HomeA la uneLE VIEUX BOB FACE AU POUVOIR : Quand la vieillesse devient un désastre pour le Zimbabwe

LE VIEUX BOB FACE AU POUVOIR : Quand la vieillesse devient un désastre pour le Zimbabwe


 

Le mardi 15 septembre dernier, Robert Mugabe, président du Zimbabwe, a prononcé un discours devant les députés à l’occasion de l’ouverture de la session parlementaire. Il s’est trouvé que le speech est celui prononcé un mois plutôt devant les mêmes députés sur la situation de la Nation. Cette « redondance maladroite », au sommet de l’Etat, est trop inédite pour ne pas être soulignée. La présidence zimbabwéenne a, certes, attribué cette bourde à son secrétariat qui se serait mêlé les pinceaux, mais cela n’enlève rien au fait que Mugabé s’en sort avec une image écornée et ridicule. Le président de l’ancienne Rhodésie du Sud aurait d’ailleurs crié au sabotage ou au complot que cela n’étonnerait guère.  Mais au fait, cette bourde ne peut-elle pas être interprétée comme le signe de la sénilité de l’homme et donc des difficultés que celui-ci rencontre pour assumer les charges suprêmes de l’Etat ? Cette question, aussi indécente qu’elle puisse paraître, soulève, en toile de fond, la problématique de l’alternance politique dans ce pays qui, jusqu’à présent, a été érigée en sujet tabou. Ce ne serait pas exagéré de dire que la question de l’alternance politique ne fait pas partie du champ lexical « mugabéen ». Et pourtant, le vieux devrait s’y résoudre. Mais hélas, le président Mugabe semble s’être emmuré dans son passé glorieux, donnant ainsi l’impression qu’il détient sa légitimité du maquis, par où tout a commencé. A 91 ans il en redemande encore. Il est déjà dans les starting-blocks pour l’élection présidentielle de 2018. Comme on le dit, chaque chose a son temps. Gérer un pays, connaissant toutes les exigences du pouvoir d’Etat, suppose une symbiose entre le mental et le physique. A son âge et malgré sa bonne volonté, Mugabé ne peut plus disposer de toutes ses facultés physiques, mentales et intellectuelles pour servir. Et donc, ceci peut expliquer cela. A ce rythme, Mugabé qui n’est pas à sa première mésaventure après sa chute, est en train de porter atteinte à son image et à son glorieux et exemplaire parcours militant et politique.

Mugabé serait bien inspiré en quittant les affaires avant qu’elles ne le quittent

Car faut-il le rappeler, ce vieillard, nationaliste dans l’âme et dans l’action, aura marqué de son empreinte l’histoire du Zimbabwé voire celle de l’Afrique tout entière. Nonobstant l’hostilité et l’animosité occidentales à son égard, le Vieux Bob a conduit jusqu’à son terme sa politique de réforme agraire qui a permis de faire prévaloir la justice sociale et l’équité dans la gestion des terres dans son pays. En dépit des embargos, des interdictions de voyages, de l’assèchement économique etc. Robert Mugabé a bouleversé une situation où les Blancs qui constituaient 20% de la population occupaient 80% des terres. C’est en reconnaissance de toute cette action que  bien des Zimbabwéens font beaucoup preuve de vénération à leur père. Malgré cette action héroïque et historique, Mugabé devrait s’abstenir de souiller sa réputation. Le monde à changé et le vieil homme serait bien inspiré de se débarrasser de son manteau d’indispensabilité et songer à quitter les affaires avant quelles ne le quittent. Les Zimbabwéens pourraient alors garder en mémoire l’image d’un président combattant et héroïque, d’un vieillard utile et non celle d’un président qui mélange ses discours à l’Assemblée, qui chute en montant des escaliers, … bref l’image d’un grand homme qui s’est banalisé. Et la nouvelle génération de Zimbabwéens qui ne l’ont connu qu’en tant que président et n’auront pas connu ses hauts faits d’armes d’avant, vont préférer tourner un héro en dérision à longueur de journée. Faut-il le répéter, l’histoire retient les dernières images. En passe de contredire la sagesse africaine selon laquelle la sagesse est la fille de la vieillesse, le président crée des problèmes au pays qu’il a bâti à coup de sacrifices énormes. Or, il aurait dû, à 91 ans, faire preuve de pondération et de vision pour que le Zimbabwé lui survive. Parce que faute de n’avoir pas quitté le pouvoir à temps, Mugabé risque de laisser à la postérité l’image détestable d’un président paranoïaque et dictateur.

Michel NANA   


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