HomeA la uneINSECURITE DANS LE SAHEL : Qu’attendre de la rencontre du G5 à Bamako ?

INSECURITE DANS LE SAHEL : Qu’attendre de la rencontre du G5 à Bamako ?


 

Le centre international de conférences de Bamako abrite depuis le 3 septembre 2015, des rencontres entre les chefs d’état-major, les ministres de la Défense des pays du champ  auxquels se sont associés des experts de l’Union africaine ainsi que d’autres pays voisins du Mali, pour plancher, pendant 3 jours, sur les problèmes  de sécurité qui constituent de véritables freins au développement dans toute la zone sahélo-saharienne, et particulièrement dans les pays membres du G5 que sont le Mali, le Niger, la Mauritanie, le Tchad et le Burkina Faso. Les 12 pays présents dans la capitale malienne se sont donné l’objectif de mettre sur pied des stratégies qui permettront de renforcer la sécurité dans cet espace écumé par des terroristes et autres narcotrafiquants, en instituant des patrouilles conjointes et des unités mixtes avec  la création d’une force d’intervention pour le Sahel. L’objectif est certes noble, mais au regard du contexte sous-régional marqué par une montée en puissance ces dernières années des mouvements djihadistes et indépendantistes, et des moyens dérisoires dont dispose chacun de ces pays pour y faire face, on peut se demander si cette rencontre de Bamako produira les résultats escomptés. Le véritable défi sera en effet de pouvoir mettre en place des forces opérationnelles capables de se déployer à chaque fois que l’alerte est donnée, sans attendre que les lointains pays occidentaux ou la très bureaucratique Organisation des Nations unies (ONU) ne se décident, après moult tractations et valses-hésitations, à financer les opérations des armées des pays concernés par les problèmes sécuritaires, ou même à intervenir directement comme ce que la France et l’ONU continuent de faire au Mali et en Centrafrique. Combien de rencontres au sommet ont été organisées depuis le déclenchement en 2012 de la crise malienne, pour ne prendre que cet exemple, pour mutualiser les forces afin de mettre fin aux velléités indépendantistes des rebelles touaregs et à la tentative avortée des djihadistes d’instaurer par la force, la charia dans la partie septentrionale du pays ? Il a fallu que le président français eût ordonné à son aviation basée au Tchad de briser la colonne des terroristes qui se dirigeait allègrement vers le centre et le sud du Mali, le 13 janvier 2013, pour que le pays de Modibo Kéita ne s’effondre pas, avec le risque d’entraîner ses voisins dans sa désintégration. Les réunions et les conciliabules au niveau sous-régional n’ont servi quasiment à rien, puisqu’ils n’ont pas réussi à poser des actes concrets  à même d’anéantir les ambitions des indépendantistes et leurs alliés de circonstance que sont les terroristes,  à cause des atermoiements des chefs d’Etat et de l’insuffisance pour ne pas dire l’inexistence des moyens financiers pour la mise en œuvre de leurs  stratégies et recommandations.

La victoire contre les ennemis de la paix est possible, pour peu que les Etats abandonnent leur souverainisme

On pourrait également supposer que si dans le cadre du G5, le Mali, le Niger et le Burkina Faso avaient des forces communes patrouillant le long de leurs frontières respectives, le rapt du Roumain Lulian Gherghut à Tambao, dans l’extrême nord du Burkina, revendiqué par le groupe terroriste Al-Mourabitoune, aurait été plus difficile à réaliser, et les kidnappeurs auraient pu être alpagués par cette force mixte. Malheureusement, depuis la naissance du G5 à Nouakchott le 16 février 2014, l’on est resté au stade des déclarations d’intentions et de professions de foi, sans plus. Pourtant, l’expérience a montré qu’avec la coopération effective entre les différents Etats et le partage d’informations sur les réseaux criminels qui font de l’espace sahélien leur zone de prédilection, des résultats tangibles peuvent être engrangés dans la lutte contre la criminalité sous toutes ses formes, à l’image du droit de poursuite que le Mali avait donné à la Mauritanie quand cette dernière était en proie à des attaques et attentats terroristes sur son propre sol. L’armée mauritanienne en avait profité pour attaquer et démanteler les bases des terroristes qui faisaient du  nord-Mali leur zone de repli, à chaque fois qu’ils étaient traqués en Mauritanie. Depuis, le pays de Abdel Aziz n’a pas enregistré d’actes terroristes majeurs, et même plusieurs islamistes se sont rendus, en désespoir de cause, aux autorités mauritaniennes pour garder la vie sauve. Le dernier exemple de coopération transnationale en date est l’extradition de 7 djihadistes maliens arrêtés dans le nord de la Côte d’Ivoire d’où ils préparaient des attentats contre des villes maliennes. L’arrestation de ces terroristes a été rendue possible grâce à la collaboration des populations locales et au quadrillage de la zone frontalière du Mali par l’armée ivoirienne et ses supplétifs Dozos. Comme quoi, la victoire contre les ennemis de la paix, quels que soient leurs idéologies et leurs sombres desseins, est bel et bien possible, pour peu que les Etats abandonnent leur souverainisme de mauvais aloi et acceptent de fédérer leurs efforts et leurs moyens autour de la cause commune, qui est l’instauration de la paix et de la sécurité, gages indéniables du développement. Et espérons que c’est ce à quoi aboutiront les présentes rencontres organisées à Bamako sur l’initiative du G5, afin qu’aucun territoire des pays participants ne soit une zone de repli ou d’influence pour tous ces criminels qui passent allègrement du narcotrafic au terrorisme, et inversement.

Hamadou GADIAGA


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