TSHISEKEDI EN RDC


C’est, en principe, le 30 mai 2019, que le corps de l’opposant historique aux différents régimes qui se sont succédé en République démocratique du Congo (RDC), Etienne Tshisékédi, décédé à Bruxelles depuis le 1er février 2017 et gardé dans un funérarium, arrive à Kinshasa. L’on se souvient que faute d’accord avec le régime de Joseph Kabila qui tentait de récupérer politiquement l’organisation des funérailles du « vieux lion », le retour au bercail de l’illustre disparu avait été retardé. C’est dire si l’arrivée de la dépouille mortelle du vieil opposant en terre congolaise, constitue un événement. En effet, cette prise en otage qui ne disait pas son nom, sur fond de querelles politiques, était quelque peu gênante et frisait même l’indécence morale dans un contexte africain où l’on pense que les morts ne peuvent rejoindre les ancêtres pour le repos, que lorsque le deuil a été fait et les funérailles célébrées.

Des hommages dignes d’un chef d’Etat

Mais aujourd’hui, tout cela semble être de lointains souvenirs et les obsèques sont annoncées pour être des plus grandioses dans l’histoire politique du pays. En effet, l’agenda des funérailles prévoit l’arrivée de la dépouille mortelle à l’aéroport de N’Djili, en présence du chef de l’Etat et de toutes les autorités de la République. Puis, un cortège funéraire devrait ensuite traverser, pendant toute la journée, Kinshasa, jusqu’à la morgue de l’hôpital du Cinquantenaire, en passant par la résidence et la famille du défunt. Le 31 mai, le corps sera conduit en procession et exposé au Stade des Martyrs où sont attendues 80 000 personnes pour un recueillement populaire et une veillée mortuaire. Le programme du 1er juin prévoit une grande cérémonie au cours de laquelle Etienne Tshisékédi sera élevé au rang de « Héros national » et une grande messe présidée par l’archevêque métropolitain de Kinshasa, Mgr Fridolin Ambongo, en présence de tout le collège épiscopal congolais. L’inhumation aura lieu en fin d’après-midi au monument funéraire de Nselé dans la grande banlieue de la capitale congolaise.  C’est donc peu que de dire que les Congolais ont mis les petits plats dans les grands pour réserver au vieil opposant, des hommages dignes d’un chef d’Etat ; un honneur dont les présidents successifs de la RDC n’ont pas bénéficié. L’on se souvient que Mobutu Sese Seko, mort en exil, a été inhumé dans un obscur cimetière chrétien au Maroc tandis que Laurent Désiré Kabila, son tombeur, a, lui, été inhumé dans des conditions aussi mystérieuses que celles de son assassinat. Etienne Tshisékédi prend donc sa revanche sur l’histoire et doit être doublement comblé dans son sommeil. Car, non seulement il reposera avec tous les honneurs dans le pays auquel il a consacré toute sa vie et entrera ainsi au panthéon de l’histoire du peuple congolais. Mais aussi, il est vengé par son fils Félix Tshisékédi qui est aujourd’hui au pouvoir. Tout ceci est, bien sûr, à mettre à l’actif de ce dernier ; lui qui a tout de suite compris qu’il fallait placer son mandat sous la bénédiction paternelle.

Reste à espérer que les restes du « vieux lion » féconderont et fertiliseront le sol congolais

Au-delà de la RDC qui rend hommage à un homme dont l’histoire personnelle se confond à celle du pays, c’est l’Afrique tout entière qui salue la mémoire d’Etienne Tschisékédi qui se sera illustré pour sa constance dans son combat au sein de l’opposition politique et surtout pour son attachement aux valeurs démocratiques. Dans une RDC dont l’histoire fourmille de rébellions et de séditions, l’homme n’a jamais reculé. Sous cet angle, Etienne Tshisékédi constitue un exemple pour tout le continent.
Cela dit, s’il y a quelqu’un qui devrait être gêné aux entournures et vivre ces journées d’hommages dédiées au Sphinx de Limete, comme des moments de tourments, c’est bien l’ex-président Joseph Kabila et tous les Raspoutine qui arpentaient, en son temps, les arcanes du Palais de la Nation, et qui se sont ingéniés à multiplier les obstacles sur le chemin de retour de celui-là que la RDC pleure aujourd’hui. Ils apprendront à leurs dépens que «  l’on ne peut cacher le soleil avec son doigt» et que « le temps, comme le dit si bien l’adage, est l’autre nom de Dieu. »  Ceci étant, il ne reste qu’à souhaiter que les prières et incantations populaires obtiennent auprès du Tout- Puissant, le repos éternel pour le Sphinx de Limete et espérer que les restes du « vieux lion » féconderont et fertiliseront le sol congolais qui, aujourd’hui, a besoin de paix et de réconciliation pour relever le défi des immenses chantiers du développement.

« Le Pays »


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