HomeA la uneTENSIONS SOCIOPOLITIQUES AU SENEGAL  : L’opposition acceptera-t-elle la main tendue de Macky Sall ?

TENSIONS SOCIOPOLITIQUES AU SENEGAL  : L’opposition acceptera-t-elle la main tendue de Macky Sall ?


Dans son adresse à la Nation, le 3 avril dernier, à la veille de la célébration du 63e anniversaire de l’accession de son pays à l’indépendance, le chef de l’Etat sénégalais, Macky Sall, a terminé son discours en se disant « ouvert au dialogue et à la concertation, avec toutes les forces vives de la Nation, dans le respect de l’Etat de droit et des Institutions de la République, pour un Sénégal uni, un Sénégal de paix, de stabilité et de cohésion sociale ». Un discours qui ne manque pas de résonnance, dans un pays marqué par de fortes tensions sociopolitiques sur fond de suspicions diverses. Comment peut-il en être autrement quand l’opposition prête au locataire du palais de la République, l’intention malveillante de prolonger indûment son bail à la tête de l’Etat au point de voir dans les déboires judiciaires de son champion, Ousmane Sonko, une cabale politique visant à l’écarter de la course au fauteuil présidentiel ? Comment peut-il encore en être autrement, quand, au lieu de rassurer ses compatriotes, le président Macky Sall continue de se murer dans un silence qui contribue à alourdir une atmosphère sociopolitique déjà suffisamment pesante et délétère avec toutes ces manifestations parfois ponctuées de violences qui entourent les convocations en Justice, de l’ex-maire de Ziguinchor ?

 

Le président sénégalais semble avoir laissé plus d’un de ses compatriotes sur sa soif

 

C’est dire si à moins d’un an de la présidentielle du 25 février 2024, l’atmosphère sociopolitique est suffisamment tendue au Sénégal pour nécessiter un dialogue entre les acteurs de la scène politique. Et tout porte à croire que plus l’échéance des élections approchera, plus cela déchaînera les passions et le débat sur la question de la légalité et de la légitimité d’un éventuel troisième mandat du chef de l’Etat qui semble avoir levé un coin de voile sur ses intentions, en affirmant qu’il est constitutionnellement qualifié à se présenter. Une vision que ne partage pas du tout l’opposition qui est sur le pied de guerre et a même choisi de boycotter, pour la circonstance, les festivités de l’indépendance en arguant du fait que le chef de l’Etat n’a jusqu’ici posé aucun acte prouvant sa bonne foi à aller à une décrispation de la situation. Cela n’a peut-être rien de nouveau au Sénégal, mais c’est une attitude de désolidarisation qui pourrait dénoter du degré de défiance entre les deux parties.  La question qui se pose alors est de savoir si, au-delà de cette invitation, l’opposition acceptera la main tendue de Macky Sall qui se dit ouvert au dialogue. La question est d’autant plus fondée que tout porte à croire que plus que tout autre chose, c’est l’éventualité de sa candidature à un troisième mandat, qui semble véritablement poser problème. Or, dans le cas d’espèce, le président sénégalais semble avoir laissé plus d’un de ses compatriotes sur sa soif, à la faveur de son discours entrant dans le cadre de la célébration de la fête de l’indépendance qui paraissait pourtant, pour ainsi dire, une occasion indiquée pour clarifier ses intentions.

 

Le compte à rebours semble avoir commencé pour Macky Sall

 

Mais en ne pipant mot sur la question, Macky Sall renforce non seulement le doute dans les esprits, mais il apporte aussi de l’eau au moulin de ses contempteurs qui voient dans son attitude, une stratégie visant à tomber le masque au dernier moment.  Du déjà-vu sous nos tropiques où, de Ouagadougou à Abidjan en passant par Bujumbura, rares (pour ne pas dire aucun) sont les présidents qui ont entretenu le suspense jusqu’au bout, pour finir par un acte de renoncement. Au contraire de ceux qui ont choisi de s’assumer devant l’Histoire en affichant clairement leur position, à l’image d’un Mahamadou Issoufou, l’ancien président nigérien qui est entré dans l’Histoire par la grande porte, en sachant résister dans la parole et dans les actes, à la tentation du troisième mandat qui n’était pourtant pas loin de faire effet de mode en son temps. Cela dit, pour autant qu’il soit dans le doute, Macky Sall a encore le temps de se décider. Et, il lui appartient de savoir écrire son histoire, en tirant leçon de certains de ses pairs, parmi lesquels son prédécesseur Abdoulaye Wade dont le machiavélisme l’avait amené à s’engager sur le même chemin sinueux qui lui avait valu de sortir de l’Histoire de son pays, par la petite porte. Il y va d’autant plus de son intérêt et de celui du Sénégal que pour ses contempteurs, sa candidature à un troisième mandat reste une ligne rouge à ne pas franchir. De quoi s’interroger sur la manière, pour l’opposition, d’appréhender cette offre de dialogue du numéro un sénégalais. En tout état de cause, avec la célébration de ce 63e anniversaire de l’indépendance de son pays à quelque onze mois de la fin de son second mandat, le compte à rebours semble avoir commencé pour Macky Sall. Et tôt ou tard, il va devoir se dévoiler. Ce sera le moment de vérité, pour le bonheur ou le malheur de son peuple. C’est dire s’il a les cartes en main. A lui de savoir laquelle abattre.

 

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