HomeA la uneSILENCE DE L’AFRIQUE FACE A LA GUERRE EN UKRAINE : Une attitude dictée par la peur

SILENCE DE L’AFRIQUE FACE A LA GUERRE EN UKRAINE : Une attitude dictée par la peur


Dans la nuit du 23 au 24 février dernier, l’homme fort de Russie,  Vladimir Poutine, lançait ses troupes à l’assaut de l’Ukraine. Alors que presque le monde entier dénonçait une invasion russe, le chef du Kremlin parlait « d’une opération militaire spéciale » dont l’objectif est  de répondre à l’appel des séparatistes de l’Est. Sous l’effet des bombes russes, bien des Ukrainiens ont déjà perdu la vie et l’on ne compte plus le nombre de personnes qui se bousculent à la frontière du pays avec la Pologne pour échapper à la géhenne créée par Poutine. Face à cette tragédie, peu sont les réactions africaines. Il n’est pas exagéré même de parler de silence du continent noir face à la guerre imposée à l’Ukraine par la Russie. En effet, en dehors de l’UA (Union africaine) dont le président, Macky Sall et celui de la Commission, Moussa Faki Mahamat, qui ont tous deux exprimé «  leur extrême préoccupation face à la très grave et dangereuse situation en Ukraine », et de l’Afrique du Sud dont le gouvernement, en des termes explicites, a condamné l’invasion russe, presque tous les autres pays du continent ont brillé par leur absence de réaction. Toutefois, dans le lot, on peut distinguer trois groupes.

 

 

Pour certains pays, la Russie est perçue comme un nouveau partenaire stratégique

 

Le premier est celui des pays africains pour lesquels, les évènements gravissimes qui se déroulent en Ukraine, ne constituent pas une priorité de politique étrangère. La probabilité est grande que l’écrasante majorité des pays africains se retrouve dans ce groupe. Le deuxième groupe est celui des pays africains dont les dirigeants sont en train de convoler, peut-on dire, en justes noces avec la Russie. Pour ces derniers, la Russie est perçue comme un nouveau partenaire stratégique qui ne rechigne pas à défendre la souveraineté nationale contre l’ancien colonisateur  français. La République centrafricaine et le Mali peuvent être considérés aujourd’hui comme la tête de proue de ce groupe. Le troisième et dernier groupe est celui des pays dont les dirigeants refusent de se prononcer sur la tragédie qui se déroule actuellement en Ukraine. La Guinée Conakry a officiellement adopté cette position. Ce qui n’a pas manqué de susciter l’ire de l’Ukraine qui l’a fait  savoir aux autorités de Conakry  en leur demandant de se déterminer clairement face à la tragédie causée par Poutine. Le Consul honoraire de  l’Ukraine à Conakry en a fait les frais, puisqu’il a été purement et simplement suspendu. L’on peut, en réalité, décrypter le silence adopté par ces trois groupes de pays face à la tragédie qui se joue actuellement en Ukraine, comme une attitude dictée par la peur. Celle de se mettre à dos la Russie ou celle de subir les foudres de l’Amérique et de ses alliées européens. En effet, le fait de prendre ouvertement position contre l’invasion russe, peut exposer un pays à la colère, voire aux représailles de la Russie. Les pays africains qui auront la témérité d’applaudir Poutine, pour ses  « Opérations militaires en Ukraine », pour reprendre l’expression officielle en usage à Moscou, courent le risque de se voir remonter les bretelles par les Etats-Unis et leurs partenaires.

 

 

Un pays qui fait partie des cinq privilégiés du conseil de sécurité, peut se donner des libertés qui peuvent mettre en péril la paix dans le monde

 

 

Et cela n’est pas sans rappeler l’adage africain, selon lequel quand les éléphants se battent, c’est l’herbe qui en pâtit. De ce point de vue, la position la meilleure pour le continent face à la guerre en Ukraine, pourrait consister à demander aux deux parties de privilégier les négociations politiques aux armes. Cette approche suggérée par un continent qui, a priori, n’a pas de contentieux majeurs ou de points de frictions graves dans l’histoire avec la Russie, pourrait-elle être examinée sérieusement par Poutine ? Ce dernier pourrait-il craindre de déconstruire l’image de réparateur de torts et de défenseur de la souveraineté nationale contre l’ancien colonisateur français que certaines opinions africaines lui collent, à tort ou à raison, surtout en Afrique au Sud du Sahara ? En tout les cas, ce genre de crises ne connaitront jamais de fin tant que l’ONU n’aura pas le courage de faire sa mue de sorte à se positionner véritablement comme un instrument dédié à la paix. Cette vocation vient d’être rappelée de manière opportune, par le patron de l’institution, Antonio Guterres. Mais ce genre  de rappels n’auront aucun effet, si l’ONU perpétue cette injustice historique qui a consisté à la fin de la seconde Guerre mondiale, à accorder le statut de membres permanents du Conseil de sécurité à 5 pays. Et quand un pays fait partie de ces privilégiés, il peut se donner des libertés qui peuvent mettre en péril la paix dans le monde. Hier, les Etats-Unis l’ont fait au Vietnam, en Irak, la France en Indochine, l’Angleterre dans les îles Malouine. Aujourd’hui, la Russie le fait en Ukraine. Demain, peut- être la Chine le fera. Car, tous disposent de ce fameux droit de veto.

 

« Le Pays »

 

 


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