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AFFRONTEMENTS INTER ET INTRA COMMUNAUTAIRES AU MALI


 Une guerre dans la guerre

Au Mali, la multiplication des conflits intercommunautaires a de quoi inquiéter plus d’un.  D’autant plus que ces événements qui sont très souvent suivis de morts d’hommes, tendent à exacerber les tensions entre certaines communautés qui se regardent aujourd’hui en chiens de faïence. En effet, quand ce ne sont pas des affrontements entre Peuhls et Dogons qui sont signalés par-ci, comme ce fut le cas dans le cercle de Koro en début d’année, ce sont des heurts meurtriers entre Dozos et Peulhs par-là, comme vécu en milieu d’année à Koumaga dans le cercle de Djenné, qui viennent en rajouter à la complexité d’une situation sécuritaire déjà délétère. Le 23 novembre dernier, c’est dans le cercle de Bankass dans la région de Mopti où cohabitent Dogons, Peuls et Daffing, que l’on déplorait une dizaine de pertes en vies humaines suite à ces conflits intercommunautaires.

Le Mali est encore loin d’être sorti de l’auberge

De quoi donner davantage de soucis aux autorités maliennes en guerre ouverte contre une hydre terroriste qui se révèle plutôt coriace sur le terrain et qui donne suffisamment du fil à retordre à la coalition de forces internationales en présence. C’est dire si le Mali n’a pas besoin de ces conflits intercommunautaires, véritable guerre dans la guerre, autrement plus difficile à maîtriser par des autorités centrales théoriquement astreintes à la neutralité et qui ne sauraient raisonnablement prendre parti pour un camp contre un autre. Et dans le cas d’espèce, l’on est porté à penser que ni Barkhane ni les forces internationales ne sauraient gérer une telle situation, car ce n’est pas le genre de conflits qui se règlent à la canonnade. C’est pourquoi ces conflits intercommunautaires constituent un autre gros défi pour Bamako qui doit se donner les moyens de les endiguer pour donner des chances à l’application de l’accord d’Alger censé tracer la voie de sortie de la crise multi faciale que traverse le pays depuis bientôt six ans.

C’est donc peu de dire que le Mali est encore loin d’être sorti de l’auberge, malgré le déploiement d’importants moyens pour la stabilisation du pays. En tout cas,  la récurrence de ces conflits communautaires constitue une bombe ethnique à retardement qui pourrait non seulement exploser à tout moment entre les mains des autorités maliennes, mais aussi et surtout mettre à mal la cohésion sociale et l’union sacrée pour faire face à l’ennemi commun que sont les djihadistes. C’est pourquoi il est impératif, pour l’Etat, de trouver la formule pour faire baisser la tension et amener les différents protagonistes à fumer durablement le calumet de la paix. Cela est d’autant plus nécessaire que cette situation a généré beaucoup de problèmes au Mali où les amalgames aidant, certaines communautés ethniques ne sont pas loin d’être victimes du délit de faciès et de patronyme. Et l’appel du chef terroriste Amadou Kouffa, à la communauté peule à rejoindre le jihad n’est pas pour arranger les choses pour cette communauté ethnique qui se retrouve dans le collimateur d’autres groupes. D’autant que jusqu’aux forces armées maliennes, il semble y avoir de la méfiance vis-à-vis de ce groupe ethnique à qui le sinistre Amadou Kouffa a voulu donner le visage du terrorisme au Mali.

On ne mesurera jamais assez l’impact négatif de cette situation sur la cohésion sociale

Pendant ce temps, les djihadistes continuent de semer la terreur au sein des populations et des flibustiers de tout acabit en profitent pour s’ériger en coupeurs de routes ou procéder à des pillages de cheptel. C’est pourquoi il est impératif, pour Bamako, de prendre le problème à bras le corps. D’autant plus que l’on ne saurait dire si ces conflits communautaires n’ont pas des soubassements politiques tant les politiciens, sous nos tropiques, sont passés maîtres dans  l’art d’avancer masqués. En tout cas, rien ne dit qu’il n’y a pas de gens tapis dans l’ombre, en train de tirer les ficelles.

Quoi qu’il en soit, on ne mesurera jamais assez l’impact négatif de cette situation sur la cohésion sociale, sans oublier la dégradation continue de la situation sécuritaire dans son ensemble, due à l’action conjuguée des insurgés islamistes et autres groupes terroristes qui écument les parties septentrionale et centrale du pays. Toute chose qui vient en rajouter à la fragilité d’un tissu économique déjà fort désarticulé, mais qui a aussi un impact négatif certain sur d’autres secteurs d’activités comme le monde éducatif où les enseignants désertent les classes quand les symboles de la pensée occidentale que les djihadistes abhorrent ne sont pas l’objet d’autodafés.

En tout état de cause, tant que les conflits communautaires qui gangrènent aujourd’hui le Mali ne seront pas convenablement résolus, il serait utopique de penser pouvoir arriver à une paix durable. Cette denrée devenue rare sur les rives du Djoliba, derrière laquelle le président Ibrahim Boubacar Kéïta (IBK) court depuis sa prise de fonction et qui est en passe d’user bien de ses sandales. Il est donc temps, pour le gouvernement de prendre ses responsabilités. Mais d’ores et déjà, une implication des sages et autres leaders communautaires et religieux s’impose comme une nécessité absolue.

 « Le Pays » 


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