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TRANSITION POLITIQUE AU MALI  


A quelque cinq mois de la fin de la transition au Mali, le débat sur le respect de sa durée divise la classe politique. C’est ainsi que des partis et regroupements politiques ont clairement rejeté la tenue des Assises nationales de la refondation proposées par le Premier ministre, Dr Choguel Maïga, et prévues pour se tenir dans ce mois de septembre 2021 à février 2022. Ils ont décidé de ne pas y participer « si, malgré tout, le gouvernement décidait de les maintenir ». Ils mettent en doute son opportunité après tous les fora, dialogue national inclusif et autres ateliers de relecture de la loi électorale déjà tenus et soupçonnent le gouvernement de chercher à obtenir de façon détournée, la prolongation de la transition sous le vernis de ces consultations dont les conclusions auront un caractère exécutoire et s’imposeront aux candidats. Ils déclarent « le chef du gouvernement, Dr Chogel Maïga, seul responsable de tout dérapage éventuel relatif au respect de la durée de la transition ».  Le moins que l’on puisse dire, c’est que le ton des tiraillements est donné en ce qui concerne la fin de la transition sur les rives du fleuve Djoliba.

 

On ne voit rien se dessiner à l’horizon en termes d’organisation imminente des élections

 

Et les couteaux semblent déjà tirés entre les autorités de Bamako et la classe politique à propos de ses délais. Cela n’est pas véritablement étonnant, tant on voyait venir les choses. En effet, la question qui se pose est celle de la sincérité et de la volonté réelle des dirigeants actuels, de conduire la transition à bon port et dans les délais impartis. La question est d’autant plus fondée que malgré les assurances données au départ par les putschistes et les multiples interpellations à mi-parcours, on ne voit rien se dessiner à l’horizon en termes d’organisation imminente des élections : pas de révision du fichier électoral, pas de calendrier d’enrôlement des électeurs encore moins de retrait des cartes d’électeurs, rien qui puisse rassurer les Maliens et les partenaires du Mali sur la volonté de respecter l’échéance de fin février 2022 marquant la fin de la transition. Et c’est à cinq mois, théoriquement des élections, que les hommes de Kati, par la voix du Premier ministre, sortent de leur béret ces fameuses assises de la refondation supposées déblayer le terrain et poser les jalons du Mali nouveau, là où l’on s’attendait à un chronogramme clair de sortie de transition pour le retour du pays à l’ordre constitutionnel normal. Alors, que comprendre de cette façon, pour les autorités de la transition, d’inverser aujourd’hui l’ordre des priorités pour finalement reléguer les élections au second plan, après avoir passé le temps à rassurer les partenaires sur la noblesse de leurs intentions sans jamais véritablement joindre l’acte à la parole ? Assimi Goïta et compagnie avancent-ils masqués ? En tout cas, ci cette sorte de volte-face au dernier moment n’est pas de la supercherie doublée de duperie, cela y ressemble fort.

 

 

La question est de savoir ce que le gouvernement de la transition va faire, face à cette fronde d’une importante partie de la classe politique

 

Car, bien avant l’annonce de ces assises, la CEDEAO, par la voix de son médiateur, l’ex-président nigérian, Goodluck Jonathan,  à la tête d’une mission d’évaluation de trois jours la semaine dernière à Bamako, avait clairement exprimé son scepticisme quant à l’opportunité de la tenue de réformes institutionnelles et politiques dans le délai de la transition. Elle avait notamment insisté sur le strict respect du calendrier électoral arrêté, non sans constater « le manque de progrès enregistrés dans la préparation des différentes échéances électorales qui doivent se tenir fin février 2022 ». Le Conseil de sécurité de l’ONU ne dit pas autre chose quand il demande la mise en place des dispositions concernant l’organisation de l’élection présidentielle le 27 février 2022, conformément au calendrier électoral communiqué en avril dernier. C’est dire si le combat de l’opposition malienne est un combat d’avant-garde qui vaut la peine d’être mené ; tant elle semble avoir compris le jeu trouble des autorités de la transition. Et on ne peut pas lui donner tort quand tout, dans l’attitude des autorités de la transition, tend à montrer que la tenue des élections à l’échéance de février 2022, n’est pas la priorité de l’heure, à commencer par le Premier ministre  Chogel Maïga qui ne s’en cache même plus dans ses déclarations. L’autre raison d’être encore plus sceptique est l’alternative russe qui semble se dessiner à l’horizon, et qui peut cacher bien d’autres impératifs que ceux purement sécuritaires. La question qui pourrait se poser maintenant est de savoir ce que le gouvernement de la transition va faire, face à cette fronde d’une importante partie de la classe politique. Va-t-il s’obstiner à aller unilatéralement à ces fameuses assises au risque de créer les conditions d’une forte contestation ? Ou bien va-t-il s’atteler à rechercher un minimum de consensus à l’effet d’éviter d’en rajouter à la complexité de la crise malienne ? On attend de voir. Mais d’ores et déjà, on peut dire que le Mali est parti du mauvais pied pour terminer sa transition. Et ces tiraillements, qui font oublier l’essentiel, n’augurent pas de lendemains certains pour le Mali.  Attention donc, danger ! Car, le temps est visiblement compté et le compte à rebours à commencé.

 

« Le Pays »

 


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