HomeA la uneDISCOURS DU PREMIER MINISTRE DABIRE SUR L’ETAT DE LA NATION :

DISCOURS DU PREMIER MINISTRE DABIRE SUR L’ETAT DE LA NATION :


Le Premier ministre, Christophe Dabiré, a sacrifié à une tradition constitutionnelle, le 16 mai dernier, en prononçant un discours sur l’état de la Nation, devant la Représentation nationale. Loin d’être une allocution de circonstance, le bilan de l’année écoulée, dressé par le chef du gouvernement à travers une osmose métonymique entre le contexte actuel et le contenu de son texte, nous a permis de nous faire une idée de la situation sécuritaire, politique, économique, sociale et culturelle de notre pays, et de la place que l’Exécutif entend donner à nos préoccupations durant les mois à venir. Dans la forme comme dans le fond, le discours a été globalement bien apprécié par les Représentants du peuple, même si quelques-uns l’ont trouvé plutôt aride au sens propre comme au sens figuré, notamment sur les aspects liés à la sécurité, à la justice et à la bonne gouvernance. Sur le plan sécuritaire, le Premier ministre a exhorté les Burkinabè à la solidarité afin de faire face à toutes ces adversités endogènes qui ont pour noms terrorisme, conflits intercommunautaires et grand banditisme. Il a évidemment rendu hommage aux Forces (FDS) de défense et de sécurité qui se battent avec les moyens du bord pour sortir notre pays de la situation dans laquelle il est englué depuis plus de trois ans. Bien que des efforts aient été faits pour contenir la menace, cette guerre asymétrique, de l’avis et de l’aveu de Christophe Dabiré, ne saurait être gagnée sans la participation de tous, y compris ceux de nos compatriotes qui s’estiment stigmatisés à tort. Pour y arriver, le Premier ministre a prôné la mutualisation des renseignements avec nos pays frères et voisins, a promis le renforcement de nos capacités opérationnelles à travers le recrutement et l’acquisition du matériel au profit de nos FDS, a rappelé les programmes de développement en cours d’exécution dans les parties éruptives du pays, et a réaffirmé la volonté des autorités de tout mettre en œuvre pour que les crimes abominables commis à travers le Burkina, soient élucidés et leurs auteurs punis conformément à la loi.

Puisqu’il s’agit du bilan de l’année 2018, rendons à … Paul ce qui est à Paul

Sur ce point précis, certains de nos compatriotes ont estimé qu’il y a du flou dans les chiffres et dans le calendrier, puisqu’on ne connaît pas officiellement et à ce jour, le nombre exact des victimes d’actes de représailles dans cette guerre injuste qui nous est imposée, ni la date probable des premières comparutions, surtout dans les cas où les enquêtes auraient été déjà bouclées. Et comme le temps de la Justice n’est pas celui des hommes, le Premier ministre a invité les Burkinabè à la patience, que ce soit dans les cas des crimes a priori imprescriptibles comme ceux perpétrés à Yirgou ou à Arbinda, ou dans le cas du procès en cours du putsch manqué de septembre 2015 où 84 accusés attendent depuis plus d’un an, de connaître leur sort. En dépit de toutes les difficultés et du sentiment qu’éprouve bon nombre de nos compatriotes d’être dans l’impasse, Christophe Dabiré a révélé que le gouvernement a réussi, en 2018, a remettre la balle au centre en marquant des buts, notamment sur le plan économique, avec le taux de croissance qui est passé de 6 ,3% en 2017 à 6,6% l’année dernière. De quoi semer le doute dans l’esprit de tous ceux qui s’attendaient à un taux plutôt à la baisse, en raison de la fronde sociale qui a sérieusement ébranlé les fondements de notre économie. L’hôte de l’Assemblée nationale du 16 mai dernier, a opportunément profité de l’occasion pour demander une trêve sociale pour ne pas compromettre les indicateurs actuellement au vert, mais lui-même se doute qu’il a prêché dans le désert parce la tendance à arracher ou à conserver des acquis, est devenue quasi irréversible chez les travailleurs depuis que le gouvernement a démontré son aptitude à la reptation devant les syndicats, en perpétuant le péché originel du « cas par cas ». A l’allure où vont les choses, même les succès diplomatiques engrangés par notre pays en 2018 comme le renforcement de l’axe Ouaga-Washington avec le financement par l’Oncle Sam, de 88 conventions pour un montant de plus de 1000 milliards, le rétablissement des relations diplomatiques avec la Chine continentale qui promet monts et merveilles à notre pays, ne pourront pas sortir le pays de l’œil du cyclone dévastateur des syndicats, puisque les fruits de ces différentes coopérations ne devront pas, en principe, servir à payer les salaires. Ils devront plutôt être utilisés pour des investissements dans les domaines de l’éducation, de la santé, des infrastructures, de l’énergie, de la culture et du sport ; domaines dans lesquels le Burkina Faso a fourni des efforts considérables et des avancées notables en 2018, selon Christophe Dabiré. On espère bien qu’il ne s’agit pas de propos rassurants ayant des objectifs politiques sous-jacents mais en total déphasage par rapport à la réalité. Une chose est sûre, c’est que le Premier ministre a visiblement comblé les attentes et touché le cœur des Représentants du peuple, avec la présentation de ce bilan plus costaud, plus concis et plus consistant que ceux qui étaient produits d’habitude à l’occasion de cet exercice annuel. Mais puisqu’il s’agit du bilan de l’année 2018, rendons à … Paul ce qui est à Paul, en reconnaissant a posteriori que le Kaba qui a été grillé en février dernier, avait tout de même bon goût. Car, ce bilan jugé plutôt satisfaisant, est celui du gouvernement du très clivant Paul Kaba Thiéba qui a été naturellement malmené deux ans durant dans notre auguste Assemblée, probablement parce qu’il a été toujours perçu comme un « pawéogo » sans passé politique qu’il fallait laisser dériver avant de le récupérer sur les rives du Kadiogo, pour le recycler à la très juteuse Caisse de dépôts et de consignations.

Hamadou GADIAGA


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